ACO France - Action catholique ouvrière
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Témoignage au quotidien

Pendant ce temps de confinement, nous vous proposons des témoignages, des textes, des paroles pour lire, méditer, témoigner. Si vous souhaitez nous faire partager des textes, des prières, merci de nous les envoyer par mail à communication chez acofrance.fr pour diffusion. Et surtout restez chez vous et prenez soin de vous.



9ème jour de confinement !

 

26 mars 2020 2020

Rappelez-vous comment Jésus parlait du Royaume ; pour l’accueillir, il fallait vraiment changer de système, changer de modèle. Le simple rafistolage, vite fait, ne peut pas être une solution :
“Personne ne déchire une pièce d’un vêtement neuf pour la coller sur un vieux vêtement ; autrement, on aura déchiré le neuf, et la pièce prise au neuf ne s’accordera pas avec le vieux. De même personne ne met du vin nouveau dans de vieux bidons ; sinon, le vin nouveau fera éclater les bidons, et il se répandra et les bidons seront perdus. Mais à vin nouveau, bidons neufs !” » Lc 5, 36-38.

N’est-on pas actuellement avec ce minuscule corona devant des choix semblables, concernés chacun personnellement et aussi tous ensemble en société ? Si l’on ne change pas radicalement nos façons de faire, chacun enfermé dans sa bulle, usant et abusant des richesses de la planète jusqu’à les épuiser, si l’on n’invente pas une autre façon de se servir de l’argent et de le partager pour le bien de tous, on le voit bien : tous nos “bidons“ sont en train d’éclater !

Eh bien, avec le vêtement neuf, avec le vin nouveau, un vrai changement nous est proposé, un changement de tout l’intérieur, changer le moteur, changer le cœur, changer le plus profond. Dieu nous reprend notre vieux fond et nous propose un cœur tout neuf, car c’est le sien, toujours jeune, et ce cœur, c’est l’Esprit-Saint, celui qui animait Jésus, en paroles et en actes.

Offre alléchante ; nous voici intéressés (mais un peu sceptiques quand même ! ).

Ce qui t’est proposé, c’est d’abord une nouvelle foi en toi-même, surtout si ta conduite est faite d’habitudes. Tu tournes selon un rythme peinard ; conscient de tes faiblesses, tu ne te crois pas trop capable d’en sortir. Tu vivotes, métro, boulot, dodo… Et parfois tu rentres dans ta coquille. Tu as endormi ton cœur, peut-être parce qu’on t’a fait trop mal… Parfois c’est au contraire l’éparpillement. Ta vie est un chaos, sans repères ; tu cours de désir en désir, et déçu, tu ne sais plus à qui te référer ; tu es comme un papillon ébloui par des lumignons multicolores et qui ne sait où se fixer.

Alors viens accueillir le don de Dieu, car Dieu croit en toi ; il te croit capable de sortir de ton engourdissement ou de ton éparpillement. Il te donne un vêtement neuf. Il te verse à boire un vin nouveau en te communiquant son Esprit. Si tu prends appui sur cet Esprit et non plus sur toi, tu vas devenir capable de démarches nouvelles : comme disait l’apôtre Paul : “Frères, vous n’êtes plus sous le pouvoir de la chair (notre vieux fond), mais sous le pouvoir de l’Esprit, puisque l’Esprit de Dieu habite en vous ! ” Rm 8,9.

Jésus nous propose aussi une nouvelle espérance vis à vis des autres. D’eux, je n’espérais plus rien, plus aucun renouvellement. Il y a des couples qui vivent ainsi, portant un regard sans espoir l’un sur l’autre : comment pourrait-il changer après tant d’années ? Il y a des parents qui se font la même réflexion pour leurs enfants et vice versa ; chacun s’est barricadé dans son petit monde. Parfois, c’est le refus du pardon ; l’autre est devenu un ennemi. Je refuse de croire qu’il pourrait être autre chose que méchanceté ou bêtise. Je n’attends plus rien de lui.

Par son Esprit, Dieu nous invite à un autre regard, un regard neuf. Celui dont je désespère, c’est aussi celui que Dieu aime ; comme moi, il est travaillé de l’intérieur par l’Esprit. Et si je n’arrive pas à espérer en ce qui se voit, en l’extérieur, me voici invité à croire au souffle de Dieu qui le travaille au plus profond. A cet Esprit, présent en lui comme en moi, je fais confiance pour enclencher de nouveaux rapports entre nous. Accueillir l’Esprit de Dieu, c’est renouer avec une vivante espérance, celle même de Dieu vis à vis de chacun d’entre nous.

Il nous propose enfin un amour à réactiver sans cesse. J’ai envie de baisser les bras devant l’ampleur de la tâche : comment renouveler la face de la terre ? Trop fort, trop ambitieux pour moi ! … Alors je suis prêt à laisser le monde en proie à ses démons, à défaut d’y mettre l’amour. Pourquoi s’engager, pourquoi se dépenser, pourquoi vouloir changer les choses, alors qu’il y a tant de corruption, tant d’intérêts, tant d’individualisme. Ne faut-il pas mieux se réfugier dans la prière, en attendant de Dieu un monde meilleur, sans sortir nous-mêmes de notre paralysie ?

Raviver la foi, faire refleurir l’espérance, réactiver l’amour, voilà l’échange-standard qui nous est proposé. Allons-nous en rester à notre vieux fond ? Changeons pour vivre de l’Esprit !

C’est comme un “copier-coller” en informatique ; dans sa parole, je vais chercher la référence qui sera pour moi lumière et nourriture, celle qui va donner du ressort à ma foi, requinquer mon espérance et dynamiser mon amour ; j’en fais la copie que je vais coller dans mes documents pour la faire mienne. Désormais j’adopte le programme évangélique comme programme de base. Je ne retournerai pas en arrière, ou seulement par erreur ou étourderie ; l’ancienne version, je l’ai jetée à la corbeille.

« Qu’il me soit fait selon ta Parole » disait Marie, en ce jour où nous la fêtons : un indice de plus pour, avec elle, changer de logiciel !

Bien amicalement et prenez soin de vous et des autres,

Alain Patin
alain.patin chez libertysurf.fr



 


Jour 17 du déconfinement

 

28 mai 2020 2020

« Et comme Jésus faisait route vers Jérusalem, voici qu’il passa aux confins de la Samarie et de la Galilée. A son entrée dans un village, 10 lépreux vinrent à sa rencontre. Ils s’arrêtèrent à distance et lui crièrent : "Jésus, Maître, prends pitié de nous." A cette vue, il leur dit : "Allez vous montrer aux prêtres." Et en cours de route, ils furent purifiés. L’un d’entre eux, se voyant purifié, revint sur ses pas en acclamant Dieu à pleine voix. Il se prosterna aux pieds de Jésus, en le remerciant. Or c’était un Samaritain. Prenant la parole, Jésus demanda : "Est-ce que les 10 n’ont pas été purifiés ? Les 9 autres, où sont-ils ? Pour revenir remercier Dieu, il n’y a que cet étranger !" Et il lui dit : "Relève-toi, va ; ta foi t’a sauvé”. » Lc 17, 11-19

En réponse à la générosité de Dieu, manifestée par Jésus, seulement 1 sur 10 revient pour remercier ! Certes ici, Luc oublie (intentionnellement ?) de dire que les 9 autres étaient tenus, comme juifs, à aller au Temple accomplir pendant 8 jours les purifications prévues par la Loi de Moïse. Ces 9 lépreux n’étaient donc pas si ingrats que le texte le suggère ! Mais ce que Luc veut souligner, c’est la liberté dont jouit celui qui n’est pas soumis à la Loi ; n’étant pas juif, il n’est pas obligé de suivre les pratiques du Temple. Alors il est libre pour rendre grâces en exprimant ce qui lui monte au cœur.

Mais peu importe ; retenons ces chiffres, 1 sur 10. On pourrait dire 100% de guérison, 10% de reconnaissance ! Alors là, même sans être perfectionniste, on trouve que ça fait peu, et nous approuvons Jésus, d’accord avec la déception qu’il exprime : « Les 9 autres, où sont-ils ? Pour revenir remercier Dieu, il n’y a que cet étranger ! ». Au fond de nous, une évidence : si nous avions été là, nous aurions fait mieux ! 100% de pardon et de vie nouvelle reçus, 10% de reconnaissance ? Est-ce si sûr ?

D’ailleurs la fréquentation de la Bible devrait nous inviter à être plus prudent, car nous sommes assez forts pour juger les autres, sans trop vouloir regarder ce que nous faisons nous-mêmes ! La Bible nous invite toujours à découvrir que l’histoire racontée nous concerne. Cette histoire des 10 lépreux, c’est la mienne. Donc se laisser interroger par ces 10%, avant de juger de l’extérieur ! 10%, ça paraît peu, mais est-ce que cela représente le temps que je donne à Dieu, le temps que j’accorde à l’écoute de sa Parole, à la prière, à l’approfondissement de ce qu’il me propose ? Prenons une journée, retirons le temps contraint, celui nécessaire au sommeil (8 heures), au travail (8 heures), aux repas (3 heures) et sur ce qui reste (5 heures), calculons ce que représente 10% (+ ou - 30 minutes !). Est-ce la part de Dieu ? J’ai peur que ce soit beaucoup moins ! Alors que vaut notre indignation devant le peu de reconnaissance des lépreux ? Peut-être que nous en sommes bien loin !

Dans un autre domaine, celui des paroles échangées chaque jour : 10%, est-ce la proportion que nous consacrons à mettre en valeur ce qui est beau, ce qui porte à rendre grâces, à s’émerveiller, ce qui est bonne nouvelle, à même de faire naître la joie et l’enthousiasme en nous et autour de nous ? Y a-t-il 10% de paroles arrachées à la morosité, qui nous fait ruminer et colporter difficultés et mal-être, pour mettre en valeur ce qui élève et fait grandir ? Là encore 10%, ça paraît peu, mais faisons le test !...

10%, on n’ose à peine se risquer dans un domaine encore plus délicat ! 10% de mes revenus, donnés d’une manière ou d’une autre à quelque chose qui me dépasse, à ce qui n’est pas le simple service de moi-même, de mes besoins, de mes envies ? Voilà une vérité à faire dans un secteur que Jésus souligne souvent comme déterminant parce qu’il mesure notre liberté. « Vous ne pouvez servir deux maîtres : Dieu et l’argent ! » Lc 16,13. Et parfois sa parole propose un choix tellement radical qu’il paraît complètement irréaliste : « Celui qui parmi vous ne renonce pas à tous ses biens, ne peut être mon disciple. » Lc 14,33. Tiens, restons-en aux 10%, ça ne serait déjà pas si mal !

10%, ça semble être une bonne mesure pour commencer à gérer différents aspects de notre existence. Débuter par là, c’est à la fois un objectif ambitieux à atteindre et cependant à notre portée ! Ce pourrait être une manière de gérer notre vie post confinement, mais sans trop nous écraser. 10%, voilà la part dont Jésus semble se contenter, tout en souhaitant davantage. Alors adoptons cette perspective, ouvrons en nous cette brèche, 10% d’ouverture, sans trop s’attacher à des calculs sordides, laissant le Seigneur se glisser par l’embrasure, en lui faisant confiance pour l’élargir à la mesure de son amour ?

Retiens cette invitation à condition qu’elle ne t’établisse pas dans un rapport marchand avec Dieu, ni avec les autres. Ce n’est pas pour t’en contenter, pour penser être quitte quand tu l’auras atteint, pour obtenir je ne sais quelle récompense. “Seigneur, je t’ai donné du temps pour la prière, j’ai consacré mon argent à soutenir des causes : à quoi ai-je droit ?“ - “A t’ouvrir un peu plus, à partager plus délibérément, car là est ta vie, quand tu la donnes, et non quand tu cherches à la retenir. Tu as gagné d’aller maintenant au delà des 10% pour grandir encore et pour vivre plus intensément.” Renonce à tout calcul par rapport à Dieu, mais reçois le don gratuit qu’il veut te faire, et Jésus suggère : tu n’y seras pas perdant !

Si tu fréquentes un peu la Bible (10% de tes lectures ?), tu sais que Dieu est un comptable assez déplorable. Avec lui, il faut pardonner sans compter, inviter sans attendre d’invitation en retour, prêter sans espoir de récupérer son bien, donner son manteau en plus de la tunique demandée et la pauvre veuve qui met quelques centimes dans le tronc donne plus que tous les autres ; 5 pains et 2 poissons nourrissent 5000 hommes ! C’est une arithmétique complètement folle que celle de l’évangile.
Aussi nous sommes prévenus : cet objectif de 10%, c’est une visée pédagogique pour nous, pour nous fixer un but pas trop utopique, pour mettre un peu de réalisme dans notre vie, mais pour le résultat, pour l’appréciation, laissons Dieu compter à sa manière, ne cherchons pas à l’enfermer dans nos calculs. N’est-il pas celui qui donne cent pour un ? Qui serait perdant en lui faisant pleine confiance ?

Dernier message !...et bonne continuation à tous.
Bien amicalement,
Alain Patin
alain.patin chez libertysurf.fr



 


et après ?

 

27 mai 2020 2020

Une petite chanson proposée par Christian Christy sur la musique d’une chanson de Brassens ( l’assassinat 1962 )

La quarantaine nous coupe les ailes, comment vivre l’entraide ?
Des idées, des coups de main malins, c’est vrai on en a plein ( bis )

Ah vraiment qu’on sorte de là, Véran nous aidera.
Faut vraiment être solidaires, sinon on tombe à terre. ( bis )

Comment en sortir vers le haut ? Nous on n’ savait pas trop.
Tenir ensemble et s’épauler, on a bien essayé. ( bis )

Le téléphone et les courriels pour unir, rien de tel ;
La vie vraiment trop confinée ne nous a pas stoppés. ( bis )

Y a pas qu’à la métropole, qu’on vit des choses bien nobles, 5e §, clin d ‘œil à Brassens
Oui nous aussi à Montmerrei, on sait s’organiser. (bis )

Le confinement c’est pour tout le monde, cent km à la ronde :
Et sur le terrain des Pommiers, on a tous partagé. ( bis )

Demain vite nous continuerons, sans faire le dos rond ;
Ce qui nous tient à cœur voyez, c’est la fraternité ! ( bis )

Nous rejoindrons tous les copains qui las, rongent leur frein ;
Nous préparons des lendemains, de sacrés beaux matins. (bis )

A Mortagne, Flers et Alençon, même à Sées sans façon,
A Argentan, à La Ferté, il faut nous rassembler. ( bis)

Des projets on a plein la tête ; on voudrait une fête ;
Tous ensemble unis pour chanter et vivre l’amitié. ( bis )

( la 2e ligne est reprise en bis )

Christian Christy Le 23 mai 2020



 


Jour 13 du déconfinement

 

25 mai 2020 2020

Pierre, qui était à Joppé, monta sur la terrasse, vers midi, pour prier. Il eut faim et voulut prendre quelque chose. Or, pendant qu’on lui préparait à manger, il tomba en extase. Il vit le ciel ouvert et un objet, semblable à une grande nappe nouée aux quatre coins, en descendre vers la terre. Et dedans il y avait tous les animaux et les reptiles, et tous les oiseaux du ciel. Une voix lui dit alors : "Allons, Pierre, tue et mange." Mais Pierre répondit : "Oh non ! Seigneur, car je n’ai jamais rien mangé de souillé ni d’impur !" De nouveau, une seconde fois, la voix lui parla : "Ce que Dieu a purifié, toi, ne le dis pas souillé." Cela se répéta par trois fois, et aussitôt l’objet fut remporté au ciel. Tout perplexe, Pierre était à se demander en lui-même ce que pouvait bien signifier la vision qu’il venait d’avoir, quand justement des hommes envoyés par Corneille, un païen, se présentèrent au portail. Ils appelèrent et s’informèrent si c’était bien là que logeait Simon surnommé Pierre. Comme Pierre était toujours à réfléchir sur sa vision, l’Esprit lui dit : "Voilà des hommes qui te cherchent. Va donc, descends et pars avec eux sans hésiter, car c’est moi qui les ai envoyés.” » Ac 10, 9-20

Curieuse expérience que celle de Pierre. Il est lui, le dépositaire du message du Christ, le témoin du Ressuscité, le chef de la première communauté. Pourtant il va faire l’expérience qu’il est loin de tout savoir, loin d’avoir tout compris. Dans cette aventure qui s’ouvre pour lui avec la demande de Corneille, il va aller de découvertes en découvertes, de dépassements en dépassements.

Curieuse d’abord cette histoire de nappe avec ses quatre coins ! Une nappe couverte des bestiaux les plus divers, et surtout de bêtes impures. Lui, un juif ne devait pas toucher à de telles nourritures. Et voilà que Dieu lui donne l’ordre de passer outre. Pierre découvre que maintenant plus rien n’est impur, ni souillé. Le chiffre quatre attribué à cette nappe évoque la terre tout entière, avec les quatre points cardinaux. Une manière d’exprimer que Dieu déclare qu’à priori rien n’est impur ou souillé sur cette terre. Bien sûr, ce n’est qu’un rêve, mais tout de même, il est troublé, perplexe ! Il connaissait les règles à suivre - celles de la Loi de Moïse - ; le voilà tout bouleversé.

Et ce n’est que le début. Car l’Esprit l’invite à suivre des hommes païens et à se rendre chez eux. Dieu ajoute même qu’ils sont ses envoyés ! C’est le monde à l’envers ! Lui, le messager de la Bonne Nouvelle, il doit suivre des infidèles et, qui plus est, aller chez eux, ce qui est strictement interdit à un bon juif, car pénétrer dans la maison d’un païen rend impur. Tiens, mais “impur”, ça ne lui évoque pas quelque chose ? Depuis l’enfance, il connait toutes ces règles, mais il doit aller au-delà, s’il veut répondre à l’appel de Dieu.

Le plus merveilleux vient ensuite : il se rend donc chez Corneille qui se jette à ses pieds. Mais Pierre lui dit : “Relève-toi. Je ne suis qu’un homme, moi aussi.” Autre façon de dire : “Je ne sais pas tout !” Et alors avec simplicité, il exprime que, grâce à eux, il est en train de découvrir une dimension nouvelle de l’évangile qu’il croyait connaître : “Dieu vient de me montrer, à moi, qu’il ne faut considérer aucun homme comme souillé ou impur.” Et plus loin, il ajoute : “Maintenant, je le comprends : Dieu ne fait pas de différences entre les personnes, mais en toute nation celui qui l’aime et pratique la justice lui est agréable… Il est lui le Seigneur de tous.”

Quelles découvertes pour Pierre et ce n’est pas encore fini ! Il faudra que l’Esprit-Saint lui force la main pour l’amener à baptiser Corneille et les siens et à les accueillir comme des frères. Puis à son retour à Jérusalem, soupçonné d’avoir été trop loin, il devra s’expliquer longuement avec sa communauté. Expériences multiples où il est obligé de reconnaître qu’il a encore beaucoup à découvrir, lui qui est pourtant un des principaux dépositaires de la Bonne Nouvelle. La rencontre de Corneille et des siens l’a amené à discerner de nouvelles perspectives au cœur même de sa foi.

Les événements, que nous vivons actuellement, nous laissent, nous aussi, perplexes comme Pierre. Qu’est-ce que l’Esprit veut nous faire découvrir ? Où nous emmène-t-il ? La tentation existe de refuser de ce bouleversement, sans vouloir accueillir quoi que ce soit de nouveau. J’ai l’impression d’avoir atteint un certain niveau, de posséder un savoir qui me confère une stabilité et un véritable équilibre. Même si ce n’est pas une nappe venue du ciel qui vient troubler mon univers, que faire de cette histoire de virus pandémique ? Vivement que cela arrête pour que je reprenne mes habitudes. C’est pour ne pas en rester là, qu’il est bon de tenter un petit bilan.

Mais cette tentation guette aussi l’Eglise, qui gagnerait à s’appliquer ce principe : “tu ne sais pas tout ! Tu n’as pas tout compris !” Tu as donc beaucoup à recevoir, à apprendre des événements et des autres. Comme Pierre, s’apercevoir que le monde n’est pas en soi impur ou souillé, prendre conscience que Dieu ne fait pas de différences entre les hommes et qu’il veut être le Seigneur de tous. Quelle richesse si notre Eglise (c’est-à-dire “nous“) trouvait à prendre sa place dans les réseaux où les hommes sont en recherche ! Alors sa parole, humblement exprimée parmi d’autres, trouverait une réelle crédibilité. A toujours vouloir parler d’ailleurs ou d’en haut, ne risque-t-elle pas l’incompréhension et le rejet ?

Comme hier à Pierre, des signes nous sont aujourd’hui adressés. Ils nous invitent à d’autres rapports, ceux dont parle l’apôtre Paul : « Je le dis à tous et à chacun : ne vous surestimez pas au-delà du raisonnable ; au contraire considérez-vous avec mesure, selon la part de foi que Dieu a donnée à chacun. En effet, par exemple, nous avons plusieurs membres en un seul corps et ces membres ont différentes fonctions ; de même à plusieurs nous formons un seul corps en Christ, membres les uns des autres, chacun pour sa part doté de capacités différentes selon le don de Dieu. » Rm 12,3-6.

Ensemble, unis, solidaires, quelque chose de plus grand que nous, nous habite et nous soulève. Il y a comme un surcroît de vie et d’amour qui fait éclater nos étroitesses. Vivre, c’est ainsi être renouvelé, enrichi, stimulé par les innombrables rencontres quotidiennes. Nous avons hâte de retrouver nos rencontres en Eglise. Ce temps nous a fait comprendre combien nous en avons besoin. Mais ce n’est pas pour reprendre “comme avant“, c’est pour que cela soit une avancée pour chacun et pour tous, au service de la mission qui nous est confiée tous ensemble. Ouvrons- nous largement à l’Esprit pour cela !...

Alain Patin
alain.patin chez libertysurf.fr



 


jour 10 du déconfinement

 

21 mai 2020 2020

J’aime bien cette fête, célébrée demain jeudi, cette Ascension annoncée par Jésus, et dont il disait : « Il est bon pour vous que je m’en aille ! » Tous les disciples devaient protester, car Jésus ajoute : « En effet, si ne m’en vais pas, l’Esprit ne viendra pas en vous ; mais si je pars, je vous l’enverrai. » Alors, oui, c’est vraiment notre fête ; elle épouse réellement notre condition de croyant. Nous croyons en ce Dieu qui s’est rendu absent de nos vies ; il s’est retiré du monde. Dieu, on ne le voit pas, on ne se heurte pas à sa présence. Il est ce Dieu que personne n’a jamais vu, même s’il s’est laissé apercevoir en Jésus de Nazareth quelques courtes années et c’est presque rien au regard de la déjà longue histoire de l’humanité.

Ainsi, curieusement, nous fêtons l’Absent, curieuse fête ! Et pourtant si nous savons la déchiffrer, cette fête ouvre des perspectives très stimulantes :

J’en discerne trois, d’après les textes que nous entendrons.

La première nous fixe une tâche : « Vous serez mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie et jusqu’aux extrémités de la terre ». Et ceux qui n’auraient pas compris qu’il s’agit de s’y mettre, et qui restent à « regarder le ciel », sont disqualifiés. Une mission nous attend sur cette terre, au cœur de nos rencontres et dans notre contexte social. Nous savons que cette annonce, confiée d’abord aux apôtres et puis à nous tous, comporte deux volets : une proclamation en actes et en paroles.

En actes, pour montrer quels fruits produit celui qui accueille la force de l’évangile, quel renouvellement pour notre société, si nous voulons qu’elle se bâtisse sur l’amour et non sur le profit, la violence ou la recherche du plaisir sans fin.

Et en paroles, pour dire en qui nous puisons cette force de vie et de renouveau ; témoigner de l’Esprit qui nous entraîne toujours plus loin.

Ainsi Dieu nous confie de le faire connaître, lui et sa Parole de vie. Personne d’autre ne le fera à notre place. Il nous veut pleinement responsables, et pour cela, il s’absente, mais sans nous laisser seul, puisque Jésus précise : « Vous allez recevoir une force, celle de l’Esprit-Saint qui viendra sur vous. »

Il ne nous laisse pas orphelins, et nous découvrons comment avec la deuxième lecture : « l’Église, qui est son corps, c’est l’accomplissement total du Christ. » Oui, en paroles et en actes, nous avons à le faire ensemble, en Eglise. Tandis que nous sommes actuellement privés de nos rassemblements, nous avons la chance d’en ressentir davantage l’importance. On ne peut durablement être chrétien sans le vivre en communauté, et nous pressentons quelle joie ce sera, quand enfin nous pourrons à nouveau nous rassembler. Alors plutôt que de faire attention aux prophéties de malheur, il est bon de reprendre les mots du Pape Paul VI à propos du Concile : « Plus tard l’historien se demandera : que faisait l’Eglise pendant le Concile ? L’Eglise aimait ! Elle aimait le Christ, elle aimait tous les hommes. » Que fait l’Eglise aujourd’hui sous le vent du virus ? Va-t-elle se laisser prendre par la peur d’une catastrophe annoncée ? N’est-il pas plus réaliste , plus conforme à l’appel de l’évangile, qu’elle dise et que nous disions : “Notre Eglise, notre communauté, elle aime, elle consacre toute son activité à aimer, d’un même élan, Dieu et ses frères les hommes !“ A chacun de nous, de voir comment rendre cet amour plus effectif. Déjà bon nombre d’entre nous le vivent et traduisent cela par des engagements concrets. Mais il y a tant de situations à prendre en compte qu’il y a place pour tous et que beaucoup de bénévoles sont nécessaires, pour faire jaillir un réel service de tous ceux qui peinent. Certainement que, sur cette piste, un vrai bonheur nous habitera, selon la parole de Jésus : « Heureux le serviteur que le maître, à son retour, trouvera occupé… »

D’ailleurs et c’est la troisième piste, le départ de Jésus pour son Père et son accomplissement auprès de lui, nous est offert comme un avenir formidable. Pour nous aussi, notre réussite et notre accomplissement se situent là, auprès de Dieu, dans sa splendeur. Jésus qui le premier a pris ce chemin nous ouvre une route à suivre. Comme l’exprime la Préface de ce jour, cette vérité nous est manifestée : « Jésus ne s’évade pas de notre condition humaine, mais en entrant le premier dans le Royaume, il donne aux membres de son corps l’espérance de le rejoindre un jour. » C’est dire que notre vie et notre monde ne sont pas voués à quelque catastrophe, mais au contraire débouchent sur un monde réconcilié selon le cœur de Dieu. Et d’en reprendre conscience devrait nous rendre plus ardents et plus convaincus pour y travailler sans relâche.

Aujourd’hui donc, reprenons conscience de cela pour nous en réjouir, pour faire la fête : 3 raisons :

Avec Jésus, Dieu se fait discret. Il nous laisse toute la place pour que soyons ses témoins en actes et en paroles. C’est la fête de notre pleine responsabilité

C’est ensemble, en peuple, en Eglise que cela nous est confié, les uns stimulant et entraînant les autres, en une vivante Espérance. C’est la fête de notre rencontre, une rencontre que nous souhaitons prochaine et effective.

Et Jésus, déjà parvenu au terme, comme le premier d’une multitude de frères, nous manifeste en ce jour que le résultat final n’est pas douteux. Dieu triomphera par l’amour. Pour en vivre, nous avons les derniers mots de l’évangile : « Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde. » C’est la fête de notre Avenir : A bientôt et bonne fête !

Alain Patin



 


Jour 6 du déconfinement

 

17 mai 2020 2020

Les temps difficiles, comme ceux que nous vivons actuellement, nous semblent figés et bien longs. Nous aimerions déjà être libérés de ce qui pèse sur nous. En voici un qui attendait, et depuis longtemps !

« Pierre arriva chez les croyants qui habitaient Lydda. Il trouva là un homme du nom d’Enée couché sur une paillasse depuis 8 ans ; il était paralysé. Pierre lui dit : "Enée, Jésus Christ te guérit. Lève-toi et fais toi-même ton lit." Aussitôt il se leva. Tous les habitants de Lydda et de la région de Saron le virent, et ils se convertirent au Seigneur. » Ac 9, 32-35

Depuis 8 ans ! 8 ans d’immobilité, de paralysie ! Nous n’en sommes pas là ! Mais Pierre, à la suite de Jésus, ne supporte pas cette vie amoindrie, réduite à l’immobilisme, et certainement à la mendicité et à la dépendance, comme c’était alors le cas. La rencontre avec la parole de Jésus le libère, le remet d’aplomb, lui redonne sa dignité. Et Enée prend place dans la longue file de ceux que Jésus a relevés. N’avait-il pas déclaré que sa mission consistait en « une année de bienfaits de la part du Seigneur » ? Et le premier de ces bienfaits, n’est-ce pas de remettre l’homme debout, en marche.

Chaque fois que Jésus rencontrait quelqu’un, ce n’était jamais pour souligner ce qui était négatif, mais bien plutôt pour lui ouvrir un avenir. Il disait : “tu peux voir, tu peux parler, tu peux marcher. Essaie, risque-toi…” Et sur cette confiance qu’on lui faisait, paralysie, aveuglement, mutisme étaient éradiqués. Cette manière de faire, Pierre nous montre qu’elle n’est pas un privilège réservé à Jésus, mais un comportement à reproduire vis à vis des autres. Ce que Jésus faisait, à nous aujourd’hui de le poursuivre. A sa suite, être semeur de bienfaits, échanger des paroles et des actes qui remettent en marche, qui permettent de mieux voir, d’être davantage à l’écoute. Un terme emprunté à la publicité me semble résumer cette attitude fondamentale : “Il faut positiver !“

Jésus savait mettre en relief ce qu’il découvrait de positif. Jamais, il n’accablait le pécheur sous sa faute. Au contraire, il soulignait le moindre geste de foi : “O femme, grande est ta foi ! ” Mt 15,28.

Il y a bien des domaines où cultiver cette manière de vivre ! Déjà, en couple, ne faudrait-il pas “positiver” plus souvent. Savoir se dire simplement ce qui rend heureux. Quel temps donné à s’exprimer le bonheur d’être ensemble et la joie de s’aimer ? Ceci non seulement dans les premières années du mariage, mais après 10, 20, 30, ou 40 ans ! Et ne pas hausser le ton, seulement pour s’expliquer quand ça va mal !

Entre parents et enfants, n’est-ce pas trop souvent les paroles aigres-douces ? Un certain nombre de jeunes et d’adolescents sont assez lucides pour le reconnaître : “En famille, je suis souvent agressif, renfermé, désagréable. J’envoie facilement balader les parents, et pourtant je les aime bien, je trouve même qu’ils sont chouettes.” Eh bien, de temps en temps, au lieu de montrer ta mauvaise humeur, dis-leur que tu les aimes. Et toi, père ou mère, prends le temps de souligner ce que tes enfants font de bien, pour les inciter à aller de l’avant au lieu de relever les manques et les échecs. Oui, prendre la parole pour dire le positif, prêter attention à ce qui rend heureux, à ce qui fait naître un sourire, quel beau programme !

Dans notre vie quotidienne comme dans nos relations familiales, nous sommes souvent victimes des médias, où tout est fait pour souligner le négatif. Est-ce que nous ne vivons pas sous influence, reproduisant chez nous et autour de nous le même modèle, colportant la grisaille et la résignation ?

Développer une attitude positive implique de savoir cultiver le beau et le bien. Cultiver, parce qu’il est nécessaire d’y donner du temps. Observer, recueillir, trier et garder le meilleur. Cultiver le beau, c’est s’attarder aux belles choses à voir : prendre le temps de contempler un beau paysage, s’étonner de la splendeur d’un coucher de soleil, admirer un ciel étoilé ! C’est encore s’extasier devant la mimique d’un enfant, découvrir la sagesse dans le regard du vieillard, vibrer à l’enthousiasme d’une foule en fête… Cultiver le bon, pour goûter les instants d’amitié et de générosité qui ensoleillent une journée, s’arrêter aux riches moments de partages, apprécier la joie d’être là ensemble, unis par la même passion et heureux de se comprendre, parfois sans rien se dire…

Cultiver ne fait pas bon ménage avec “zapper” d’images en images. Le beau et le bien ont besoin de temps et de silence pour laisser une empreinte profonde. Comme pour un apprentissage, il est bon d’y revenir et d’y revenir souvent. C’est une éducation du regard et du cœur. Peu à peu, je deviens davantage sensible au beau et au bien et je suis capable de “positiver”. Prendre en compte d’abord le positif, l’exprimer dans nos paroles, l’écouter chez les autres, voilà des démarches indispensables pour vivre et bien vivre. Loin de ressasser ce qui va mal, loin de nous laisser encombrer par des pensées tristes et négatives, il est bon de s’ouvrir à ce qui chante et enchante. Cultiver et respirer un air sain, travailler à un climat agréable, en un mot “positiver.”

Dans les témoignages que plusieurs ont déjà envoyés, certains notent que le temps du confinement leur les a amené à mieux prendre en compte la richesse et la beauté des petites choses de la vie : « Cela m’a permis de me concentrer sur l’essentiel, la famille, la prière et retrouver une alimentation saine, sans être parasité par les sollicitations extérieures. Ce qui va changer, je pense, c’est de prendre plus de temps pour faire les choses, de s’octroyer des moments à soi, des moments de réflexion. »

En langage religieux, positiver se traduit par “bénir”, c’est-à-dire “dire le bien, exprimer le bon”. Voilà une attitude à vivre et à développer dans toutes nos relations. Raviver les instants de bonheur, leur donner toute leur force, en être renouvelés, pour que l’amour prenne le pas sur la grogne et le doute.

“Bénir“, dès les premières pages de la Bible, décrit l’attitude de Dieu vis à vis de l’homme et du monde : « Il les bénit et leur dit : “Portez du fruit, multipliez-vous, emplissez la terre et soumettez-la… » Gn 1,28. « Et Dieu vit que cela était bon, très bon ! » Gn 1,31. Dès le début le regard de Dieu “positive”. Quelle révolution, si d’emblée nous adoptions sa façon de voir, ne retenant des choses et des gens que ce qui est bon, pour nous en nourrir et le partager ! Bénir, comme une attitude de fond, pour accueillir la fidélité de Dieu et mettre en valeur le beau et le bien en tous ceux que nous rencontrons !

Alain Patin



 


Jour 3 du déconfinement

 

14 mai 2020 2020

C’est le déconfinement, la reprise du travail, mais tous ne sont pas en phase : chacun est encore enfermés dans ses soucis ! Chacun dans sa bulle : et cela m’a fait pensé à ce texte.

« La foule serrait Jésus de près pour écouter la parole de Dieu. Lui se tenait sur le bord du lac de Gennésaret et il vit deux bateaux là sur le bord du lac. Les pêcheurs à terre lavaient leurs filets. Il monta dans l’un des bateaux, celui qui était à Simon. Il lui demanda de s’éloigner un peu du rivage ; puis, assis, il enseignait les foules depuis le bateau.

Quand il eut fini de parler, il dit à Simon : "Avance vers l’eau profonde, et jetez vos filets pour la pêche.” Simon répondit : "Maître, nous avons peiné toute une nuit sans rien prendre, mais sur ta parole je vais jeter les filets." Ils y vont et ils prennent une si grande quantité de poissons que leurs filets se déchiraient. Alors ils font signe à leurs associés de venir les aider avec l’autre bateaux. Ils viennent et ils remplissent les deux bateaux, tellement qu’ils enfonçaient. A cette vue, Simon-Pierre tombe aux genoux de Jésus ; il dit : "Eloigne-toi de moi, Seigneur, car je suis un homme pécheur !" En effet, lui et tous ceux qui étaient avec lui, étaient bouleversés à cause des poissons qu’ils venaient de prendre ; c’était pareil pour Jacques et Jean, fils de Zébédée, les compagnons de Simon. Mais Jésus dit à Simon : " N’aie pas peur ! Désormais ce sont des hommes que tu prendras." Et ramenant les bateaux à terre, laissant tout, ils le suivirent.. » Lc 5, 1-11

En lisant ce texte, on a aussi l’impression d’un puzzle dont les éléments sont éparpillés ; différents personnages sont là, mais chacun est occupé par ses affaires. Au départ, la foule veut “serrer“ Jésus, le retenir pour en tirer le maximum d’avantages. Les pêcheurs, eux, ruminent leur échec : un nuit de pêche sans rien prendre ! Ils évaluent les conséquences économiques : pas de vente, pas de rentrée d’argent et tout ce qui s’en suit. Ca leur prend la tête ; ils ne voient rien d’autre, ni Jésus, ni la foule. Et puis, fatigués, ils n’ont qu’un souci : faire sécher leurs filets et aller dormir.

Jésus commence patiemment à tisser des liens ; il noue les fils qui vont les relier les uns aux autres. D’abord il s’éloigne de la foule, il prend de la distance et pour cela, il fait appel à Simon. Il veut créer avec les gens de la foule une autre relation que celle où ils cherchent à l’enfermer. Simon, sans le savoir, Simon va l’aider dans cette tâche.

Un peu plus tard, Jésus va s’intéresser au problème de Simon, à la pêche. Et c’est une telle surabondance que Simon ne sait plus où il en est ; celui-ci doit faire appel à d’autres compagnons qui, à leur tour, se trouvent embarqués dans l’aventure. Jésus leur déclare qu’il s’agit seulement d’un début : la pêche à laquelle il pense, sera bien autre chose. Elle va concerner toute la foule est là, rassemblée. Simon, Jacques et Jean ne sont plus simplement des pêcheurs sur le bord du lac ; ils deviennent des apôtres, chargés de faire monter cette foule dans le bateau du Royaume.

Désormais les éléments dispersés sont noués. La foule voulait mettre Jésus à son service ; Jésus, lui, appelle des hommes occupés à d’autres tâches à s’engager dans un projet qui les met tous en mouvement. A la fin du récit, tout est relié, tout est prêt pour une formidable aventure, une pêche surabondante d’hommes, et tant pis pour les poissons ! Nul ne se soucie de savoir s’ils restent à pourrir dans les bateaux ! Jésus, à partir d’éléments disparates, a constitué un peuple, où chacun a une place et une mission à remplir, irremplaçables.

Au début, tout est figé ; à la fin, un grand mouvement est lancé. Et quel est le ressort secret qui ouvre le processus ? C’est la réponse de Simon à la parole adressée par Jésus : « Sur ta parole, je vais jeter les filets. » Pour bouger, pas besoin d’être performant ! Simon semble tout à fait disqualifié au départ, aussi bien au plan humain (il a raté sa pêche), qu’au plan spirituel, (il se reconnaît homme de péché). Il n’est rentable ni pour le commerce de poissons, ni pour la mission. Et pourtant, parce qu’il accueille la parole de Jésus, il est transformé et il devient capable de le suivre.

Voilà l’histoire, une histoire que Luc compose avec soin et qu’il place au début de son évangile. D’où l’importance que prend cet épisode. Il est annonciateur de tout ce qui va ensuite se dérouler avec lui et entre eux : vie éparpillée, sans grande signification au départ ; aventure exaltante où tous ont un rôle important à tenir à l’arrivée.

Bien ! Mais comment me reconnaître, à qui m’identifier ? A la foule ou au petit groupe de pêcheurs ? Comme la foule, je voudrais bien “serrer“ Jésus, le mettre à mon service. J’attends de sa fréquentation, au moins quelques avantages. Mais, lui, semble s’éloigner, prendre le large ; il s’absente un peu et je risque d’en être étonné, décontenancé : mais alors que se passe-t-il ?

Comme Simon, j’ai aussi peiné et passé des jours et des nuits sans rien prendre ; je suis usé, fatigué ; j’aspire au sommeil, à l’oubli. Et dans sa parole, Jésus me dérange, m’arrache à mes petits projets : « Avance vers l’eau profonde et jetez vos filets pour la pêche. » Simon n’hésite pas trop, il s’engage sur cette parole. Et moi, je prends ou je laisse ?

Jésus me propose une place dans un réseau. Il crée l’“internet évangélique”. Il tisse avec chacun les liens qui le relient aux autres. Alors rejoindre Jésus, c’est entrer dans un jeu collectif, c’est participer au réseau, y recevoir mission : « Désormais, ce sont des hommes que tu prendras. ». Jésus débloque les situations apparemment figées. Il appelle ; il fait confiance et on sent bien que pour chacun aujourd’hui encore, ce peut être le début d’une aventure exaltante.

Prêt à bouger, à entrer dans le réseau, à te brancher au “net” évangélique ? Comme Simon, non pas à partir de nos capacités, mais en accueillant la parole que Dieu nous adresse : “j’ai besoin de toi pour mon peuple, j’ai besoin de ton bateau pour un autre genre de pêche ; ne crains pas, avance vers l’eau profonde !” Pour la vivre intensément, je sais que la pêche est abondante, que l’aventure est emballante, quand toute rencontre devient l’occasion de nouveaux liens, quand elle tisse la toile d’une vie nouvelle.

Alain Patin
alain.patin chez libertysurf.fr



 


Au bord du lac

 

11 mai 2020 2020

Texte proposé par Christian Christy

VOUS êtes mes amis, vous qui m’avez suivi ; Tranquilles, vous auriez pu rester en bord de mer, À pêcher pour survivre, du soir jusqu’à la nuit, Vous aimiez ce pays, vous en étiez même fiers.

Il est vrai que pour vous, la vie manquait de sel ; Après Jean, étiez prêts à bien des aventures, Pourvu qu’on vous montrât combien beau est le ciel. Car pêcher sans rien prendre n’est pas une sinécure.

Je passais sur le bord, vous m’avez écouté, Audacieux, vous avez relancé les filets. Et quelle fut votre joie, observant ma parole De ramener du fond plus qu’une parabole.

Ces poissons bigarrés, rassemblés sur la plage Représentaient les peuples appelés au salut, Vous pressentiez alors, qu’avec bien du courage, Accrochés à mes pas, vous iriez jusqu’au but.

Quelle mouche les a piqués, dirent les gens du coin ? Pourquoi suivre cet homme qui annonce le Règne De Dieu pour l’avenir ? De nous prendrait-il soin ? Il est de Nazareth ; de là, qu’il nous enseigne ?

Peut-il nous délivrer de la main des tyrans ? De l’oppresseur honni, qui nous pressure sans cesse, Nous impose sa loi, exploite nos faiblesses ? Nous ne souhaitons qu’une chose, c’est rentrer dans le rang.

Les disciples avertis, repoussèrent les questions Et s’engagèrent ensemble ; c’était André, Jacques, Jean, Aussi Philippe, Thomas, j’en oublie et Simon, Prêts à me suivre heureux, debout par tous les temps.

Avançons mes amis ; des foules nous attendent, Il faut marcher unis, répandre la nouvelle, Que le message pour tous, bonnement se répande : Pour les pauvres, les boiteux, la vie sera plus belle.

Au bord du lac


 


Jour 54 du confinement

 

10 mai 2020 2020

« Jésus dit encore : "A quoi vais-je comparer le Royaume de Dieu ? Lc 13, 20

Tout le monde s’attend à des images grandioses, un décor magnifique, somptueux !

Mais la réponse de Jésus est tout, sauf extraordinaire :

Le Royaume de Dieu est semblable à du levain qu’une femme a pris et enfoui dans trois mesures de farine, jusqu’à ce que le tout ait levé.” » Lc 13,21

Nous voici ramenés à la vie quotidienne, banale, ordinaire : une femme qui, comme chaque jour, pétrit la pâte pour cuire le pain de sa maisonnée.

Ainsi Jésus montre que le Royaume n’est pas une irruption extérieure, mais un ferment dans la profondeur de l’humanité. La seule chose certaine est que la pâte va lever et qu’il y en aura à profusion : en effet trois mesures de farine représentent une énorme quantité, de quoi nourrir plus de cent personnes !

Nous aussi, nous sommes invités à nous laisser pétrir par la force de la Parole et à comprendre que le monde tout entier est lui-même façonné, brassé, malaxé par l’Esprit de Dieu. Paul y voit les signes de l’enfantement d’un monde nouveau : « Nous le savons bien : maintenant encore la création tout entière crie dans les douleurs de l’enfantement. Elle n’est pas la seule : nous aussi, qui possédons en nous-mêmes les premiers dons de l’Esprit, nous crions intérieurement dans l’attente de notre adoption et du salut de notre corps. Car nous avons été sauvés, mais c’est en espérance seulement. » Rm 8, 22-24

Le “corona“ nous invite à découvrir que ce grand travail d’enfantement est une réalité de notre vie et de notre monde. Le trouble qu’il a introduit dans notre société, c’est une des manifestations de ce vaste renouvellement qui s’opère lentement et qui nous traverse, comme il brasse toutes choses. Quelque chose germe et soulève le monde à la manière d’un ferment : et c’est une Bonne Nouvelle !

C’est comme un écho de la parabole de Jésus : faisons de ce levain enfoui dans la pâte humaine le moteur d’une vraie rénovation, capable de soulever nos vies et d’en faire un pain nouveau. A travers ce trouble, une force de renouvellement nous est offerte, si nous nous laissons travailler par elle. Vivre ainsi, travaillés de l’intérieur, peut devenir la source d’un profond bonheur, car s’ouvrent devant nous des perspectives nouvelles. Parmi les témoignages déjà reçus de vous, certains soulignent que leur vie a changé dans le temps du confinement et qu’elle a pris de nouvelles couleurs.

Pour rendre compte de ce brassage comme le lieu d’un enfantement, la Bible distingue des périodes de qualité différente. Elle parle des “temps et des moments” : il y a des temps de bouillonnement, d’effervescence, temps de découvertes et de renouveau où tout paraît possible, puis des moments où la mécanique semble se gripper, stopper, quand ce n’est pas purement et simplement régresser.

Les choses, le monde, les hommes n’avancent pas d’un pas régulier et égal. C’est un constat qui est vérifiable aussi bien dans notre propre histoire, que pour l’histoire du peuple de Dieu. La Bible n’en fait pas seulement un constat, mais elle suggère qu’il y a là un rythme nécessaire. Nécessaire pour que les hommes marchent à leur pas, inventent leur chemin, et chaque génération à son tour. Nécessaire pour faire naître une démarche libre et responsable ; sinon nous serions livrés à la fatalité, enfermés dans la répétition infinie d’un modèle existant. Ce temps que nous vivons aujourd’hui et que nous avons du mal à déchiffrer, n’est-il pas une période d’enfouissement, un de ces multiples tâtonnements où se cherche l’avenir ?

Cela peut te permettre de mieux comprendre ta propre route comme celle des autres. Elle te rend plus solide pour les traversées du désert que comporte tout cheminement. Elle t’arme contre les tempêtes et les difficultés qui ne manquent pas de surgir. Elle t’inscrit dans un réalisme qui ne se laisse pas démonter par les hauts et les bas. Si tu fais tienne cette perspective, elle imprégnera ta vie de stabilité, de sérénité et finalement d’une indéracinable espérance.

Tu découvres - et c’est une grande découverte - que la fragilité n’est pas seulement un handicap, mais aussi une condition de transformation ; c’est la possibilité offerte de rester malléable. Si tu t’es forgé une carapace, si tu t’es durci, arrimé à des principes, tu risques fort de ne plus savoir accueillir l’imprévu et de passer à côté des appels que Dieu t’adresse. Celui qui reste ouvert est sans doute fragile, et ce n’est pas confortable, mais il peut aller de renouvellement en renouvellement. Vivant dans la confiance, il sait qu’en l’appelant, Dieu l’arrache sans cesse à sa faiblesse.

Accepter la fragilité, c’est risquer une parole personnelle au lieu de répéter des lieux communs, c’est s’aventurer en terrain inconnu pour rencontrer celui qui est différent ou hostile. C’est aussi ouvrir sa maison pour accueillir l’étranger ou le pauvre, c’est s’investir pour servir des causes de justice et de libération. C’est finalement garder un espace libre pour l’imprévu et rester en éveil. La fragilité évite de s’installer. Elle pousse à la recherche d’un nouvel équilibre. Elle réclame ton initiative. Elle nourrit ta prière.

La fragilité peut parfois conduire à se tromper, parce qu’elle amène à se risquer sur des chantiers difficiles, mais elle est essentielle pour vivre l’enfantement continuel que Dieu nous propose dans son appel. Te savoir ainsi, avec le monde tout entier, en travail d’enfantement, t’offre la possibilité de déchiffrer ce qui t’arrive, de savoir gérer les temps de développement et d’enthousiasme, sans être déboussolé par les moments de grisaille et de trouble. Les uns et les autres rythment ton existence en travail de vie nouvelle. Force et faiblesse, victoires et reculs expriment cette formidable poussée, où Dieu te féconde, t’accompagne fidèlement et travaille tout être, “jusqu’à ce que le tout ait levé.”

Alain Patin
alain.patin chez libertysurf.fr



 


J’ai fait un rêve

 

8 mai 2020 2020

texte proposé par Irénée GRANGE

Alors que les catéchumènes attendent encore l’eau du Baptême et que nous sommes en manque de Nourriture Eucharistique, notre souffrance nous aide à mieux comprendre celles et ceux qui en sont privés.
Comme la santé, la liberté, ces dons précieux, trésors que nous apprécions à leur juste valeur que lorsqu’on les a perdus ou qu’on ne
puisse y prétendre.
Nous étions arrivés, fatigués, assoiffés, au puits de Jacob.
Et voici qu’arrivaient, en nombre, les samaritaines et les samaritain d’aujourd’hui (divorcés remariés et autres marginaux) confinés à vie, cantonnés à la table du désir permanent.
Après nous avoir donné à boire, comme nous leur avions demandé, ces assoiffés de Baptême, de Réconciliation, de Communion, étaient abreuvés du Don de Dieu. Désaltérés, ils étaient devenus, eux-mêmes, source jaillissante d’Amour, d’Espérance et de Foi.
Ensemble nous sommes repartis, réconfortés, vivre cet élan de solidarité, de générosité, de fraternité.
Les soignants, les livreurs, les routiers, les agriculteurs, les caissières, les pompiers, les éboueurs étaient acclamés, bénis, applaudis, chantés. Notre regard, notre comportement, notre vie étaient transfigurés.
Nous étions peu à peu, déconfinés de nos égoïsmes et de nos individualismes, de nos angoisses et de nos peurs.
Et eux criaient leur joie à ceux qui voulaient entendre et ils disaient :
« Venez voir cette Eglise qu’on dit Corps du Christ, venez voir ces gens qu’on dit chrétiens et qui essaient de l’être. Ils connaissent tout de notre vie sans nous juger ; sans nous rejeter… Ne seraient-ils pas le cœur du Messie ?

Était-ce un rêve ? Et si c’était vrai …



 


Complainte de l‘agenda fermé !

 

7 mai 2020 2020

Texte proposé par Christian Christy, aumônier ACO

Chaque jour j’étais heureux, je voyais la lumière J’entendais les conversations, les changements d’horaires, Des rencontres prévues ou bien vite reportées Les ordres du jour, qu’on ne finit jamais : J’étais bien, je servais, utilité j’avais. Que m’est-il arrivé ? Je suis dépossédé.

Aujourd’hui, je suis triste, on m’a mis au rancard, Tout juste si je ne finis pas confiné, au placard. À cause de qui, de quoi, me direz-vous ? Puis-je vraiment ne le dire qu’à vous ?

Je vais crier au monde la présence de l’intrus, Ce satané virus, vraiment bien mal venu ; Ce sournois minuscule, insidieux, ridicule, Capable de mettre à terre, les forts et leurs émules.

Méfiez-vous les amis, il se cache, il vous nuit. Demain peut-être hélas, il prendra votre vie. De bonnes mesures-barrière, faites votre défense, Que nous ayons la joie d’être en votre présence.

Bientôt, vrai, quand j’y pense, pour ma réouverture Nous aurons le feu vert de la sous-préfecture ; Et mes pages jaunies reprendront leur envol Et de joie nous pourrons chanter la carmagnole.

Je reverrai alors, assidus sur leurs chaises Tous les copains ouvrir leur agenda à l’aise. Des projets pleins la tête, ils referont le monde, Bousculant les défis, sans esbroufe ni faconde.

Je peux encore servir, même usé, écorné, J’ai quelques dates encore, que je peux honorer. Et je serai heureux de passer le flambeau À l’agenda prochain, que l’avenir soit beau !
1er mai 2020

Complainte de l’agenda fermé


 


Jour 51 du confinement

 

7 mai 2020 2020

Le Corona nous offre une sorte de parabole : extérieur ou intérieur, le monde ne peut rester un espace neutre ou inoccupé ; il a horreur du vide. L’enjeu est alors celui-ci : si tu laisses faire, il sera habité par n’importe quoi. Ton monde intérieur n’est pas un petit enclos protégé. Tu ne peux te désintéresser du monde extérieur, parce qu’il frappe sans cesse à ta porte. Si tu crois pouvoir te confiner, sans te soucier de l’ensemble, tu travailles en pure perte. Tôt ou tard, tu seras envahi par des forces que tu as laissé s’emparer du terrain alentour.
Les gestes “barrière“ sont certes nécessaires, si l’on ne veut pas accueillir ou communiquer n’importe quel Corona ! De même Jésus nous prévient : il affirme que nous ne sommes pas le jouet de forces aveugles, mais il nous averti également que, si nous ne faisons des choix, nous n’empêcherons pas l’invasion de notre espace. Il est nécessaire de se battre pour être maître du terrain.
« Lorsque l’esprit impur est sorti de l’homme, il erre par des lieux arides cherchant le repos. N’en trouvant pas, il dit : “Je vais retourner dans cette maison d’où je suis sorti.” Au retour, il la trouve balayée, bien en ordre. Alors il s’en va prendre avec lui sept autres esprits plus mauvais que lui ; ils entrent et y habitent. Et l’état final de cet homme devient pire que le premier. » Lc 11, 24-26.
Nous voilà alors invités à la responsabilité. Nous-mêmes et notre monde, nous dépendons des choix que nous faisons ou non. Ni la paix, ni la guerre ne sont fatales ; elles viennent des choix politiques que font ceux qui dirigent les nations. Par contre, quand des forces destructrices ont pris le dessus, elles développent une telle puissance que rien ne semble pouvoir les arrêter. On a vu et on voit la violence et la barbarie se déchaîner et des gens ordinaires se livrer aux pires horreurs. Qui peut se dire à l’abri de tels excès, quand les passions s’exaspèrent. Il faut alors bien du sang, bien des larmes et beaucoup de temps pour sortir de cet engrenage infernal.

C’est au tout début qu’il faut stopper le mécanisme, quand il est encore sans forces et inventer des gestes “barrière“. Cela donne raison à tous ceux qui luttent contre toute forme de racisme, d’exclusion ou de violence, même la plus minime. Admettre un tant soit peu d’abriter de tels sentiments, leur donner un soupçon de légitimité, c’est introduire un virus dont on n’arrivera plus à se débarrasser et qui, de proche en proche, risque de contaminer toute la société. Des exemples concrets sont là, sous nos yeux.

Ce qui est vrai du monde extérieur, est vrai aussi pour chacun. Vivre et vivre libre, ce n’est jamais laisser le champ ouvert à n’importe quoi. C’est accueillir dans son espace intérieur ce qui construit, ce qui édifie. Certes, à certains jours, devant la violence gratuite et imbécile, tu peux être tenté d’abriter la peur, le repli ou la soif de vengeance ; laisser ces bêtes fauves t’habiter, c’est introduire en toi un poison sournois et violent qui risque un jour de tout submerger. Il faut les rejeter et chercher ailleurs des raisons de vivre autrement. Il n’y a pas de maison bien rangée qui soit à l’abri de l’irruption des « sept esprits plus mauvais » qu’évoque l’évangile !
Certes, le chiffre sept est symbolique, mais il peut servir à faire attention aux portes d’entrée où se presse ce qui cherche à envahir notre espace ! Pour vivre et se développer, ils ont besoin de quelqu’un pour les héberger, comme le Corona.

Sept portes d’entrée, sept points de communication. J’y vois nos cinq sens, auxquels j’ajouterai l’esprit et le coeur. Veiller à ce qui pénètre par ces voies de passage et aussi contrôler ce qui en sort est indispensable pour garder la maîtrise de ce qui nous habite. Avoir les yeux ouverts, mais ne pas accepter toutes les images : certaines polluent, trop violentes ou trop marchandes. Développer une oreille attentive, mais sans s’arrêter à ce qui humilie ou rejette. Avoir un goût et un odorat en éveil, développer une véritable sensibilité, sans verser dans la mièvrerie. (Tu comprends pourquoi le Corona supprime goût et odorat !) Vouloir approcher, toucher, entrer en contact, mais sans imposer sa présence et peser sur les autres, en gardant une distance. Finalement, une volonté de gérer au mieux cette merveille qu’est notre corps comme outil de communication.

Autre porte, celle de notre esprit, de notre intelligence. Là s’ouvrent des possibilités immenses : acquérir des connaissances, mener une réflexion, s’ouvrir à la discussion, échafauder des projets,… Le danger est que se glisse, avec les connaissances acquises, la suffisance qui isole et qui rend hautain. On peut prendre la grosse tête, on enfle ! Occupé par toutes ces richesses culturelles, on risque alors l’étouffement, au lieu de rester ouverts et en éveil.

Septième porte, celle du coeur. C’est sûrement la plus importante, celle qui révèle en nous l’image de Dieu. Elle nous permet d’accueillir les autres, de leur manifester tendresse et amitié, d’élaborer un monde de partages et d’échanges ; elle met en jeu le plus profond en nous. Gérer cette ouverture sur les autres, c’est pas seulement se laisser attendrir sur un coup de coeur, mais durer dans la fidélité pour construire un monde qui communique la vie. Le risque serait de rester à rêver d’un monde merveilleux, sans l’inscrire concrètement dans des engagements réels et durables.

Il ne suffit pas que ta maison soit propre et bien rangée ; regarde ce qui l’habite. Quels sentiments, quelles recherches, quels soucis, quelles préoccupations, quelles affections ? Qu’est-ce qui prend de la place en toi ? Qu’est-ce qui t’occupe ? Et au delà de ta maison, dans ton environnement, quelles sont les paroles et les projets échangés, qu’est-ce que tu mets en œuvre ? C’est à toi de choisir les occupants de ta maison, d’héberger ce qui donne vie et joie : c’est à toi de contrôler l’air que tu respires.

Alain Patin
alain.patin chez libertysurf.fr



 


Les leçons du masque

 

5 mai 2020 2020

Texte écrit par Bernard ROBERT
Masqué avec du tissu africain, et grâce à des « petites mains locales »

LES LECONS DU MASQUE
Le masque…. Un vêtement qui ne faisait sûrement pas partie de notre garde-robe !
Un objet que l’on associait aux Asiatiques apeurés par nos microbes !
Un accessoire qui ressortait régulièrement dans les lieux et les moments de grande pollution !
ET VOILA ……QU’EN QUELQUES SEMAINES, LE MASQUE DEVIENT UNE DENREE RECHERCHEE !

Les masques : Tous les pays en veulent des dizaines de millions pour le personnel soignant !
On se dit que durant la pandémie, tout citoyen responsable devrait en porter un !
Certains pays se permettent même de détourner des livraisons, commandées par d’autres, en les payant quatre fois plus cher, au moment de l’embarquement !

ET SI LES MASQUES NOUS DONNAIENT QUELQUES LECONS DE VIE !?

1- Le port de ce tissu sur notre visage a d’abord pour but de PRENDRE CONSCIENCE DE NOTRE RELATION AUX AUTRES ! … de ne pas les contaminer…. Et de ne pas être contaminé à notre tour !
Et si ce masque nous aidait à mieux prendre conscience de nos liens avec les autres et de notre responsabilité dans la marche de la société, dans le respect de la planète, dans l’équilibre économique mondial ou local…. : « leçon sur le respect »

2- Ce tissu nous cache le nez et la bouche et est retenu par nos deux oreilles, qui elles, sont toujours ouvertes ! …peut-être une invitation à se taire un peu…. A moins « fourrer son nez où il ne faut pas ! » et à ECOUTER un peu plus ce qui fait les joies et les peines des autres, et du monde !
Casque ou Masque…deux mots (en français) qui se ressemblent… Une seule lettre change…mais elle change tout ! Deux utilisations tellement différentes ! : « leçon sur l’écoute »

3- Ce tissu a un coût : LE PRIX DE LA SANTE ! Dans un pays comme le Togo, le prix d’un masque (en pharmacie à Lomé) est de 1 000 Fcfa, soit 1,5 euro !....Quand on sait que le smic est à 53 euros, cela revient à nous poser la question à nous Français : « accepterions-nous de payer 1 000 euros pour acheter 35 masques ? » Mesurons-nous le prix de notre santé, et notre responsabilité par une vie équilibrée, raisonnée au niveau local et mondial ? : « leçon sur le prix de la vie »

4- Le port du masque permet une attitude nouvelle : nous sommes plus ATTENTIFS AU REGARD de celle ou celui qui le porte. Un appel à savoir mieux lire ce qu’exprime chaque regard, comme joie ou peine, comme projet ou échec …. : « leçon sur le regard »

5- Devant la pénurie avérée, des entreprises ont changé leurs productions…et surtout des individus se sont mis à CREER eux-mêmes cette denrée précieuse ! Des milliers de masques, de toutes les couleurs, avec toutes sortes de tissus décorent maintenant nos visages…ils ne viennent pas de Chine ! Ils sont « made in Vendée, made in France »… Ils sont la preuve que nous sommes capables prendre en main notre destin, que nous pouvons créer des jouets, des loisirs, des produits alimentaires…etc, sans oublier les autres ! : « leçon sur la créativité »

Ecrit par Bernard ROBERT
Masqué avec du tissu africain
Et grâce à des « petites mains locales »



 


Ode à la classe ouvrière

 

4 mai 2020 2020

Texte proposé par Christian pour le 1er mai

Ils sont venus du fond des âges.
Ils n’ont jamais perdu courage.
On les a longtemps baladés ;
Ils ne se sont jamais démontés.

Obstinément, ils progressaient
Fiers et heureux de leur passé
Bâti sur la fraternité.
Parfois pourtant ils ont sombré
Pour encore mieux se relever, Avancer, toujours avancer.

Pensons à eux qui ont construit
Ce qu’ils avaient toujours promis
Espaces de paix et de bonté,
Pôles d’amitié et de respect.

Qui nous dira les ans passés
À lutter pour les opprimés ;
Desmoulins, Jean Jaurès, Jules Guesde,
Leur premier mot, toujours, entraide !

De résistance en résistance,
Ils ont produit pour nous la France.
Nous puisons dans leurs convictions
De quoi ensemble bâtir nation.

On nous dit : obsolètes les classes,
Pourtant voyez comment on passe
De l’exploitation à l’union,
Si nous savons d’où nous venons.

N’oublions pas les invisibles,
Les anonymes, irréductibles,
Ils sont le cœur et la raison
Ils sont demain notre horizon.

Bâtir des ponts, construire des ports
C’est un appel toujours plus fort ;
N’ayons pas peur et militons
Demain nous serons des millions.

Christian dans l’esprit du 1er mai - fête des Travailleurs

Ode à la classe ouvrière


 


Jour 47 du confinement

 

3 mai 2020 2020

L’évangile de dimanche nous parle du berger, attentif à chacune de ses brebis ; cette image est liée à celle du Père dont Jésus témoigne.
« Les publicains et les pécheurs s’approchaient tous de Jésus pour l’écouter, ce qui faisait rouspéter pharisiens et scribes ; ils disaient : “cet homme accueille les pécheurs et il mange avec eux ! ” »

Autrement dit, pourquoi agis-tu ainsi ? Et Jésus doit s’expliquer et pour cela, il propose trois paraboles : celle du berger à la recherche d’une brebis, celle de la femme à la recherche d’une pièce, et puis « Jésus dit encore : Un homme avait deux fils… » (voir la suite en Lc 15, 11-32) En clair, Jésus déclare : je fréquente pécheurs et publicains (les derniers des derniers), pour manifester de quel amour Dieu mon Père entoure tous les hommes, quels qu’ils soient.”

A l’écoute de l’histoire des deux fils, la première réaction qui vient, c’est que manifestement ça va trop loin. On est d’accord avec le fils aîné : le père, cette fois-ci, dépasse les bornes ; on dirait qu’il récompense le fils ingrat et infidèle, tandis qu’il en oublie presque le fils dévoué et persévérant ! Ce n’est pas possible : comment comprendre son attitude ? Ce qui est en cause ici, c’est bien l’attitude du fils aîné : il n’accepte pas que son père soit aussi le père de son frère. Avec mépris, il dit en parlant de lui : “quand ton fils que voici revient ”… Il n’admet pas que son père puisse manifester ainsi son amour, comme il l’entend. Il est à l’image des pharisiens et des scribes qui voudraient que Jésus ne s’intéresse pas aux publicains et aux pécheurs, qu’il ne les fréquente pas, qu’il les laisse à leur triste sort.
Mais Dieu peut-il être le Dieu de quelques-uns et non le Dieu de tous ? Peut-on affirmer qu’il est père, sans qu’il soit le père de tous ? Avec cette conséquence que nul ne peut dire “père” ou “notre père”, sans recevoir l’autre, celui qui est différent, opposé ou même adversaire, comme un frère ? Ailleurs Jésus exprime jusqu’où cela peut aller : “Aimez vos ennemis… ainsi vous serez les fils de votre Père, car lui, il fait lever son soleil sur les bons et sur les méchants et tomber la pluie sur les justes et les injustes.” Mt 5,44-45

A notre tour, la question nous atteint : quelle est ta relation à Dieu et par là même quelle est ta relation aux autres, à tous les autres, en particulier à ceux que tu es tenté d’exclure et de rejeter ? Sais-tu, au-delà de tes préjugés, y voir des frères et les accueillir comme tels ? Déjà, dans notre vie quotidienne, avec ce qu’elle recèle de conflits latents ou déclarés, en famille, dans le voisinage, dans nos milieux de travail, nous sommes vivement interrogés : nous avons peut-être envie de “rouspéter”, comme dans l’évangile.

Arrivé là, un choix m’est proposé : ou j’accepte l’évangile et j’entre dans une autre optique, celle de l’amour gratuit où tout calcul est périmé, ou bien j’en reste à une juste rétribution des efforts, donnant-donnant. Ne pas trancher, c’est se condamner à être éternellement insatisfait, parce que Dieu nous paraîtra toujours hors normes, trop généreux envers les crapules et pas assez bienveillant envers ses fidèles. Mais si j’adopte sans arrière-pensées la perspective de l’évangile, alors je connaîtrai la joie d’aimer comme je suis aimé, c’est-à-dire follement.

Tout prend alors un autre sens et ce qui paraissait fou, trop hasardeux, devient la seule conduite possible. Les paroles les plus risquées, « Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent, prêtez sans rien attendre en retour,… » Lc 6,27,34, égrènent la litanie de l’amour gratuit, celui qui n’attend pas de réciprocité pour s’offrir et se donner.

Ce langage de l’amour gratuit s’est exprimé totalement dans la croix du Christ. Face à ceux qui le rejetaient violemment, Jésus a continué à vivre dans la gratuité de l’amour : « Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font. » Lc 23,34. C’est une logique nouvelle, une “sagesse” nouvelle, comme dira l’Apôtre Paul, qui aux yeux des hommes passera pour une folie : « C’est par la folie du message qu’il a plu à Dieu de sauver les croyants… Nous prêchons, nous, un Christ crucifié, scandale pour les Juifs et folie pour les Païens, mais pour ceux qui sont appelés, Juifs comme Païens, c’est le Christ, puissance de Dieu et sagesse de Dieu. Car ce qui est folie de Dieu est plus sage que les hommes et ce qui est faiblesse de Dieu est plus fort que les hommes. » 1 Co 1,21-25.

A cette lumière, j’accueille tout homme comme mon frère, non parce qu’il serait aimable ou parce qu’il aurait mérité quelque peu mon amour. Je le reçois gratuitement, puisque moi-même je sais que je suis aimé ainsi et que c’est la seule façon véritable d’aimer. Le recevoir comme un frère, ce n’est pas manifester un vague sentiment ; ça suppose une relation de chair et de sang : c’est dire sa vie, c’est ma vie ; ses soucis, ce sont mes soucis ; sa dignité, c’est ma dignité. Le frère aîné refuse cette solidarité ; moi, je peux la choisir pour être en vérité l’enfant de mon Père.

Le Père nous invite à aimer dans la gratuité et sans limites ; peut-être avons-nous envie, nous aussi, de “rouspéter ”, de dire “trop, c’est trop”. Réaction légitime, on la retrouve dans l’évangile ! Mais nous sommes invités à ne pas en rester là, à ne pas nous crisper, à rester en éveil, en accueil. Si aujourd’hui nous avons du mal à recevoir l’interpellation de l’évangile, restons ouverts. Demain, peut-être fera-t-elle son chemin en nos cœurs.
Aujourd’hui, moi, j’ai envie de dire : je prends le risque, parce que c’est trop ! Parce que cette façon d’aimer me dépasse de toutes parts, parce qu’elle fait éclater mes calculs mesquins, parce qu’elle m’ouvre des horizons insoupçonnés. Oui, je suis d’accord pour vivre ainsi, d’accord parce que c’est trop ! Je sens que, par ce chemin-là, Dieu veut me mener loin et me faire connaître quelque chose de son cœur. Tant pis, ou plutôt tant mieux, si cela me brûle un peu : l’enjeu en vaut la peine.

Alain Patin
alain.patin chez libertysurf.fr



 


jour 44 du confinement

 

30 avril 2020 2020

Plusieurs appels reçus, suite à des difficultés de relations qui s’enveniment, m’invitent à parler du pardon :
« Si ton frère vient à pécher, reprends-le et s’il regrette, pardonne-lui. Et si, sept fois par jour, il pèche contre toi et que sept fois il revienne vers toi, en disant : “Je regrette,” pardonne-lui. » Lc 17, 3-4.

Inutile de tenir des comptes ; sept fois par jour, ça veut dire toujours. Pardonner toujours et tout pardonner, même ce qui paraît le plus impardonnable. La première réaction, instinctive, c’est de dire : je ne peux pas ! Bien sûr, je veux bien pardonner toutes les petites babioles qui agressent mes journées, si ce n’est pas trop grave et si cela ne prête pas trop à conséquence ; j’ai quand même un vieux fond de bonté ! Mais pardonner toujours à celui ou à celle qui recommence sans cesse, à celui qui est pris dans le cycle terrible de la boisson ou de la drogue, ça n’est pas raisonnable et certainement pas bon. Et comment pardonner la trahison dans l’amitié, l’infidélité dans le couple, l’abandon des siens ? Comment pardonner l’inconscience, l’indifférence de ceux qui refusent de voir ? Comment pardonner le pire : le viol, l’inceste, les crimes contre l’humanité, la violence sauvage et gratuite ?

Pourtant l’enjeu est bien celui-ci : il t’est proposé de choisir délibérément de tout pardonner et de toujours pardonner, d’emblée, sans conditions, par avance, comme une décision première que tu ne remettras pas en cause. Seule cette prise de position peut permettre de vivre libre et de renouer avec tous par delà l’intolérable.
A cela, trois raisons qui s’appellent l’une l’autre :
La première est presque intéressée ! Le refus de pardonner, avec son cortège de rancune et de haine, est comme un poison au dedans de toi. Il entretient une aigreur, une amertume qui gâche la vie. C’est comme un piège qui se referme sur toi. Alors tu secrètes un fiel qui t’arrache à la paix et à la sérénité ; tu t’aigris, incapable d’étonnement et d’émerveillement. Finalement refuser de pardonner, c’est d’abord se faire du mal à soi, en voulant en faire à l’autre ! Alors pour être libéré de ce poids à traîner, pour vivre à nouveau libre, le pardon est essentiel. En effet, le pardon est fruit de la liberté ; il ne peut être donné que par un être libre. Se venger, c’est une démarche d’imitation. Quand je me venge, c’est l’autre qui est mon maître ; je ne fais qu’imiter ce qu’il a fait. Il m’a fait mal ; il m’a trahi ; il m’a agressé ; il a trompé ma confiance. Je vais à mon tour lui rendre ce mal ; je vais l’agresser, le blesser et je croirai alors que nous sommes quitte. Mais finalement c’est l’autre qui m’a dicté ma conduite ; je me suis laissé entraîné par lui sur un chemin qui n’est pas le mien. Je suis devenu dépendant de lui. Tu es libre, au contraire, si tu choisis un comportement différent, non pas en réplique à l’autre, mais en suivant tes propres convictions, un comportement qui dise : “Je sais que tu n’es pas seulement cet être méchant et agressif que tu as été un moment ; tu es mon frère et je te tends la main pour l’affirmer.”

Une deuxième raison concerne le vivre-ensemble. Seul le pardon arrache à un cycle infernal qui n’a pas d’avenir : nous le voyons bien dans les conflits tragiques qui opposent les peuples. Comment s’arracher à la violence sans pardon, comment reconstruire sans briser le cycle incessant de la vengeance ? Seul le pardon, même s’il est difficile, presqu’impossible parfois, a de l’avenir. Il faudra bien un jour se remettre à vivre ensemble, renouer des liens par delà l’intolérable. Alors pourquoi ne pas commencer maintenant alors que le mal n’a pas encore tout contaminé de son venin ? Tous les conflits que les médias étalent devant nos yeux, souvent avec complaisance, montrent jusqu’à quelle barbarie l’homme peut rapidement régresser. Devant des êtres mutilés dans leur corps à coups de machettes ou pour avoir sauté sur des mines anti-personnelles, devant des vies d’enfants saccagées, comment reconstruire, sans pardon ? Pardonner n’est pas faire semblant que rien ne s’est passé, qu’il s’agissait d’un simple cauchemar, mais c’est affirmer que, malgré les actes qu’il faut condamner, il est possible et nécessaire de réapprendre à vivre ensemble.

La dernière raison est spirituelle : le pardon est l’acte qui fait le plus ressembler à Dieu. Ainsi, comme dit Jésus, « Vous serez les fils du Très-Haut, car il est bon, lui, pour les sans-coeur et les méchants ! » Lc 6,35. Si nous voulons entrer en communion avec Lui, c’est là, au plus profond, qu’il nous faut le rejoindre. Jésus s’est présenté comme le pardon de Dieu, accordé à tous d’emblée. Ne tenant plus compte du passé, il a fait de sa rencontre le point de départ possible d’une aventure toute nouvelle. A tous, il a manifesté qu’ils pouvaient renaître, repartir à zéro. C’est l’essentiel de la Bonne Nouvelle : le temps nouveau qu’ouvre Jésus, c’est le temps du pardon, où tout peut être recréé, renouvelé, et donner du fruit à cent pour un. Pourquoi cette proposition faite à tous d’un nouveau départ ? Parce que Dieu aime gratuitement ; son amour n’est pas accordé à ceux qui l’auraient un tant soit peu mérité ; il est donné à tous sans conditions. Dieu aime sans raison, parce qu’il est Amour. Pour lui exister, c’est aimer ! C’est manifester un amour qui cherche à se répandre et à se communiquer. Cette proposition n’est pas passagère ; elle se renouvelle sans cesse, “sept fois par jour“, pour reprendre le langage de l’évangile ; elle est permanente, parce qu’elle dit au plus intime ce qu’est Dieu. Il est amour, pardon, tendresse. Il ne pourrait pas présenter d’autre visage sans se renier. Celui qui a ressenti en lui la force que donne ce pardon reçu de Dieu, celui qui a éprouvé en lui-même le renouvellement formidable qu’il imprime à la vie, balaye une fois pour toutes les calculs mesquins du donnant-donnant. Il ne mesure plus son pardon ; il le donne largement, comme il l’a reçu de son Père.
Mais pour pouvoir vivre cela, il faut puiser profond, à la racine, en Celui qui s’est donné comme le pardon de Dieu. Il faut demander à Jésus de nous guider sur ce chemin, un chemin qui peut être long, car certaines blessures ont du mal à cicatriser. Mais si tu as un jour pardonné ainsi, librement, sans calculs, pour l’avenir à construire, tu sais quelle bouffée de bonheur t’a alors habité et pour longtemps ! Heureusement, nous ne sommes pas tous, ni toujours, affrontés à des situations tragiques, où le pardon semble presque impossible ; raison de plus pour pardonner avec simplicité ce qui nous atteint quotidiennement et pour renouer les fils distendus ou rompus, chaque fois que nous le pouvons. Comme notre vie serait plus libérée, plus exaltante, si nous savions la délester au jour le jour du poids du ressentiment, de l’amertume et de tout ce qui, inutilement, la rend lourde et pesante !
Et chantons : "Si la faiblesse t’a fait tomber au bord du chemin, (bis)
Tu sauras ouvrir tes bras. Alors, tu pourras danser au rythme du pardon.“

Alain Patin
alain.patin chez libertysurf.fr



 


Le confinement se poursuit

 

28 avril 2020 2020

Le confinement se poursuit
Et je m’ennuie
Pas de mes cours
Vive internet, et la poursuite de mon parcours
Je m’ennuie
De voir mes amis(ies)
De les rencontrer, discuter, partager
Je rêve d’une maison
Avec jardin et cabanon
Pour m’évader
M’isoler
Car en appart
Tu attends juste que le virus parte
Les familles confinées dans de petits espaces
Quoi que tu fasses tu te retrouves toujours en face
Les tensions, la moindre réflexion
Fait tripler voire quadrupler
Tes réactions
La patience tu la perds et des parents sont démissionnaires
Et laissent leurs enfants divaguer dans le quartier.
En appart ta patience
Elle s’efface
Les enfants du dessus qui jouent aux billes font du roller
Qui crient qui pleurent
Tu ne dis rien, c’est certain
Ils ont besoin de se défouler, de se dépenser
En appart
Tu dois supporter ton voisin, qui seul pète un câble
Sa bouteille d’alcool c’est l’eau potable
La dépendance fait plus de ravage
Elle est accentuée avec sa rage
En appart
Tu entends les allées venues dans la cage d’escalier
A la nuit tombée ils se retrouvent pour s’enivrer
S’en suit musique et bagarres souvent très tard enfin très tôt
Bientôt il va faire jour, eux vont dormir à coup sûr
En appart
C’est quand même la galère
Mais que veux-tu faire
Rien juste attendre
Et comprendre
La situation
En te posant mille questions
Et te répéter
Sans cesse et sans stresse
Allez, ça ira mieux demain
Emmanuelle

1er avril 2020



 


Jour 40 du confinement

 

25 avril 2020 2020

Dimanche, l’Eglise nous offre de lire à nouveau Emmaüs !...

« Et voici que ce jour-là, deux d’entre eux, se rendaient à un village nommé Emmaüs… » Lc 24,13.
J’avais choisi ce texte pour Pâques (J 26), mais il est tellement riche qu’on peut le regarder à nouveau.
A première lecture, le récit semble mettre en jeu 3 personnes, les deux disciples et Jésus. Or, un regard plus précis évoque bien d’autres acteurs passés ou actuels : dans l’ordre d’arrivée, tout le peuple, nos grands prêtres, nos chefs, Israël, quelques femmes d’entre nous, des anges, les prophètes, Moïse et tous les prophètes, les Onze, Simon. Cette énumération évoque la grande histoire passionnée et tourmentée de l’Alliance de Dieu et de son peuple dans son déroulement, une belle histoire d’amour !

Autre remarque, les noms donnés à Jésus : dans l’ordre "Jésus lui-même" ; "Jésus de Nazareth, un prophète" ; "le Christ (souffrant)" ; "le Seigneur". Comment en cheminant avec Jésus faire aujourd’hui la même découverte, passer de l’homme Jésus au Seigneur Dieu ?
Ce texte veut nous dire que, pour découvrir la présence du Ressuscité, un chemin est à parcourir :

Trois clés nous sont offertes pour emprunter ce chemin :

* L’Ecriture, avec l’histoire de l’Alliance, pour se souvenir de la manière de faire de Dieu, de sa fidélité.

* L’Eucharistie, mémoire d’une présence-absence de Jésus ; là, mais invisible ; présent, mais insaisissable.

* Le partage en Eglise, entre frères et au delà, pour témoigner de l’Espérance qui nous anime. C’est important qu’ils soient deux, pour qu’il y ait échange, dialogue, car c’est le vrai chemin de la découverte.
Nous voici invités à passer d’un Jésus mort au Seigneur vivant.

Il faut du temps - un long chemin - pour comprendre que Jésus de Nazareth est bien mort ; cette aventure-là est finie. Il n’est plus là ce compagnon qui expliquait si bien les Écritures sur les routes de Galilée ; il faut quitter ce rêve, pour reconnaître le Christ, là où il est présent aujourd’hui, parmi nous.

Il faut du temps - un long chemin - pour accueillir le Crucifié-ressuscité, pour lui dire "reste avec nous". Il faut quitter l’image d’un Jésus idéal (prophète puissant) ; il faut passer au Christ souffrant, passage nécessaire pour que les disciples se lèvent et reprennent l’initiative.

Alors Jésus devient non pas un rêve, mais une question dans leur vie : "Ne fallait-il pas… ?“ Sa présence n’est pas dans le passé ; elle ouvre leurs yeux et leur cœur, elle les ouvre à l’initiative.

Alors le texte vient éclairer trois situations :
* D’abord, celle des disciples :
Ici est évoquée rapidement toute l’aventure de Jésus avec ses disciples. Ces hommes ont rencontré Jésus ; ils ont vu en lui "un prophète, puissant en actes et en paroles". En lui, ils ont mis leurs espoirs ; il allait rétablir le Royaume, libérer le peuple. (C’est la première partie des Evangiles). Mais Jésus comprenait autrement sa mission : à l’aide des Ecritures, il leur expliquait qu’il lui fallait passer par la mort pour apporter aux hommes une libération bien plus radicale (C’est le sens de la montée à Jérusalem). Quand ils découvrent vraiment qui il est, il est devenu invisible. Sa présence est devenue différente, mais quelque chose de brûlant a passé en eux ; eux aussi sont devenus différents. « Notre cœur n’était-il pas brûlant en nous, quand il nous parlait en chemin ? » Cela change tellement leur vie qu’ils partent jusqu’aux extrémités du monde proclamer la Bonne Nouvelle.
* Puis, celle de tout le peuple de Dieu :

Les nombreux personnages évoqués dans ce récit nous invitent à y voir un résumé de l’histoire de l’Alliance. Cette histoire n’est-elle pas une longue marche qui porte en elle bien des espoirs et bien des déceptions. Devant tant d’échecs, comment ne pas avoir "l’aspect éteint" ? Avec Jésus, Dieu se mêle à cette longue marche des hommes ; il écoute, pose des questions, partage avec eux des interrogations, réveille en eux les espoirs les plus fous. Dans les Ecritures, il propose un sens à leur histoire : ne fallait-il pas ce long enfantement douloureux pour déboucher sur un monde nouveau ? Ne faut-il pas tous ces tâtonnements pour que librement les hommes inventent leur réponse libre à l’amour de Dieu ? Le but visé explique toute la route. Le signe du pain partagé, signe laissé par Jésus à ses disciples la veille de sa mort, nous assure de l’amitié et de la fidélité de Dieu, que rien ne peut décevoir, ni étouffer. Elle est cette "brûlure" qui habite l’humanité, puissance de renouvellement, car ce feu, c’est l’amour.

* Et finalement notre propre situation, à nous aujourd’hui :
Cet épisode d’Emmaüs, n’est-ce pas aussi l’histoire de notre vie ? Notre existence est un chemin où nous marchons avec d’autres hommes (plus ou moins frères). Il y a des jours merveilleux, mais il y a aussi des périodes difficiles, comme celle que nous connaissons actuellement. Mais Quelqu’un est là, encore inconnu, sa présence nous accompagne. Jésus est aussi discret dans nos vies que cet inconnu qui se mêle à la conversation des deux disciples. Nous rencontrons certes des témoignages (comme celui des femmes), des signes (comme celui du pain partagé) qui peuvent ouvrir nos yeux aveuglés ; mais il faut chercher et de jour en jour, à l’écoute des autres, en partageant les événements et les Ecritures, réconfortés par ce pain qu’il nous a donné pour faire mémoire de lui, nous pourrons le reconnaître et découvrir ce “feu“ et cette "brûlure" que son amour a allumés en nous. Alors, sortir, reprendre la route et aller annoncer la Bonne Nouvelle sera pour nous une nécessité et une joie. Alleluia !...

Alain Patin
alain.patin chez libertysurf.fr



 


CRISE….. en jeux de mots !

 

24 avril 2020 2020

En cette période de crise

Les problèmes des boulangers sont croissants… Alors que les bouchers veulent défendre leur beefsteak, Les éleveurs de volailles se font plumer, Les éleveurs de chiens sont aux abois.

Les pêcheurs haussent le ton ! Tandis que les céréaliers sont sur la paille, les brasseurs sont sous pression, Les viticulteurs trinquent.

Les électriciens résistent. Pour les couvreurs, c’est la tuile voire l’ardoise. Certains plombiers prennent carrément la fuite. Dans l’industrie automobile, les salariés débrayent, dans l’espoir que la direction fasse marche arrière.

Chez EDF, les syndicats sont sous tension, mais la direction ne semble pas au courant. Les cheminots voudraient garder leur train de vie, mais la crise est arrivée sans crier gare.

Alors… les veilleurs de nuits, eux, vivent au jour le jour. Pendant que les pédicures travaillent d’arrache-pied. Les croupiers jouent le tout pour le tout, Les dessinateurs font grise mine (surtout avec la mort d’Uderzo).

Les militaires partent en retraite. Les imprimeurs dépriment. Et les météorologistes sont en dépression. Et jamais on ne voit les abbés céder, Même si les intégristes y perdent leur latin. Et que dans les bénitiers, les poissons s’arrêtent.

Les cyclistes, interdits de sortie, rongent leur frein de peur de péter un cable ! Les dentistes ont fermé pour ne pas ramener leur fraise Et les jardiniers, privés de semence, n’ont pas grosse binette Dans cette crise, le maçon n’a plus d’alibi en béton Et le prof d’arts plastiques ne fait que noircir le tableau Pendant que le prof de maths roule sa bosse !

Le palefrenier a une fièvre de cheval, Le Charpentier –bon chrétien- voit la poutre dans l’œil de son voisin Et le tennisman travaille sans filet !

Dans cette panique, les clercs de notaire sont perdus dans leurs études Le poissonnier est muet comme une carpe Pendant que le bedeau se fait sonner les cloches !

C’est vraiment une mauvaise passe : Mais rarement les banquiers perdent au change !



 


Jour 37 du confinement

 

22 avril 2020 2020

Ce chiffre de 37 vient taquiner notre patience : comment vivre ce déjà trop long confinement ?

Et du coup, j’ai cherché : que fait Jésus quand il voit ses disciples, confinés en eux-mêmes ? Eh bien, Jésus leur propose un chemin ; il les prend avec lui et les emmène sur une montagne ; il les invite à prendre de la hauteur ; il leur tend la main pour s’extraire un moment de la mêlée. Le texte, dans l’évangile de St Luc, souligne que cela à lieu environ huit jours après certaines paroles, celles où Jésus a affirmé de tristes perspectives : « Il faut que le Fils de l’homme souffre beaucoup, qu’il soit rejeté par les anciens, les grands prêtres et les scribes, qu’il soit mis à mort et que, le troisième jour, il ressuscite. » Lc 9, 22.
Voilà huit jours qu’ils ont ces paroles en travers de la gorge, tellement elles sont difficiles à avaler. Huit jours où l’horizon s’est obscurci, où leur aventure semble ne plus avoir de signification. Comment vivre alors, comment retrouver goût à la vie ? Plongés dans le marasme, tout leur devient incompréhensible ; tout semble se dérober ; ils n’ont plus prise sur rien ; leurs repères se sont évanouis, ils tournent en rond, confinés dans leurs idées noires…

C’est bien là une expérience qui nous rejoint : et parfois pour nous, cela ne dure pas huit jours, mais déjà bien plus longtemps ! Moments de grisaille, où le poids du jour semble trop lourd, où nous nous sentons seuls, désespérément seuls devant des situations trop dures. Mais justement, Jésus ne nous laisse pas isolés : il regroupe Pierre, Jean et Jacques ; c’est une invitation à rejoindre ceux qui vivent la même expérience. C’est comme s’il nous disait : “ne reste pas seul, fais appel à d’autres ; tout seul, tu n’as peut être plus la force de t’extraire de la mélasse qui t’englue, mais avec Jean et Jacques, c’est sûrement possible ; rejoins-les ; ensemble vous retrouverez de quoi en sortir”.

Bon, nous voilà un peu remis en route, et étonnement ! Sur la montagne où il nous invite, nous découvrons Jésus qui prie. Il ne te demande même pas de prier, comme s’il savait que tu n’en as ni le goût, ni la force ; il prend les devants : ta souffrance, ton angoisse, tes doutes, il les porte dans sa prière. Et son visage, ce visage que tu ne comprenais plus, s’éclaire et s’illumine ; il s’inscrit en relief au milieu d’autres visages ; il prend place dans une histoire d’amour et d’alliance.

Et voilà, Moïse et Elie, figures de proue des chercheurs de Dieu, des quêteurs de vie ; Moïse, celui qui souvent manque d’espérance pour conduire un peuple rebelle et peureux, mais qui apprend de Dieu la patience et la ténacité ! Elie, le prophète en butte à l’hostilité du pouvoir et lâché par un peuple servile et tremblant, mais que Dieu rend fidèle et persévérant. A ces deux-là aussi, Dieu a dit : “tu n’es pas seul ! ” Il invite un jour Moïse désespéré à s’appuyer sur 70 anciens, capables de porter avec lui la responsabilité du peuple. Et à Elie, il adjoint Elisée comme compagnon pour prendre sa suite.

A toi maintenant, il dit : “tu n’es pas seul !” Alors ne reste pas bloqué sur ta situation ; regarde autour de toi ; il y a Pierre, Jean et Jacques (et bien d’autres !) qui peinent dans la même galère. Prends de la hauteur : regarde plus loin ceux qui t’ont précédé sur la route de la vie. Tu es entouré d’une multitude de témoins, de tous ceux qui ont tracé leur chemin au milieu des embûches de toutes sortes. Tu as une place à prendre parmi eux ; appuyés sur eux, rejoins cette immense marche où Dieu s’investit depuis toujours. Ta vie te semble plate, sans relief, sans signification : place-la en trois dimensions. Donne-lui de la hauteur un peu à l’écart sur la montagne ; donne-lui de l’espace au milieu de tes frères, donne-lui du champ en évoquant cette longue histoire qui te parle de la fidélité sans failles de Dieu.

Un éclair t’illumine un instant, un moment de clarté, une trouée dans les nuages qui révèle soudain la lumière du soleil que tu croyais disparue. Mais seulement un éclair ; Pierre voudrait retenir cet instant, y planter des tentes, mais ça n’est pas possible ! C’est juste un éblouissement rapide, mais suffisant pour comprendre que Jésus n’est pas trompeur ; il est le Fils bien-aimé qu’on peut écouter en toute confiance, même si parfois on ne comprend pas ce qu’il veut dire.

Le chemin que Dieu t’offre ici est le chemin des autres : découvrir que tu n’es pas isolé, accablé par une situation sans issue ; d’autres vivent les mêmes réalités, d’autres les ont vécu avant toi et ils ont traversé ces heures d’angoisses en renouvelant leur confiance ; ils deviennent alors, pour toi et pour chacun de nous, des frères qui nous apprennent à vivre intensément.

Quand l’horizon s’obscurcit, ne reste pas les yeux rivés à terre, lève les yeux sur ceux qui t’entourent, rappelle-toi ceux qui t’ont précédé, évoque cette foule immense de témoins qui ont donné sens - avec raison - à leurs moments les plus difficiles, et d’eux reçoit aujourd’hui la force de tenir dans ce qui t’arrive. Avec eux, deviens un maillon de cette chaîne d’espérance qui renouvelle le monde.

Tu vas peut être expérimenter là un des éléments les plus utiles pour vivre bien, à savoir l’humour ; l’humour est une petite fée qui vient égayer l’existence. Regarder de plus haut et de plus loin, ne plus se prendre pour le centre du monde, apprécier sa vie sur un fond de tableau plus général, la placer en trois dimensions, désamorce souvent le tragique où je me complais.

Un peu d’humour pour saisir que tu n’es pas le plus malheureux du monde, que tu n’es pas le seul à subir cette agression, que d’autres connaissent la même difficulté. Alors, comme un éclair, un léger sourire revient sur ton visage et l’illumine ; quelque chose s’est allumée. Laisse cet humour faire son œuvre et susciter en toi une forte et sereine espérance.

Alain Patin
alain.patin chez libertysurf.fr



 


Suivre ses pas

 

21 avril 2020 2020

Texte proposé par Frère Philippe Verdin

Dimanche de Pâques. À la fin d’une liturgie eucharistique confinée mais gonflée d’espérance, le célébrant, un frère de notre couvent dominicain, nous accorde la triple bénédiction solennelle : « Suivez maintenant les pas du Ressuscité ! » Ah, d’accord ! Notre mission est donc de suivre ses pas… Nous sommes envoyés à la recherche des traces de pas, des traces du Christ en ce monde.
Il nous faut fureter le nez au ras du sol, comme des limiers du divin, comme les enfants qui cherchent les œufs de Pâques cachés dans les herbes hautes. Les traces du Christ sont inscrites dans le sable, dans la poussière. Empreintes dans la boue du monde, brisées dans les névés immaculés des montagnes, ou sillage dans les vagues de la mer. Les traces du Christ ne sont pas dans les nuées. On les découvre dans l’humus, inscrite dans notre terre, dans les sillons notre cœur.
Il nous faut le suivre à la trace. Nous devons retrouver la piste pour mettre nos pas dans ses pas.
Pour retrouver la piste, nous réclamons un coup de pouce. Il nous faudrait des indices, il nous faudrait aussi un instinct aiguisé.
Pour indices, Jésus sème de petits cailloux qui scintillent au soleil d’avril. Un cœur averti les voit briller sur le chemin qui mène vers la vie éternelle. Ces pépites sont, comme le proclame saint Pierre, « les miracles, les prodiges et les signes au milieu de nous. » (Actes 2, 15 - première lecture du lundi de l’octave de Pâques.) Ces grâces, ces bénédictions, ces miracles dont nous sommes comblés, même en confinement, nous les voyons quand nous ouvrons les yeux, comme Agar qui découvre un puits dans le désert sur le chemin de Shur : c’est l’action providentielle de Dieu pour nous, autour de nous, en nous.
L’instinct du pisteur de traces, c’est l’Esprit Saint qui nous l’accorde. La joie inouïe de sentir la présence de Dieu, le miracle de le reconnaître quand il marche à nos côtés, cette expérience unique, irremplaçable dont parlait Louis de Funès, l’acteur vintage à la mode en avril 2020 : « Jésus Christ fut le radieux compagnon de chaque instant de ma vie. » Ou, si on préfère Lacordaire : « On rencontre Jésus Christ comme on rencontre un autre homme. Un jour, au détour d’une rue, dans un sentier solitaire : on s’arrête ; on écoute une voix qui nous dit dans la conscience : voilà Jésus Christ. »
Celui qui a retrouvé la piste et qui rencontre inopinément celui qu’il suit en est à jamais ébloui. C’est cette expérience que rapportent les disciples d’Emmaüs. C’est cette rencontre au bord de la piste dont parle Philon d’Alexandrie : « La Parole divine se révèle à l’improviste ! Elle est comme un compagnon de route pour l’âme qui chemine solitaire. Elle lui apporte une joie inattendue qui dépasse toute espérance. »
Suivre les pas du Ressuscité pour, comme lui, semer l’espérance et aussi apprendre la charité.
Au milieu du sentier (c’est un parcours intérieur), on comprend que Jésus nous a joué un tour. Depuis un moment, ce n’est plus nous qui suivons ses pas. C’est lui qui nous suit, qui nous guette, qui marche à notre rythme, qui nous dépasse, qui nous entraîne et qui nous attend. Alors notre cœur est tout brûlant. Il nous parle et - miracle ! - nous comprenons enfin ce qu’il n’a cessé de nous murmurer depuis le début de la route.
Nous partageons son corps. Malgré l’isolement du confinement, nous sommes frères et sœurs, en communion avec les autres pisteurs, avec les autres chercheurs, avec tous les amis de Dieu, avec le curé de Mulhouse (un auteur du Cerf !) aux portes de la salle de réanimation, avec l’archevêque dans sa cathédrale à ciel ouvert et avec le pape seul parmi les flaques de la place Saint-Pierre. Nous sommes en communion avec tous ceux qui suivent les pas du Ressuscité sans le savoir, avec les enfants, les poètes et les infirmières, les institutrices qui enseignent le B-A-BA par WhatsApp, les directrices d’EHPAD et les fabricants de masques, les livreurs de lait et les maraîchers aux mains hydroalcoolisées, les chanteurs aux balcons et les boulangères.
Le Ressuscité suit nos pas vagabonds, nos pas de travers, nos pas timides comme nos pas courageux. Le Ressuscité s’amuse de nous voir chercher ses pas ailleurs que dans la trace des pauvres.
Le Ressuscité nous emporte tous dans son sillage, au pas de danse, sur les pas du Père. C’est épatant. Alléluia !

Bonne journée à toutes et tous,
Fraternellement
Louis



 


Slam

 

20 avril 2020 2020

Texte proposé par Emmanuelle Alenne

L’isolement m’a fait revenir mon ennemi
amie fut elle à un moment de ma vie
madame la solitude
elle est arrivée comme à son habitude
sans me prévenir, sans m’écrire
j’en connais bien la cause
et je suppose
que cette venue
impromptue
en est le seul responsable
et inexcusable, virus
je ne peux rien faire
à part ranger mes affaires
je me sens inutile
je suis comme immobile
je ne suis pourtant pas seule
j’ai mes enfants, google
mais je tourne en rond
et bonjours les jurons
je me fais trop de soucis
je ne vois plus mes amies
je m’inquiète pour ma formation
je m’étais faite tellement d’illusions
j’en ai perdu ma motivation
je me pose trop de questions
et j’en ai pas les réponses
et je m’enfonce
dans l’incertitude
dans l’inquiétude
j’avais besoin de toi solitude, aujourd’hui
pour intégrer les événements de ma vie
et ne pas les intérioriser
j’avais besoin de toi , Solitude
pour m’aider à reprendre pieds
à écrire sur cette feuille de papier
des mots qui me ressemblent
des mots qui s’assemblent
solitude
tu peux partir
même si je suis seule à écrire
seule, à panser mes maux
je ne suis pas solo
mes doutes et mes inquiétudes
laissent pas à des certitudes.
L’événement réparateur
l’Événement déclencheur
qui a fait s’envoler mes peurs
je le cherche encore en moi
ou peut être pas
trop de questions tuent la question
ma foi serait elle plus forte que la solitude ?



 


Jour 33 du confinement

 

19 avril 2020 2020

L’évangile qu’on va lire dimanche devrait prendre une nouvelle résonnance à cause de ce que nous vivons. En effet, voilà les apôtres volontairement “confinés“ par peur ! Sauf un, Thomas, qui devait avoir une attestation de déplacement dérogatoire, et qui est donc absent !
Quand il revient, tous se précipitent pour lui dire qu’il a manqué une rencontre essentielle : « Nous avons vu le Seigneur ! » Mais cela n’entraîne pas l’adhésion de Thomas : pour croire, il veut voir, et pas seulement voir, mais toucher et de près. Ce n’est quelqu’un à se contenter de paroles, il veut vérifier par lui-même. 8 jours plus tard, il fait partie du confinement, et Jésus répond à son attente ; il l’invite à toucher, à vérifier qu’il est bien vivant, lui, le crucifié. Et l’incrédulité première de Thomas nous vaut cette parole qui nous rejoint les uns et les autres : « Heureux ceux qui croient, sans voir vu. » N’est-ce pas notre cas ?

Thomas, avec son désir de vérifier, nous ouvre aussi un chemin : nous voilà invités, comme lui, non pas à en rester à une rencontre furtive de Jésus, mais à prendre du temps pour le toucher, pour reprendre à notre compte sa propre expérience, celle de ses blessures, pour découvrir la vie nouvelle qu’elle fait jaillir. Avec Thomas, on n’en est pas à la répétition un peu mécanique d’une formule : “il est ressuscité !...“ ; il y a toute une recherche à faire, toute une découverte à approfondir pour vérifier ce que cela change dans notre vie.

Et pour cela, il faut du temps et du temps donné régulièrement, sinon le lien risque d’être ténu, imperceptible… Il me faut de la patience, apprendre à me tenir là en écoute, plein d’attention à la parole que Dieu veut me partager ; s’approcher peu à peu, chaque jour un peu plus près pour que je devienne familier de cette parole, familier de Dieu, pour qu’il me touche.

Des rites sont indispensables, c’est-à-dire des rencontres régulières et prévues, pour que se tissent des liens forts et vivants. Ce sont des instants de communion, où il s’agit simplement d’être là, unis dans la même tendresse, pour être bien ensemble, tout simplement comme ceux qui s’aiment. C’est d’être là, pleinement présent à l’instant qu’on vit. Souvent nous sommes agités dans notre tête et dans notre cœur, parce que nous sommes encore ou déjà ailleurs, à ressasser le passé ou à redouter l’avenir.

Nous nous faisons beaucoup de mal, en étant toujours ailleurs que là où nous sommes, car nous ne vivons qu’à moitié, et vivre à moitié, c’est mal vivre. Au contraire, quel bonheur à prendre le temps d’une rencontre vraie et profonde avec le Seigneur, source de notre vie et à puiser en lui notre force et notre espérance. Ce n’est pas la durée de l’entretien qui est importante, mais la présence totale à ce que nous vivons à ce moment-là.
Et ceci est valable pour toute rencontre, pour les multiples contacts de nos journées : être pleinement à l’écoute de celui que je croise. On sent très bien quand on est écouté ; on sait aussi quand notre parole résonne dans le vide. Dans nos villes, et spécialement en ce temps de confinement, combien crèvent de solitude, parce que personne ne les accueille vraiment, profondément, pour eux, simplement pour eux. Les sans-liens, les sans-relations, les sans-avenir nous crient qu’il est urgent aujourd’hui de créer des liens, de s’apprivoiser les uns les autres, si nous voulons que la vie ait du goût.

Pour cela, il faut prendre le temps de s’approcher, de se côtoyer et donc de vaincre la peur de l’autre, trop loin, trop différent ; se laisser toucher peu à peu et lui donner sa place. Là encore il est nécessaire d’inventer des rites, d’aller au-delà de contacts ponctuels, de s’inscrire dans des démarches durables et régulières, pour que des liens profonds se tissent entre nous. On ne peut en rester aux coups de cœur, émotions d’un instant, sans lendemain. Cela s’appelle “s’entretenir”, c’est-à-dire tenir ensemble, tenir les uns par les autres, les uns appuyés sur les autres, comme les poutres d’une charpente.

Alors si d’un côté je cherche à toucher le Seigneur, en fréquentant sa parole, chaque jour d’un peu plus près, si je tisse avec Lui des liens réels, durables, réguliers, et si de l’autre côté, nous nous apprivoisons entre nous, si nous prenons ensemble le temps de l’écoute, le temps de l’accueil, alors nous vivrons intensément de ce que l’Apôtre Paul décrit : « Nous sommes un seul corps et si un membre souffre, tous les membres partagent sa souffrance ; si un membre est à l’honneur, tous partagent sa joie. Et vous êtes le corps du Christ et chacun pour sa part, membre de ce corps. » 1 Co 12,26-27

Vivre ainsi, c’est goûter intensément les fruits d’une vie ensemble, d’une vie accueillie, reçue et partagée ; c’est sentir et en éprouver toute la fécondité. C’est une source de joie intarissable, et cette joie, nul ne pourrait te l’enlever, puisque ce sont eux, tes frères, qui te la donnent.

Alain Patin
alain.patin chez libertysurf.fr



 


Fête de Pâques

 

18 avril 2020 2020

Dimanche 12 avril 2020, Fête de Pâques, texte proposé par Daniel Vannier

Ce matin, dimanche de Pâques, tout est bizarre. Nous sommes confinés et malgré cet état, certains prennent leur aise. Juliette, le chat de notre fille Marie se prélasse dans son couffin et dehors, un corbeau bien noir a le culot de picorer quelques bouts d’herbe sur la pelouse éclatante de mille petites pâquerettes. Quel contraste en ce jour béni. Des amis, de vrais amis sont malades, d’autres sont partis et mis dans le cercueil à la va vite avec pour seul maigre consolation, une cérémonie d’adieu réduite à son plus stricte minimum comprenant au maximum 20 personnes. Ce fut le triste sort de deux parents et d’un ami. Et puis la dure destinée de notre voisine Nicole. Nicole vient de l’Hôpital dans l’attente d’un diagnostic qu’elle craint. Notre maman de 94 ans sait elle aussi que ses enfants ne viendront pas. Confiné, je suis, tu es, nous sommes confinés. A Cleunay, les rues et l’église St Clément resteront désertes. Ses pasteurs qui ont quitté l’Afrique pour nous rejoindre célébreront la fête de Pâques sans leurs paroissiens, une première à marquer dans les annales. La faute à ce fichu« coronavirus » qui décime la planète. Après les insectes que les hommes ont tué à coup de pesticides et de remembrement, c’est au tour des hommes de disparaitre à petits feux. Que diable, nous avons pourtant l’arme atomique qui peut détruite plusieurs fois la planète, les meilleurs joueurs de football, les plus grands professeurs de médecine, un système bancaire ultra-performant ! et pourtant, rien n’y fait. Ce fichu virus nous foudroie subrepticement. Le salut ne viendrait-il pas des petites mains, de ceux que jamais on entend, par exemple les aides-soignantes, les maçons, les chauffeurs ou encore les agricultrices etc… Mais des régimes autoritaires de type Chinois nous assurent le contraire, chez eux le virus est éradiqué par des mesures drastiques d’enferment oh pardon de confinement. Parmi ceux-ci, citons le plus grand, le plus beau, le régime Chinois. Ce dernier cache ses 60 000morts à Wuhan et tait les disparitions des médecins et journalistes qui ont tiré la sonnette d’alarme dès décembre dernier. Les disciples de Jésus, eux aussi ont peur. Ils se terrent. Les femmes qui ont assisté Jésus jusqu’à sa mise en Croix leur annoncent pourtant sa résurrection. Sont-elles digne de recevoir notre confiance quand Jérusalem est bouclé par l’armée romaine et que les pharisiens et le grand prêtre s’acharnent sur ceux et celles qui ont cru en Jésus ! Ne vaut-il mieux pas resté confiner et attendre ? Comme l’apôtre Thomas, je suis, comme lui j’agis timidement. La nouvelle des femmes n’est qu’une bonne blague. Jésus est mort, point final ! Sur leur croix le bon larron a confiance, le second est désespéré. Pouvons-nous lui jeter la pierre alors qu’il souffrait le martyr sur sa propre croix ? Pâques en ce temps de confinement, ce sont des petits gestes, des messages reçus et donnés. Face à nous, une bougie allumée scintillait tendrement. Nous regardions sa flamme vacillante. Comme une mère, elle berçait intérieurement les profondeurs de notre être. Comme le soleil qui ressuscité au matin, elle nous montrait le chemin de Jérusalem, A l’horizon sur un arc en ciel se dessinait l’heureuse nouvelle des femmes qui ont suivi ta passion. « Jésus plus fort que toute mort, tu es vraiment ressuscité ». Daniel Vannier



 


Prière à partir de Jean 21,1-19

 

16 avril 2020 2020

Prière proposée par Antoine Brethomé PO lors d’une réco ACO à Bordeaux

Jésus ressuscité, tu rejoins tes compagnons de route sur un terrain qui leur est familier,
leur terrain de vie : les bords du lac, la pêche, la barque, le filet...(Jn 21)
Aujourd’hui encore, tu nous rejoins sur le terrain de notre vie : travail, quartier, engagement...
tu nous attends sur le rivage, tu guettes notre retour dans le petit matin de nos vies.
Le brasero est prêt, le feu est déjà allumé.
Toute la nuit nous avons peiné ;
nous nous sommes déplacés à la rencontre des copains ;
nous avons ramé ; nous avons lancé des invitations, et fatigués, nous arrivons les mains vides.
Mais ta présence et l’écoute de ta parole ravivent en nous le feu missionnaire et le désir de poursuivre notre mission...et nous repartons...
Aujourd’hui nous te présentons les fruits de notre travail, nos rencontres, nos partages...
nous pouvons alors nous asseoir et partager le repas.
Dans ce moment vécu au bord du lac, dans ce repas partagé,
dans cette rencontre humaine, nous percevons déjà ce monde nouveau que tu es venu inauguré
et que tu nous demandes de continuer à faire advenir sur nos lieux de vie, dans chacune de nos rencontres..
Et puis après ce déjeuner matinal, tu te retrouves en tête à tête avec Pierre.
Je t’imagine, marchant avec lui le long de la mer.
Par trois fois tu lui poses la question : "M’aimes-tu ?"
Jésus, toi le Vivant, tu es là avec toute ton humanité ;
une humanité façonnée par le travail du bois, par les rencontres sur les chemins de Galilée, rencontres des petits, des rejetés, des blessés, des étrangers, des précaires...tu fais un travail de remise debout, de libération.
tu es là, avec encore dans ta chair, les marques de tes souffrances, de ta mise à mort.
tu es là surtout avec tout l’amour du Père qui triomphe de la mort.
Pierre est là avec qu’il est lui aussi : prêt à te suivre partout,
et puis au moment où ça va mal pour toi, il ne te connait plus.
Mais l’un et l’autre vous représentez plus que vos deux personnes.
Avec toi Jésus le Vivant, je vois tout ce peuple que tu as rencontré, ce peuple des humbles, tous ceux pour qui tu es venu ; ce peuple tu le confies à Pierre : "Sois le berger de mes brebis", tu le confies à l’Eglise, à nous, la MO (à notre équipe, à l’ACO.)
Et si c’était ce monde ouvrier, ce monde de travailleur, ce monde populaire qui posait la question à l’Eglise : (qui est en Gironde) "M’aimes-tu ?"
Alors Jésus ressuscité, ensemble nous voulons répondre comme Pierre : "tu sais bien que nous t’aimons, toi et tous ceux à qui tu t’es identifié : "ce que vous avez fait à l’un de ces petits c’est à moi que vous l’avez fait" Math 25. Nous voulons témoigner de ton amour ; être témoin de l’amour du Père à l’égard de ce monde que tu confies à l’ACO.
Donne-nous la force de prendre, avec toi, la route qui va vers les hommes,
dans les ’Galilées’ d’aujourd’hui pour que notre vie porte du fruit en abondance.



 


Jour 30 du confinement

 

16 avril 2020 2020

Alors qu’on vient de nous annoncer qu’il fallait encore patienter quatre semaines avant de sortir timidement du confinement, je vous propose, avec Jésus notre guide, de faire davantage attention au temps qui nous est donné : comment le gérer ?

« Jésus disait encore la parabole que voici : "Un homme avait un figuier planté dans sa vigne. Il vint chercher des fruits et n’en trouva pas. Il dit alors au vigneron : Voilà trois ans que je viens chercher des fruits sur ce figuier et je n’en trouve pas. Coupe-le ; pourquoi le laisser épuiser la terre ? En réponse, il lui dit : Maître, laisse-le cette année encore, le temps que je bêche tout autour pour y mettre du fumier. Peut-être produira-t-il des fruits à l’avenir ?... Sinon tu le couperas.” » Lc 13, 6-9

Cette conversation, c’est un échange entre le Père et le Fils : de quoi parle-t-on chez Dieu ? D’un figuier planté dans une vigne. De ce figuier, chacun attend des fruits, et il n’y en a pas. Pourtant on a laissé du temps au temps : trois ans, pendant lesquels patiemment on a espéré un résultat. Que faire ? Le premier dit : « Coupe-le », le second répond que ce n’est pas encore le moment, il demande un délai pour employer de nouveaux moyens et mettre de l’engrais, avec l’espoir d’un fruit à venir et il ajoute (et là, je trouve que c’est très beau) : « Sinon, tu le couperas. » Ni le premier, ni le second, personne, ne veut couper cet arbre ; chacun compte sur l’autre pour faire le geste définitif. Chez Dieu, personne ne veut “couper”, manifester qu’il n’y a plus rien à faire. La parabole s’arrête là, parce qu’à cet endroit elle exprime l’essentiel.

Voilà comment Dieu nous aime, en attendant beaucoup de chacun de nous. Et pour que le fruit vienne, il manifeste une patience agissante. Il sait nous donner du temps, il n’est pas pressé. Il sait attendre, mais sans nous abandonner et il s’active pour nous offrir les moyens d’avancer. Il bêche tout autour ; il met du fumier. Il se donne du mal pour nous. Il n’est pas en dehors du combat ; il s’investit à nos côtés pour que viennent ces fruits qu’il attend.

Dieu descend encore dans sa vigne, et des figuiers que nous sommes, il continue d’attendre des fruits. Il nous veut porteurs d’une récolte abondante, mais il sait qu’il nous faut du temps, et il nous laisse ce temps. Vivre sous cet horizon, grandir sous cette bienveillance, c’est adopter pour soi, pour les autres et en toute circonstance une attitude semblable.

Pour soi, comme Dieu le désire, être ambitieux, vouloir porter du fruit, ne pas se résigner à une petite vie banale, mais faire quelque chose de beau de sa vie, garder présent cet aiguillon, mais sans tension, avec calme et sérénité. Et surtout savoir qu’il faut du temps, prendre une attitude de cultivateur et apprécier les petits dépassements qui manifestent une direction choisie et tenue. Ne pas se désoler de victoires incomplètes, mais reprendre sans cesse le chemin. Etre patient et bon avec soi, sachant que personne ne grandit à la force du poignet ou tendu par l’effort, mais en acceptant de se donner, de mûrir lentement, à la manière d’un fruit. Ne sont beaux et bons que les fruits qui ont pris le temps de mûrir au soleil ; tous ceux qu’on tente de forcer artificiellement n’aboutissent qu’à de pâles répliques.

Offrir aussi aux autres, le même environnement ; va te promener dans leur vigne, en bon voisin. Regarde leur figuier pour y cueillir des fruits. Fais leur comprendre ainsi que tu attends quelque chose d’eux : tu as besoin de leur enthousiasme, de leur ardeur et de leurs projets. Pour vivre, tu as besoin qu’ils soient vivants, eux aussi. Montre-leur, dis-leur ce que tu attends d’eux. Ne passe pas indifférent ou résigné ; sois appelant, mais sans impatience, en sachant attendre les heures de découvertes et de dépassements. Ne cherche pas à ce qu’ils vivent, découvrent et s’engagent à ta manière ; laisse-les mûrir à leur rythme.

Et devant le monde, devant cette société trop souvent malade, tu pourrais t’impatienter. Pourquoi la justice est-elle si lente à s’établir ? Pourquoi la paix n’arrive-t-elle pas à faire taire le bruit des bombes ? Pourquoi les riches toujours plus riches et les pauvres sans cesse à la merci du lendemain ? Pourquoi ce monde, comme un arbre qui n’arrive pas à donner du fruit ? Faut-il se résigner, abandonner le terrain aux ronces, aux fous, à la violence ? Faut-il couper les ponts avec le monde, se réfugier dans l’individualisme, s’offrir un petit espace protégé, loin des redoutables virus de ce monde ? Ou bien entendre la conversation de Dieu qui, lui, ne résigne pas : « Je vais bêcher tout autour pour y mettre de l’engrais ». Nous venons de le vivre lors de la Semaine Sainte : avec Jésus, Dieu n’a pas coupé avec ce monde ; il a été jusqu’au bout solidaire de chacun d’entre nous, jusqu’à tout donner pour le plus petit et le plus éloigné d’entre nous.

Alors s’il te vient l’envie de « couper » ou de te résigner, reviens à l’histoire que raconte Jésus, reprends patiemment la bêche, même si la terre est dure et introduis avec ténacité le fumier évangélique, sûr que Dieu travaille au plus profond, pour que jaillissent un jour, en toi et partout, les fruits attendus.

Alain Patin
alain.patin chez libertysurf.fr



 


Pâque confiné

 

13 avril 2020 2020

Dans ce journal, chacun pourrait témoigner de la manière avec laquelle il vit ces semaines de confinement. Bien-sûr, nous en voyons d’abord les côtés négatifs pour soi. Mais ne serait-ce pas être égoïste si nous ne sommes pas atteints par la maladie et que nous restons sagement chez nous ? Pour des membres de notre entourage qui ont « attrapé » ce virus…nous comprenons pourquoi il a vraiment fallu se confiner, car avec certaines personnes ce virus n’est pas gentil du tout. Et puis il y a celles et ceux qui se dévouent humblement, en premier lieu tout le personnel soignant mais aussi ceux qui assurent pour nous les services essentiels. Ces ouvriers de l’ombre, ne sont pas toujours considérés comme ils devraient l’être. Mais nous avons, comme croyants à leur témoigner de notre reconnaissance.
Nous ne doutons pas que d’ici quelques semaines, nous qui avons été privés de rencontre en équipe ACO pendant un certain temps nous pourrons vivre une vraie révision de vie avec notamment ces questions : comment cela nous a bousculé humainement ? Et dans notre Foi ? Et comment ça nous a fait grandir humainement ? Et dans notre Foi ?
Ce virus vient nous embêter (je vais rester poli) au cœur de notre année chrétienne. Les rameaux, Pâques sont célébrés à la maison. Heureusement il y a le jour du Seigneur, RCF…et plus encore pour ceux qui ont Internet. Mais nous faisons l’expérience d’une plus grande communion les uns avec les autres. Nous faisons l’expérience de celles et de ceux qui ne peuvent plus se rendre dans des églises pour des questions de santé, de mobilité. Même confiné chez nous, il y a un chemin de Foi qui s’ouvre pour tous et un désir de nous retrouver dans nos églises avec plus de joie. Les mots« communauté », « peuple rassemblé », « faire Eglise », prendront alors tout leur sens !
A Pâques, nous célébrons Jésus qui sort vainqueur du tombeau. Ne sommes-nous pas parfois enfermés dans des tombeaux. Ceux que la société nous impose (injustice, chômage, précarité…) et qui font encore plus mal en cette période. Mais aussi à cause des aléas de la vie, notamment la maladie, l’isolement, le deuil…Un coup de téléphone, une écoute fraternelle permettent de croire que la porte du tombeau n’est pas verrouillée et que nous pouvons aller vers la lumière.
Il y a aussi ces tombeaux que nous nous sommes creusés lorsque nous voyons tout de manière négative alors que nous avons tant de raisons d’espérer et d’être dans une joie plus rayonnante. Le Christ nous dit qu’il est le Vivant et que ce que l’Amour et la tendresse qu’il met en nous est plus fort que la mort.
Il y a tant de choses à faire mourir dans nos modes de vie, tant de passages à vivre pour un monde plus juste et fraternel. Cette période difficile est une chance à saisir.
Alors malgré tout je vous souhaite une belle fête de Pâques.
Yvain RIBOULET



 


Une vie nouvelle, c’est mon espérance

 

12 avril 2020 2020

Curieux jour de Pâques cette année ! Mais c’est Pâques, qui n’a rien perdu de son mystère porteur d’un formidable message d’espérance. Quel est ce message ?
Il ne vient pas de moi, il vient des premiers témoins : Jésus, le condamné, le crucifié, est vivant. Parce qu’il a aimé sans bornes, Dieu l’a ressuscité. C’est une brèche dans la mort, un horizon de lumière dans la vie des hommes. La mort n’est plus un terme, elle devient passage vers une Vie Nouvelle.
C’est pour nous que Dieu a fait cela. C’est pour nous que Jésus a vécu ce passage : son amour donné jusqu’au bout est plus fort que la mort, et la Vie nous est offerte. Ça change tout !
Après notre mort, ça changera, mais en attendant… ???
« Vous êtes tous ressuscités ! », nous a dit St Paul. Déjà ? Oui ! La résurrection j’y crois, je l’espère, parce que déjà je vois qu’elle fait partie de nos vies. Dans cette période difficile que nous traversons, regardons ces merveilles qui se partagent grâce aux idées, aux propositions, aux gestes de toute sorte que l’on n’aurait jamais imaginés il y a quelques mois.
Au-delà des souffrances engendrées par ce virus, nous découvrons que des valeurs parfois négligées reviennent en force : la vie est plus importante que l’économie, le bien commun l’emporte sur les intérêts individuels, le service des plus fragiles est une priorité sociale, certaines professions habituellement peu considérées apparaissent comme vitales.
Nous ne pourrons pas sortir de cette crise en revenant à nos vieux démons. Une société renouvelée peut naître de cette épreuve. Une vie nouvelle est possible.
C’est tout le sens de la fête de Pâques (étymologiquement : passage, traversée) que nous célébrerons ce dimanche : la vie triomphe de la mort, l’avenir est ouvert, un monde nouveau est en germe. Au-delà de la Passion et de la mort du Christ sur une croix, nous célébrerons sa résurrection. Je crois que Dieu, par le Christ toujours vivant, accompagne aujourd’hui encore tous ceux qui font le choix de la vie, qu’il les soutient dans la traversée des épreuves pour les ouvrir à une vie nouvelle.
Regardons nos manières nouvelles de faire Eglise en paroisse, en mouvement. Regardons la planète, notre maison commune. Nous n’avons jamais autant pris conscience qu’en se posant davantage, nous la faisons respirer et devenir plus solidaire.
Bonne fête de Pâques…
P. Yesuraja INNACI et Bernard Rosnet

message de Pâques 63


 


Jour 26 du confinement : demain la Pâque !...

 

11 avril 2020 2020

« Et voici que ce jour-là, deux d’entre eux, se rendaient à un village nommé Emmaüs… » Lc 24,13. Ce jour-là, c’est le troisième jour depuis que leur espérance est morte, avec le Christ crucifié et mis au tombeau. Ils s’en vont, l’air éteint ; ils s’éloignent de Jérusalem. Ils tournent la page, c’est fini. Et pourtant, ils avaient répondu, ils avaient tout quitté, pensant que Jésus serait le libérateur du peuple et des exclus. Et voilà : les puissants l’ont écrasé ; sa voix s’est tue ; le couvercle pesant de l’indifférence et de l’ordre injuste est retombé plus lourd encore.

Mais voici que quelqu’un s’approche, un inconnu ; il marche à leurs côtés ; il se mêle à la conversation : « De quoi causez-vous, tout en marchant ? » Il fait l’ignorant et pose des questions ; il les pousse à raconter ce qui est arrivé et à exprimer leurs espoirs déçus, et par bribes ce qu’il en reste, sans trop y croire !

L’inconnu se met à parler ; il part de très loin, de l’histoire de leur peuple, histoire faite de moments intenses, de victoires et d’exploits, mais aussi de défaites et de détresses ; une histoire où, ils le savent bien, Dieu s’est fait connaître. Il est apparu avec une fidélité et une ténacité à toutes épreuves ; jamais, même aux moments les plus sombres, quand tout semblait éteint, jamais il n’a abandonné son peuple. Découverte plus importante encore, ces moments difficiles, presque insupportables, se sont révélés être des moments où germait quelque chose de vraiment neuf. C’est au cœur de la nuit noire que s’est dévoilée la beauté de la lumière du matin. Il finit par conclure : « Ne fallait-il pas que le Messie souffre tout cela pour entrer dans sa gloire (pour révéler ce qu’il était) ? »

Puis l’inconnu fait mine de s’en aller ; il n’impose pas sa présence, ni son explication des événements. Mais quelque chose s’est allumé dans leur espoir éteint ; avec insistance, ils l’invitent au repas : « Reste avec nous, car le soir vient et déjà le jour baisse. » Quand il prend le pain pour leur partager, comme lors du dernier repas de Jésus avec ses disciples, ils le reconnaissent ; ils comprennent qu’il est vivant, que sa mort n’est pas une impasse, un fiasco de plus, mais qu’elle donne sens à toute leur existence. Pourtant déjà il a disparu ; il les attend plus loin sur le chemin, mais en eux s’est inscrite une trace de lumière ineffaçable : « Notre cœur n’était-il pas brûlant en nous, quand il nous parlait sur la route et qu’il nous expliquait les Ecritures ? »

Et ils ne peuvent en rester là ; de nuit, malgré les dangers, ils reprennent la route pour annoncer : « Le Seigneur est ressuscité ! » Il leur faut partager cette espérance, née au plus noir de leur aventure. On sent que désormais plus rien ne pourra l’abattre ; elle a jailli du tombeau, avec le Christ qu’ils ont rencontré à nouveau vivant.

J’aime ce Dieu qui m’interpelle chaque matin, surtout quand on sent la journée bien difficile : « De quoi causes-tu, tout en marchant ? » Aujourd’hui, et peut-être plus qu’hier, nous avons toutes les bonnes raisons d’être abattus : nous espérions tant qu’allait venir un salut tout fait, tout proche ! Et puis, cela semble remis en question par presque rien !

Mais aujourd’hui comme hier, Dieu vient se mêler à notre journée, à nos partages, pour relancer l’espérance. Il vient allumer une flamme en nos cœurs, parce qu’il nous accompagne fidèlement et avec une ténacité sans failles. Chaque matin, nous pouvons lui dire en insistant : « Reste avec nous, car le soir vient et déjà le jour baisse. » Oui, sans lui, le jour risque bien de ressembler à la nuit.

Ce qui est vrai pour moi, je veux aussi l’espérer pour les autres : loin de ressasser le passé, ces blessures que l’autre m’a faites, ces paroles qui m’ont agressé, j’accepte grâce à toi, le compagnon inconnu d’Emmaüs, de repartir sans rancœur, libre de tout ressentiment. A priori, sans autre justification, je considérerai que nous sommes des frères capables de bâtir ensemble, et si mon espoir est encore déçu aujourd’hui, je renaîtrai demain matin à une nouvelle tentative.

Les dernières images télévisées, avec leur lot de souffrances de par le monde, avec ce virus insaisissable et meurtrier, avec l’arrogance des puissants, avec la misère des petits, m’ont laissé sans force, sans réactions ; et l’envie de baisser les bras m’est venue. Pourquoi vouloir changer quelque chose ? Ne faut-il pas mieux se réfugier dans la sphère individuelle, sans trop de projets extérieurs ? Qui apportera enfin la paix, des relations fraternelles entre ethnies et nations ? Qui mettra fin à l’esclavage sans cesse renaissant ? Qui fera fleurir le bonheur sur le visage des enfants ?

Avec sa mort vaincue, Jésus a montré que rien ne pourra décourager la fidélité de Dieu et qu’elle renaît chaque jour, quand je viens y puiser. Parce qu’il y a au cœur de notre histoire cette puissance de renouvellement qu’est la présence de Dieu qui nous accompagne, l’espérance ne sera jamais vaincue.

Vivre, c’est alors renaître chaque matin à l’espérance : aujourd’hui, s’ouvre un jour, où à nouveau tout est possible. Aujourd’hui, je peux sortir de mon accablement, de ma timidité, de mes peurs ; aujourd’hui je peux compter sur Toi, Seigneur Jésus : tu me partages le pain de ce jour, la nourriture nécessaire pour aujourd’hui. Je ne me soucie pas du lendemain ; ça pourrait m’écraser, me paraître trop lourd. Je reçois de Toi le nécessaire pour aujourd’hui. Je sais que demain matin, je pourrais à nouveau renaître avec Toi pour une nouvelle espérance.

« Et voici que ce jour-là, deux d’entre eux… » A la fin du récit, à nouveau ils ne sont toujours que deux, mais un feu les a pénétrés et ils ne sont plus les mêmes ; ils sont re-nés à l’espérance, une espérance indestructible, car le Seigneur est vraiment ressuscité !...

Alain Patin

Confinement, jour 26


 


Le grand plongeon !

 

11 avril 2020 2020

HOMELIE pour une célébration du SAMEDI SAINT

Samedi Saint : veillée pascale ! Veillée baptismale ! Veillée où on accepte de plonger, de se laisser plonger par le Christ, …. dans sa mort, pour en ressortir vivant avec Lui. Le plongeon, nous venons de le vivre depuis plusieurs semaines : - Les places boursières ont plongé, très vite, dans le rouge, dit-on… (le rouge= sang ?) - Les entreprises ont plongé ; les économies nationales et même tout le système économique international ont plongé, dans une paralysie généralisée, avec des conséquences désastreuses pour les plus pauvres. - Tous les transports et les échanges (sauf ce qui touche à alimentaire et au sanitaire) ont plongé et ont provoqué chômage technique, perte de profits, etc - Les hôpitaux et services de santé ont vu plonger leur capacité d’accueil et de réaction face à l’épidémie - Toutes les célébrations religieuses ont été interdites, entrainant un plongeon de la dimension communautaire … Si on peut continuer d’être chrétien en restant chez soi, et par internet ! alors …. - Tous les projets pastoraux, réflexion diocésaine avec une belle lettre de l’évêque sont « tombés à l’eau ! » dans un plongeon magistral et silencieux ! - Tous ces plongeons…et bien d’autres ont été provoqué, par un………………….. tout petit virus !

Un petit virus, qui nous vient des quartiers pauvres de la ville de Wuhan (parfaitement inconnue par nous, il y a quelques mois !) ! Un petit virus invisible, inodore, incolore, Qui passe entre nous de manière inaperçue et malicieuse ! Qui atteint les riches comme les pauvres ! Qui traverse les frontières, sans montrer ses papiers, et prouver son identité ! Qui est plus fort que tous les mouvements populaires ou syndicaux, en provoquant fermetures des usines, en mettant à mal l’économie néo-libérale mondialisée, et qui nous oblige à parler de « décroissance » dans les pays riches ! Et si ce petit virus était, pour nous un signe, et un appel !?

Un signe : un signe que notre société et surtout notre économie mondialisée avec des usines constamment délocalisées (en fonction d’une meilleure rentabilité)… sont une impasse pour la survie de la planète et de notre espèce humaine. Un signe que l’écart grandissant entre les riches et les pauvres , dans un même pays, ou entre pays, ne peut mener qu’à des guerres, des migrations (pour ceux qui peuvent partir) et des pauvretés (qui sont le refuge de tous les virus imaginables) Un signe que notre mode de consommation à outrance (dans la nourriture, dans les biens matériels, dans les déplacements, dans les loisirs) doit être revu et corrigé, car il est contraire au « projet de Dieu » !

Un appel : Un appel à vivre et envisager la vie AUTREMENT ! Un appel à continuer de se soucier des autres (auprès de nous, ou à l’autre bout du monde), et à s’engager, pour cela, dans des associations de solidarité internationale ! Un appel à mieux protéger notre système de santé, et tous ses acteurs et travailleurs, (qui ont beaucoup donné) en apprenant à nous prendre en charge nous-mêmes, par une vie plus saine. Un appel à limiter nos biens de consommation (en tout genre) pour protéger les effets destructeurs sur notre planète. Que la décroissance s’accompagne d’une « dé-consommation » ! Un appel à utiliser toutes les occasions de recyclage, de revente, de réparation qui sont à notre portée ou qui sont offertes par des associations diverses. Un appel à mutualiser nos moyens (outils, voiture, ordinateur…) et permettre ainsi de continuer les échanges de proximité et de service. Un appel à inventer d’autres formes de prières et de célébrations qui donneront un visage de l’Eglise plus joyeuse, plus ouverte !

Ainsi, notre plongeon ne sera pas inutile ! Ainsi notre baptême, nous permettra de vivre vraiment notre vocation de PRETRE (celui qui voit le positif de la vie, y compris dans les épidémies !) de PROPHETE (celui qui ose inventer un nouveau mode de vie) et de ROI (celui agit concrètement pour que çà change !) Bonnes fêtes de Pâques (au bord du plongeoir !)



 


Contre les VIRUS…. Le vaccin de l’eucharistie !

 

9 avril 2020 2020

Texte proposé par Bernard ROBERT « Un jour de confinement…mais pas d’isolement ! »

Homélie Jeudi saint 2020

Nous venons de vivre un carême 2020 qui n’aura pas été une répétition des carêmes précédents ! Il aura été, pour bon nombre d’entre nous, comme « une traversée du désert » (dont nous ne voyons pas encore nettement la fin, d’ailleurs !).
Nous l’avons chanté « joyeusement » le premier dimanche de carême : « avec Toi, nous irons au désert, porté par le vent de l’Esprit ! » C’est facile à chanter ! C’est moins facile à vivre ! Maintenant que notre carême chrétien est fini et que nous voilà « réunis » dans ces fêtes de Pâques qui sont le rappel de la Résurrection du Christ et de sa victoire sur la mort, il est peut-être temps de regarder ce que nous avons vécu en étant affronté à cette épidémie du coronavirus !

NOUS AVONS EU PEUR pour notre santé, pour celle de nos proches… à juste titre sans doute… mais qu’est-ce que c’est que cette peur (parfois infondée) à côté de ce que vivent enfants et adultes en Syrie depuis 9 ans , ou dans d’autres pays qui doivent vivre sous les bombes ou le tirs d’armes en tout genre !

NOUS AVONS ETE ATTEINTS DIRECTEMENT ou DANS NOTRE ENTOURAGE. Nous avons connu cette maladie (mortelle pour 2% des cas)… mais, des maladies nous en avons connu bien d’autres (grippe, cancer, AVC, et cie) …. Et nous avons surmonté, ou nous essayons ! et qu’est-ce que cela à côté de Ebola (contagieuse et mortelle à 80 %) qui sévissait encore récemment au Congo-RDC… ou du palud (non contagieux c’est vrai) et qui sévit dans toute l’Afrique et fait environ 500 000 morts tous les ans !

NOUS AVONS ETE SOIGNES. Dans un système de santé, dont on dit qu’il est un des meilleurs (sinon le plus performant) sur la planète. Avons-nous pensé aux pauvres de cette même planète (qu’ils vivent aux USA ou au Bengladesh) et qui meurent faute de soins accessibles !

NOUS AVONS FAIT DES PROVISIONS DE NOURRITURE, en dévalisant parfois les magasins….pour remplir nos congélateurs ou nos placards ! Pourquoi ? Même les commerçants nous ont dit que c’était inutile comme attitude ! Avons-nous eu faim, vraiment ? Et les millions de personnes qui meurent de faim ou de soif dans ce monde….Qu’est-ce qu’ils devraient dire ? Qu’est-ce qu’ils devraient faire ? NOUS AVONS ETE (ou allons être) INDEMNISES de nos « manque à gagner » ou de nos dépenses supplémentaires. C’est très bien ! C’est formidable comme solidarité nationale ! ….et la solidarité internationale, qu’en faisons-nous ? Qu’en ferons-nous ?

NOUS AVONS LIMITE NOS VOYAGES, NOS VISITES, par mesure de précaution. Nous avons été « confinés »…qu’est-ce que çà veut dire, sinon « mettre de la distance, de la frontière avec les autres » ! Un comble ! S’isoler pour respecter la vie, pour sauver la vie !….alors que notre vie humaine et chrétienne n’a de sens que parce qu’elle est d’abord faite de relations ! Et que penser de ceux qui sont régulièrement « confinés dehors » : les migrants, les S.D.F., les expulsés, etc…

NOUS AVONS ETE PRIVES D’EUCHARISTIES et de beaucoup d’autres célébrations religieuses. Cela ne nous a pas empêché de prier personnellement….. Heureusement ! Mais on nous dit toujours que l’eucharistie et le rassemblement dominical sont indispensables à la vie de l’Eglise ! Alors, quoi penser ? On a eu recours à la trouvaille de la « communion spirituelle »… Mais comment faire pour que ce ne soit pas une « communion virtuelle », comme c’est déjà le cas, parfois !

NOUS AVONS ETE INVENTIFS. … pour communiquer, pour prier, pour travailler, pour se détendre, pour se former, …. C’est souvent ce qui se passe en temps de crise (en temps de guerre) : on est amené à se surpasser, à inventer ! ALORS, CE SOIR, - « rassemblés par la prière » (en dehors de la Lorette où nous devions nous retrouver), - unis dans cette fête de l’eucharistie, où non seulement « nous mangeons » de la vie du Christ, mais aussi et surtout, « nous nous laissons manger » par Lui…entrainés dans son Amour…..

SOYONS INVENTIFS : et disons ensemble : « Halte aux Virus ! »
...

Jeudi Saint


 


Confinement, jour 23

 

8 avril 2020 2020

A la veille du Jeudi Saint, où Jésus a pris le pain et le vin pour nous assurer de sa présence parmi nous à renouveler sans cesse : « Faites ceci en mémoire de moi ! », nous voilà un peu démunis comme les disciples : « Nous n’avons ici que cinq pains et deux poissons… », et pire encore, car nous n’avons même pas la possibilité de les offrir en partage !..., tout rassemblement nous étant impossible.

Mais regardons le texte de plus près.

« Les foules suivaient Jésus. Il les accueillit, leur parla du Royaume de Dieu et guérit ceux qui avaient besoin de soins. Le jour commençait à baisser. S’approchant, les Douze lui dirent : "Renvoie la foule, afin qu’ils aillent dans les villages et hameaux d’alentour pour y loger et y trouver des provisions, car ici nous sommes dans un désert." Mais il leur dit : "Donnez-leur vous-mêmes à manger.” Ils dirent : "Nous n’avons ici que cinq pains et deux poissons, à moins d’aller nous-mêmes acheter de la nourriture pour tout ce peuple.” Car ils étaient bien cinq mille hommes. Alors il dit à ses disciples : "Faites-les s’étendre par tablées d’une cinquantaine.” Ils agirent ainsi et les firent tous s’étendre. Prenant alors les cinq pains et les deux poissons, il leva les yeux vers le ciel, les bénit, les rompit et il les donnait aux disciples pour les remettre à la foule. Ils mangèrent et furent tous rassasiés, et des morceaux restants on ramassa douze paniers ! » Lc 9, 11-17

Il me semble que là deux pistes (deux poissons ? ces poissons qu’on oublie si vite !...) nous sont offertes en ces temps de confinement.

La première piste nous rappelle que le Corps du Christ qui nous est actuellement inaccessible, ce n’est pas seulement le Pain de Vie, l’Eucharistie. “Nous sommes le Corps du Christ“, comme nous le chantons, et “chacun de nous est un membre de ce Corps“. Et cette présence-là, personne ne peut nous l’enlever ; elle est intérieure à nous-mêmes, comme à nos frères chrétiens.

Alors nous pouvons très bien travailler à la vitalité de ce Corps du Christ, dans notre confinement ; comment ? En prenant soin de chaque membre de son Corps, en s’inquiétant comme Jésus de leurs besoins les plus quotidiens : « Donnez-leur vous-mêmes à manger ! » « Faites-les s’étendre ! » J’accroche bien à ce Dieu, proche de nous et de nos soucis quotidiens, à ce Dieu qui vient s’asseoir à notre table, mais aussi qui nous ouvre les yeux sur ceux qui ont la faim au ventre.

Il y a aussi d’autres faims à combler : de quoi nourrissons-nous ensemble notre esprit et notre cœur ? Partageons-nous, dans ce Corps entre nous, ce qui est beau, de ce qui est source d’enthousiasme ou bien sommes-nous sans cesse à ressasser ce qui ne va pas, ce qui fâche ? Reprenons les remarques simples de l’évangile, où Jésus nous dit que manger un poisson ou un serpent, ça n’est pas équivalent. Entre nous, mangeons “bio“, et “bio“, ça veut dire “ ce qui vit“ !...

Etre ensemble davantage le Corps du Christ où chacun prend soin des autres, pour que rayonne la présence vivante de Jésus dans notre monde : c’est la première piste.

Et voici la seconde : A partir du texte de l’évangile, j’ai envie de tenter un jeu de mots et de comprendre autrement : « Donnez-leur vous-mêmes à manger ». Ce serait : “Donnez-leur à manger vous-mêmes”, c’est-à-dire devenez nourriture pour vos frères ; consacrez votre temps et vos initiatives à les nourrir, à combler leurs faims et leurs attentes. On voit bien alors comment cinq pains et deux poissons peuvent suffire pour lancer un mouvement que rien ne peut arrêter, s’il s’agit de se donner soi-même en nourriture pour que la foule entière puisse vivre.

D’ailleurs Jésus s’est impliqué dans ce partage ; il est le premier à s’être véritablement donné en nourriture : « Je suis le pain de vie… et ce pain que je vais donner, c’est ma chair pour la vie du monde ! » Jn 6,51. Il nous confie de continuer à nourrir son peuple : « Prenez et mangez-en tous … Faites ceci en mémoire de moi. » Lc 22,19. Devenir nourriture avec Jésus pour nos frères, entrer en partage avec tous, c’est la deuxième piste qui nous est possible aujourd’hui, et sans l’oublier demain, quand les choses seront redevenues plus simples. Ainsi, mise en perspective, on comprend mieux pourquoi Jésus a voulu se donner en nourriture. Il est celui qui veut combler les hommes par delà toutes leurs faims ; « qui mangera de ce pain vivra pour toujours ! » Jn 6,57.

Au centre de la prière que Jésus nous a laissée pour nous adresser à notre Père, il y a cette demande : « Donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour. » Ce n’est certes pas par hasard que cette demande est au centre, comme une charnière essentielle, indispensable : Elle nous rappelle que nous pouvons aussi être ce pain de vie pour nos frères. Belle tâche à metre en œuvre, avant de pouvoir ensemble le recevoir à nouveau.

Alain Patin



 


Au début d’une semaine Sainte

 

6 avril 2020 2020

Proposition de texte en 2 parties de Romain Murador, PO à Toulouse et Antoine Brethomé, PO à Bordeaux

Nous entrons dans une semaine qualifiée de sainte. Nous sommes invités à poser notre regard d’une manière plus intense sur le visage de Jésus de Nazareth : cet homme, d’abord accueilli triomphalement, puis trahi, bafoué, torturé, mis à mort, pour finalement paraître VIVANT...

Au début d’une semaine Sainte


 


Bas les masques

 

6 avril 2020 2020

Texte proposé par Bernard ROBERT, aumonier du MMTC, au 18ème jour de confinement de l’an 1 du coronavirus !

DES FAITS REELS :
-  Sur le tarmac d’un aéroport en chine, des millions de masques vont être embarqués pour la France qui les as commandés et payés…Mais les Américains sont là, qui payent cash, quatre fois le prix normal ! Les Chinois prennent l’argent….et les masquent prennent la route des USA !
-  Quelques jours plus tôt, sur un tarmac à Prague, des colis de masques sont descendus d’un avion en escale technique, alors qu’ils étaient destinés à un autre pays d’Europe qui les avait commandés ! La Tchéquie les a récupérés pour elle ! Solidarité Européenne ?
-  Mais dans les même temps, on reconnait sur les ondes radio et télé, que la France elle-même, a « réquisitionné » des masques venant de chine et qui étaient destinés à l’Italie et l’Espagne ; deux pays en pleine crise sanitaire autrement plus désastreuse que dans l’hexagone ! « réquisition » ou « détournement » ? Quelle est la différence ? Où est la solidarité Européenne ???

HEUREUSEMENT, nous constatons aussi de beaux gestes de solidarité toujours à propos de ces masques !
-  Des personnes privées, des collectivités locales, des entreprises, des communes ont apporté spontanément des milliers de masques dans les hôpitaux ou les EHPAD
-  Des entreprises ont accepté de changer leur production, des travailleuses et travailleurs se sont portés volontaires, pour fabriquer tous ces masques qui devraient être produits en France. !

OUI, NOUS SOMMES EN GUERRE :
-  Et comme dans toute guerre, l’Humain est capable du meilleur comme du pire ! Nous le voyons bien : Pendant que beaucoup de gens applaudissent le courage des travailleurs réquisitionnés (personnel soignant, éboueurs, chauffeurs, magasiniers et cie), d’autre (heureusement moins nombreux) rejettent et même expulsent ces mêmes soignants, en leur disant d’aller habiter en dehors de leur quartier ! Une HONTE !
-  Alors, comme dans toute guerre, il nous faut lutter,
o et dire : BAS LES MASQUES ! Faisons la vérité sur nous-mêmes, sur nos peurs, sur nos espoirs, sur nos projets de société ! Faisons révision de notre vie !
o et faire en sorte que « nous partions tous en guerre » contre le virus invisible qui s’appelle : « égoïsme personnel, catégoriel, national, européen »
o et dénoncer encore plus fort ce qui provoque ce virus, et qui s’appelle : » économie néo-libérale »
o et proclamer haut et fort , que l’Humain et la « Maison commune = Planète Terre » sont à placer au-dessus et en avant de toute économie, quelle quelle soit !

Bernard ROBERT au 18ème jour de confinement de l’an 1 du coronavirus !



 


Le dimanche des Rameaux

 

5 avril 2020 2020

Mt 21,1-11 (Rameaux) et Mt 26,14-27,66 (Passion de Jésus)
Alain Bubel, ce 2 avril 2020

Ce dimanche des Rameaux nous parle d’enthousiasme, de l’enthousiasme de la foi.
Que serions-nous sans ces soulèvements d’enthousiasme qui sont les temps forts de notre vie ?
Bien que nous connaissons que trop bien nos lenteurs et nos lourdeurs, il y a heureusement des projets qui nous emballent, une ardeur communicative qui nous rend tout feu tout flamme, une passion qui nous mobilise…

Oui, l’enthousiasme tient souvent à peu de chose : une rencontre, une cause juste à défendre, un sentiment d’injustice qui nous révolte.
Il faut certes se méfier des émotions passagères, superficielles ; irrationnelles. Elles ne sont souvent que feu de paille. Mais leur fraîcheur nous honore.
L’enthousiasme est une manière « d’être en Dieu ». Pensons à la foule du jour des Rameaux. A la rumeur de l’arrivée de Jésus, une immense espérance la saisit. Oubliant tout le reste, ils donneraient jusqu’à leur dernière chemise pour que survive l’espoir. Mais nous connaissons la suite : le retournement spectaculaire d’une foule qu’on a vite fait de manipuler ! Il y a des retombées décevantes qui n’enlèvent pourtant rien à la force de l’instant.
Avec l’ardeur du néophyte, Jésus arrive à Jérusalem, habité par la beauté du temple et le faste de la ville sainte, acclamé par une foule inhabituelle.
Il est rapidement déçu par les bruits d’argent autour du sanctuaire et le peu de respect des petites gens exploitées pour pouvoir offrir même un petit sacrifice. Il chasse les vendeurs du Temple. Sa déception se transforme en nouvelle ardeur : « Le zèle de ta maison me dévore ! ».

Oui, ce Christ est terriblement attachant dans son étonnante et inaltérable jeunesse.
On souhaiterait que son enthousiasme toujours nouveau habite encore aujourd’hui le cœur des croyants qui, palmes à la main, manifesteraient bruyamment leur fierté d’appartenir à un peule qui espère. Il nous fait penser aujourd’hui à tous ceux qui applaudissent ceux et celles qui se dévouent corps et âme pour soigner, guérir et donner vie et espoir.

Oui, un peu d’ardeur suffit pour réveiller les morts et donner à la Passion de la croix l’apport tonifiant d’une passion débordante pour l’humanité.
La Passion souffrante prend tout son sens dans cette passion d’une humanité à rassembler.
On souhaiterait qu’aucune femme, aucun homme ne soit brisé par la monotonie des jours et par l’usure du temps.

A l’exemple de Roger qui nous a quittés, d’A. son épouse qui ont tant donné à l’église de …, on aimerait que l’Eglise toute entière garde l’enthousiasme de ses commencements. IL y a comme un devoir d’enthousiasme en nos temps incertains. Ce fut le cas de Jésus en cette semaine « cruciale » qui l’a conduit du chemin de la croix à la splendeur du matin de Pâques.

Chers amis, si la nuit est si douloureuse, c’est que nous croyons à la lumière.



 


Confinement, jour 19

 

4 avril 2020 2020

Nous allons entrer en Semaine Sainte. Nous allons revivre, confinés, mais pas seuls, les uns unis aux autres, cette grande semaine où nous est redit quel amour Jésus a manifesté pour chacun d’entre nous, et par là, il nous révèle combien nous sommes précieux aux yeux du Père !...

« Ne vend-on pas cinq moineaux pour deux sous ? Et pas un d’entre eux n’est oublié devant Dieu ! Bien plus, les cheveux de votre tête sont tous comptés. N’ayez pas peur ; vous valez mieux que beaucoup de moineaux ! » Lc 12, 6-7.
Il y a une certaine coquetterie à se dévaluer aux yeux des autres et à ses propres yeux : je ne suis pas bon à grand chose ; je ne sais pas faire ; je n’y arriverai pas ! Tout cela dit, avec quelques arrière-pensées ; ce peut être un prétexte pour nous dispenser de nous engager ou bien comme un relent de mauvaise foi : certes, je suis nul, mais le peu que je fais est cependant quelque chose ! Fonctionnement à l’économie, sans ambitions.

Cette attitude ne répond pas au regard que Dieu porte sur nous, sur toi, sur moi. Lui est attaché à mettre en valeur le plus petit d’entre les hommes : « Vous valez mieux que beaucoup de moineaux ! » Toute la Bible témoigne de cette attention sans cesse réaffirmée : Dieu veut donner à tous une place, irremplaçable, et particulièrement à ceux qui sont rejetés aux marges, sans avenir. Il ne cesse de répéter : “Tu n’es pas rien, tu comptes beaucoup à mes yeux.” Et il y a des textes très forts pour exprimer la tendresse de Dieu. « Une femme oublie-t-elle l’enfant qu’elle nourrit ? Manque-t-elle de tendresse pour le fils de ses entrailles ? Même si une d’elles l’oubliait, moi, je ne t’oublierai pas. Regarde, j’ai gravé ton nom sur les paumes de mes mains. » Is 49,15-16

Cet amour débordant qui traverse les siècles est mis en œuvre pour le plus petit d’entre nous : certes, tu n’es pas rien pour être l’objet d’une telle attention. Il faut laisser pénétrer en nous le regard de Dieu sur nos vies pour en être renouvelés. Découvrir ce Dieu follement amoureux de la vie des hommes, tel que Jésus nous l’a révélé. S’étonner de ce Dieu qui guette le moindre souffle de vie pour lui donner vigueur et force. Communier à ce Dieu ambitieux pour chacun de ses enfants, qui ne se résigne pas à les voir mener une petite vie banale et sans fruits.

Et ce sont souvent les autres qui, par leurs attentes, me font sentir cette tendresse de Dieu. Ils comptent sur moi ; ils me sollicitent pour assumer une responsabilité ; ils me demandent de me dépasser pour répondre à leurs appels. Ils me bousculent, m’arrachent à ma torpeur et par là, me disent : “tu n’es pas rien ! Nous avons besoin de toi.”

Loin de fixer mon regard sur mes limites, sur mes faiblesses ou mon handicap, me voilà appelé à prendre appui sur ce qui me motive et à répondre avec ce que je suis, sans trop m’inquiéter des résultats, puisqu’on me fait confiance. Je ne sais pas si je suis qualifié pour cette tâche, mais les autres me le demandent ; ils m’aideront à en être capable. Et si finalement je ne sais pas faire, ce sera l’occasion d’en appeler d’autres à la rescousse, d’expérimenter qu’ensemble on n’est pas rien.

Alors, il faut tenter le premier pas ; personne ne pourra le faire à ma place ; c’est mon choix et ce choix me révélera que je ne suis pas rien, et qu’on peut grandir tout en restant petit, qu’on peut risquer même en restant fragile.

Parce qu’ils ont compris un jour qu’ils n’étaient pas rien, que d’autres attendaient qu’ils s’y mettent, beaucoup se sont levés et leur exemple m’aide à prendre le chemin, à me risquer à leur suite. Pour moi, c’est important de rencontrer ces témoins, de les écouter raconter leur histoire, de voir qu’elle ressemble à la mienne : François, Thérèse et tant d’autres, ceux que l’Eglise nous donne à voir et à suivre : ils sont saints, parce qu’ils ont laissé Dieu les renouveler par son amour.

Ils ont grandi par la confiance qu’un jour quelqu’un leur a manifestée. Ils ont découvert qu’ils avaient une place à tenir. Cette confiance reçue, ils ont su la redonner à d’autres. Ils se sont inscrits ainsi dans une longue suite de vivants ; ils sont devenus un peuple porteur de vie et source de renouvellement.

Si tu as senti un peu cette confiance qu’on est prêt à t’accorder, tu auras à cœur de la répercuter sur ceux que tu rencontres. Eux aussi, ils ne sont pas rien ; ils sont riches d’humanité. Ce n’est pas parce que certains ont été relégués au dernier rang qu’ils manquent de l’essentiel, c’est-à-dire de cœur.
Voici la grande Semaine, décisive pour Jésus et comme dit l’évangile : « Il prit résolument le chemin de Jérusalem. » Ce chemin, il le savait, serait celui de la croix, mais plus encore celui de l’amour, celui de la vie triomphante ! Sûrs de cet amour, nous voilà invités à répondre résolument à l’appel que notre Père nous adresse, si petits que nous soyons : “Suis-moi ; j’ai besoin de toi !...“

Alain Patin
alain.patin chez libertysurf.fr



 


Je reste à la maison Seigneur

 

3 avril 2020 2020

Prière d’un prêtre italien en quarantaine dont le frère prêtre est mort du covid-19

Je reste à la maison, Seigneur ! Et aujourd’hui, je m’en rends compte, tu m’as appris cela, demeurant obéissant au Père, pendant trente ans dans la maison de Nazareth, en attente de la grande mission.

Je reste à la maison, Seigneur, et dans l’atelier de Joseph, ton gardien et le mien, j’apprends à travailler, à obéir, pour arrondir les angles de ma vie et te préparer une œuvre d’art.

Je reste à la maison, Seigneur ! Et je sais que je ne suis pas seul parce que Marie, comme toute mère, est dans la pièce à côté, en train de faire des corvées et de préparer le déjeuner pour nous tous, la famille de Dieu.

Je reste à la maison, Seigneur ! Et je le fais de manière responsable pour mon propre bien, pour la santé de ma ville, de mes proches, et pour le bien de mon frère, que tu as mis à côté de moi, me demandant de m’en occuper dans le jardin de la vie.

Je reste à la maison, Seigneur ! Et dans le silence de Nazareth, je m’engage à prier, à lire, étudier, méditer, être utile pour les petits travaux, afin de rendre notre maison plus belle et plus accueillante.

Je reste à la maison, Seigneur ! Et le matin, je te remercie pour le nouveau jour que tu me donnes, en essayant de ne pas la gâcher et l’accueillir avec émerveillement, comme un cadeau et une surprise de Pâques.

Je reste à la maison, Seigneur ! Et à midi, je recevrai la salutation de l’ange, je me rendrai utile pour l’amour, en communion avec toi qui t’es fait chair pour habiter parmi nous ; et, fatigué par le voyage, assoiffé, je te rencontrerai au puits de Jacob, et assoiffé d’amour sur la Croix.

Je reste à la maison, Seigneur ! Et si le soir me prend la mélancolie, je t’invoquerai comme les disciples d’Emmaüs : reste avec nous, le soir est arrivé et le soleil se couche.

Je reste à la maison, Seigneur ! Et dans la nuit, en communion de prière avec les nombreux malades, les personnes seules et tous les soignants, j’attendrai l’aurore pour chanter à nouveau ta miséricorde et dire à tout le monde que, dans les tempêtes, tu as été mon refuge.

Je reste à la maison, Seigneur ! Et je ne me sens pas seul et abandonné, parce que tu me l’as dit : je suis avec vous tous les jours. Oui, et surtout en ces jours de confusion, ô Seigneur, dans lesquels, si ma présence n’est pas nécessaire, je vais atteindre chacun, uniquement avec les ailes de la prière.

Amen.



 


Confinement, jour 16

 

1er avril 2020 2020

« Jésus enseignait dans une synagogue un jour du sabbat. Il y avait là une femme habitée depuis dix-huit ans par un esprit qui la tenait infirme ; toute courbée, elle était bien incapable de se redresser. La voyant, Jésus l’appela et lui dit : "Femme, tu es libérée de ton infirmité" ; et il lui imposa les mains. Et, aussitôt, elle se redressa, et elle acclamait Dieu. En réaction le chef de la synagogue fut indigné parce que Jésus avait fait une guérison lors du sabbat et il dit à la foule : "Il y a six jours pour travailler ; venez donc ces jours-là vous faire soigner, et non pas le jour du sabbat !" Mais le Seigneur lui répondit : "Comédiens ! chacun de vous, lors du sabbat, ne détache-t-il pas de l’étable son bœuf ou son âne pour le mener boire ? Par contre, cette fille d’Abraham, que Satan a enchaînée voici dix-huit ans, il ne fallait pas la délivrer de ce lien le jour du sabbat !" Comme il disait cela, tous ses adversaires étaient remplis de honte et toute la foule était dans la joie de toutes les merveilles qu’il accomplissait. » Lc 13, 10-17.

Ici, c’est le masque qui est dénoncé, se retrancher derrière un masque, et ici particulièrement le masque de la religion. Le chef de la synagogue affiche de beaux sentiments religieux : il se montre soucieux de respecter le repos du septième jour ! Mais Jésus n’y voit qu’un prétexte abominable. Prétexter servir Dieu en fermant les yeux devant celui ou celle qui a besoin : quelle comédie ! Jésus, débusque les faux-fuyants, les demi-mesures, les accommodements, la comédie que nous nous jouons à nous-mêmes et aux autres. Franchement je n’aime pas être ainsi secoué, car je vis dans l’à peu près, pas foncièrement mauvais, pas totalement bon, toujours un peu entre les deux !
Est-ce que Jésus voudrait me culpabiliser, me donner mauvaise conscience ? Au contraire, la parole vigoureuse qu’il m’adresse est une marque de confiance. S’il me croyait incapable de l’entendre et de la suivre, est-ce qu’il continuerait à lancer son appel ? Malgré mes médiocres réponses, il le renouvelle sans se lasser. C’est le signe d’un amour exigeant, comme tout véritable amour.

Face à la comédie que nous cherchons parfois à jouer, Jésus nous partage ses quatre vérités : vérité sur nous, vérité sur le monde dans lequel nous vivons, vérité sur la communauté de croyants que nous formons, vérité sur Dieu lui-même.
Sur nous, Jésus met en lumière une double vérité. Sans nous accabler, il nous révèle que nous sommes pécheurs, solidaires de tout péché et désespérément faibles, mais en même temps que nous sommes aimés follement et gratuitement par Dieu. Il nous invite à faire de ces deux éléments les points de départ d’une vie nouvelle. Refuser cette vérité sur nous, refuser cette solidarité avec les pécheurs, c’est non seulement se faire illusion, mais c’est se mettre en dehors du salut. Car, si nous sommes sans fautes, sans compromissions, alors pourquoi un Sauveur ? Nous n’en avons nul besoin ! Et si nous sommes sans fautes, sans compromissions, alors pourquoi accueillir les autres ? Nous pouvons les juger, les condamner, les exclure, refuser d’y voir des frères à fréquenter ou à porter solidairement, nous cacher sous le masque du juste : « Je te remercie, Dieu, de ce que je ne suis pas comme les autres hommes, qui sont voleurs, malfaisants, adultères ou comme ce publicain ! » Lc 18,11.
Mais au-delà de nous, Jésus nous propose de faire la vérité sur le monde dans lequel nous vivons. Les mécanismes qui le régissent sont-ils au service des hommes ou bien prennent-ils la place de Dieu, en voulant imposer un ordre supérieur ? Le monde de la finance et de l’économie n’est pas Dieu et s’il se prétend ce veau d’or devant qui tous devraient se courber, s’il rêve d’être reconnu pour le sauveur universel, on voit bien aujourd’hui quelle idole pitoyable il se montre. Le message évangélique nous redit qu’il n’y a pas d’ordre possible, si on ne place pas le plus petit, l’enfant, le malade, l’exclu au centre des préoccupations, si on ne donne pas aux plus pauvres, aux plus démunis la place principale. Toute autre répartition des rôles entraîne tôt ou tard le chaos ou la folie : n’est-ce pas ce à quoi nous assistons ?
Jésus invite aussi son Eglise à faire la vérité sur elle-même. Où se situe son dynamisme ? Une tension doit l’habiter, à la fois toute à l’écoute de son maître et sans cesse envoyée pour porter la Bonne Nouvelle. Elle, non plus, ne peut pas se prendre pour le but ; elle n’est pas le Sauveur ; toute son activité est de le faire découvrir et de donner les moyens de le rejoindre. Chaque fois qu’elle se prend pour le but, réclamant pour elle respect et honneur, sous prétexte d’honorer son Dieu, elle déroule un chemin d’infidélité et elle perd son dynamisme. Comment être fidèle au Crucifié et vouloir occuper des postes de pouvoir ? Sa vérité est ailleurs, dans l’humble témoignage qu’elle donne, lorsqu’elle manifeste la tendresse de Dieu pour les plus petits et qu’elle se dépense pour faire entendre à tous dans leurs langues les merveilles de son Sauveur.
Car finalement il y va de la vérité sur Dieu. Dieu n’appartient à personne, pas même à la communauté qui se réclame de lui. En Jésus, Dieu a manifesté qu’on ne peut pas l’accaparer. Au contraire, c’est lui qui nous saisit et nous mène sur des chemins autres que ceux que nous aurions choisis. Il nous partage des projets ambitieux qui ne sont pas les nôtres et qui nous arrachent à nos conceptions étroites. C’est lui, le Sauveur, et il nous sauve par sa différence, parce qu’il nous emmène sur des chemins vraiment nouveaux, que nul autre ne pourrait nous ouvrir. La vérité est donc que Dieu n’est pas une idole que nous pourrions amadouer, manipuler et mettre à notre service. Dieu est un inclassable qui nous entraîne dans une aventure formidable et bien plus exaltante que nos projets à courte vue.
Vivre en vérité, c’est vivre sans masques, acceptant de recevoir notre salut, notre vie, de Celui qui nous appelle sans cesse au dépassement et à un amour qui ne connaît pas de limites.
Alain PATIN



 


C’était en mars 2020

 

31 mars 2020 2020

Les rues étaient vides Les magasins fermés
Les gens ne pouvaient plus sortir

Mais le printemps ne le savait pas
Et les fleurs ont commencé à fleurir,
Le soleil brillait,
Les oiseaux chantaient Les hirondelles allaient bientôt arriver
Le ciel était bleu
Le matin arrivait plus tôt

C’était en mars 2020
Les jeunes devaient étudier en ligne
Et trouver des occupations à la maison
Les gens ne pouvaient plus faire de shopping
Ni aller chez le coiffeur
Bientôt il n’y aurait plus de place dans les hôpitaux
Et les gens continueraient à tomber malades

Mais le printemps ne le savait pas
Le temps d’aller au jardin arrivait
L’herbe verdissait

C’était en mars 2020
Les gens ont été mis en confinement
Pour protéger grands-parents Famille et enfants Plus de réunion ni de repas, ni de fête en famille
La peur était devenue réelle
Et les jours se ressemblaient

Mais le printemps ne le savait pas
Les pommiers, les cerisiers et autres ont fleuri
Les feuilles ont poussé

Les gens ont commencé à lire Jouer en famille Apprendre une langue
Aux fenêtres, ils frappaient des mains le soir à 20h
Pour remercier et encourager tous les soignants
Et ils encourageaient leurs voisins à le faire
Ils se sont montrés solidaires
Et se sont concentrés sur d’autres valeurs
Les gens ont réalisé l’importance de la santé
Le monde s’était arrêté
L’économie dégringolait

Mais le printemps ne le savait pas
Les fleurs ont laissé la place aux fruits
Les oiseaux ont fait leur nid
Les hirondelles étaient arrivées

Puis le jour de la libération est venu
Les gens l’ont appris à la télé
Le virus avait perdu
Les gens sont descendus dans la rue Ils chantaient, ils pleuraient Ils embrassaient leurs voisins
Sans masques ni gants

…Et c’est là que l’été est arrivé !

Parce que le printemps ne savait pas
Il a continué à être là malgré tout
Malgré le virus, la peur, la souffrance et la mort

Parce que le printemps ne le savait pas,
Il a appris aux gens le pouvoir de la Vie

Tout va bien se passer Restez chez vous, protégez-vous
Et vous profiterez de la vie

Restez amoureux de la vie !



 


Confinement, jour 12

 

28 mars 2020 2020

Certes, on pourrait éviter de regarder les choses en face, mais la situation actuelle, sans la prendre au tragique, nous présente jour après jour un bilan des personnes mortes qui va grandissant. Serait-il vraiment sérieux de faire comme s’il n’en était rien ? Cela nous rappelle à tous qu’un jour ou l’autre, chacun se retrouvera ainsi, comme Jésus, à la neuvième heure : comment vivre cette heure-là ?

« C’était déjà la sixième heure (midi) et l’obscurité survint sur toute la terre jusqu’à la neuvième heure, le soleil ayant disparu. Le voile du Temple se fendit par le milieu. Jésus poussa un grand cri et dit : “Père, en tes mains je remets mon esprit.” Et dans ce cri, il expira. Voyant ce qui s’était passé, le centurion rendait gloire à Dieu en disant : “C’est sûr : cet homme était juste.” Lc 23,44-47.
Etre vrai, être humain, suppose de savoir affronter cette réalité de la mort avec courage. La mort, celle de ceux que nous aimons, nos proches, ou notre mort - un jour - fait partie paradoxalement de ce qui nous est donné de vivre. Vouloir l’évacuer ne paraît pas très réaliste. Un jour ou l’autre, elle s’imposera sans crier gare. Autant la regarder en face dès maintenant.

Comment d’abord ne pas reconnaître que la mort est une réalité de tous les instants, même quand il n’y a pas de pandémie ? Sur la planète terre, avec ses sept milliards d’êtres humains, elle frappe à chaque seconde et par milliers ; elle est aussi présente que la vie. Nous sommes pris dans un grand brassage qui mêle mort et vie à l’infini. C’est une donnée permanente de notre univers. Ce n’est pas un accident, quelque chose qui n’arriverait qu’aux autres, par hasard et malheureusement. Vie et mort rythment notre existence humaine et, au-delà de nous, tout ce qui existe. Cela nous est rappelé un peu vivement ces jours-ci.

Par delà le drame que comporte toute mort, drame qui vient d’un arrachement, d’une rupture, d’un amour brisé, il y a à découvrir une mystérieuse fécondité. D’ailleurs c’est ainsi que Jésus voyait sa mort, et peut-être toute mort : « En vérité, en vérité, je vous le dis : si le grain de blé jeté en terre ne meurt pas, il reste seul ; si au contraire il meurt, il porte beaucoup de fruits. » Jn 12,24.

Ainsi le message chrétien nous invite à découvrir dans la mort un chemin d’initiation, d’apprivoisement. Paul nous présente le baptême (et le baptême est une réalité à vivre chaque jour pour le chrétien) comme une sorte de passage mimé à travers la mort pour déboucher dans une vie nouvelle. Le baptême représente symboliquement, mais consciemment et volontairement, l’acceptation de mourir à ma vie, pour m’ouvrir et recevoir une vie nouvelle, riche d’un avenir inconcevable. J’accepte de mourir avec le Christ pour renaître avec lui, pour recevoir de lui une vie autre, différente. Dans le baptême s’opère comme une transplantation, où je suis greffé sur le Christ. C’est en lui, en sa parole, que désormais je puise ma vie et non plus en moi. C’est un pari risqué et formidable : je crois que la vie qu’il m’offre est infiniment supérieure à celle dont je jouis actuellement et que, de toutes façons, un jour, je ne pourrais plus retenir.

Luc ajoute qu’il faut prendre sa croix chaque jour et suivre le Christ. En effet, et c’est là un autre moment de l’apprivoisement, ce chemin paradoxal nous est proposé quotidiennement. Tous les jours, mourir pour vivre, placer ce risque au coeur de son existence, l’accepter consciemment comme rythme vital, renouer tous les jours avec lui. Autrement dit, c’est vivre délogé de soi-même à la manière de Jésus, vivre en référence au Père, accueillir son Esprit. C’est le pari de l’amour, comme l’expriment les amoureux : “tu es ma vie, tu me fais vivre ; sans toi, ma vie n’a plus de sens, …“ Quotidiennement un choix m’est proposé : consentir à mourir à ce que je suis devenu pour m’ouvrir, avec le Christ, à de nouvelles aventures. Ainsi la mort quotidienne devient l’aiguillon de la vie et elle est donc vaincue comme impasse.

Jésus, dans l’évangile de Luc, au plus noir de la mort, dans l’obscurité totale, lance un cri de confiance : « Père, en tes mains je remets mon esprit. » La mort est là, mais Jésus continue de croire en Celui qu’il aime : il attend de lui une suite à son aventure d’homme. Pour nous aussi viendra l’heure de la mort ; pour un instant, elle fera l’obscurité totale ; tout s’éteindra, sans apparemment pouvoir se rallumer ; mais cela ne sera pas vraiment d’une autre nature que la mort que nous avons à vivre quotidiennement. Il faudra alors renouveler le pari de l’amour : croire que Dieu détient pour nous le secret de la vie, croire qu’il est vraiment Père, source de toute vie, une dernière fois lui faire confiance. Entraîné quotidiennement à faire ce passage, comment ne pas bondir dans la vie par delà toute mort ?

C’est le moment d’évoquer la petite musique de François d’Assise, l’amoureux de toute vie, qui célébrait « notre soeur la terre, notre frère le soleil et notre soeur la pluie » ; il n’hésitait à s’adresser aussi à « notre soeur la mort » : « Béni sois-tu, oui, béni sois-tu pour notre soeur la mort, car cette mort ouvre la vie depuis que ton Fils Jésus l’a prise et piégée sur la croix, depuis qu’il est tombé en terre, et qu’il rapporte plus de cent pour un et nous greffe à son Corps. »

Salut les confinés !...
Alain Patin
alain.patin chez libertysurf.fr



 


Prière

 

27 mars 2020 2020

Prière proposée par Jean-Claude Lemaitre
https://st-augustin-rennes.fr/2020/03/17/priere-proposee-par-jean-claude-lemaitre/

Prière
Jésus-Christ, tu es passé par les villes et les villages « guérissant toute maladie et toute infirmité parmi le peuple. » À ton ordre, les malades ont été guéris. Viens à notre aide maintenant, au milieu de la propagation mondiale du coronavirus, pour que nous puissions ressentir ton amour curatif.
Guéris ceux et celles qui sont malades avec le virus. Qu’ils retrouvent leur force et leur santé grâce à des soins médicaux de premier ordre.
Guéris-nous de la peur, qui empêche les nations de travailler ensemble et les voisins de s’aider mutuellement.
Guéris-nous de notre orgueil, qui nous cause de prétendre d’être invulnérable devant une maladie qui ne connaît pas de frontière.
Jésus-Christ, tu es passé par les villes et les villages « guérissant toute maladie et toute infirmité parmi le peuple. » À ton ordre, les malades ont été guéris.
Jésus-Christ, guérisseur de tous, reste à nos côtés en cette période d’incertitude et peine.
Sois avec tous ceux et celles qui ont succombé au virus. Qu’ils reposent avec toi dans la paix éternelle.
Sois avec les familles de ceux et celles qui sont malades ou décédés. Alors qu’elles s’inquiètent et pleurent, garde-les de la maladie et du désespoir. Qu’elles ressentent ta paix.
Sois avec les médecins, le personnel infirmier, les chercheurs et tous les professionnels de la santé qui cherchent à soigner et à guérir les malades, alors qu’ils risquent l’infection par leurs travaux. Qu’ils ressentent ta paix.
Sois avec les dirigeants de toutes les Nations. Donne-leur la prévoyance d’agir avec charité et un véritable intérêt pour le bien-être des peuples qu’ils sont destinés à servir. Donne-leur la sagesse d’investir les ressources dans des solutions durables qui aideront à prévenir ou à empêcher les épidémies futures. Qu’ils ressentent ta paix, alors qu’ils travaillent ensemble afin d’établir la paix sur Terre.
Que nous soyons ici ou à l’étranger, entouré par beaucoup ou peu de gens souffrant de cette maladie, Jésus-Christ, reste avec nous alors que nous te prions et t’implorons de nous donner la force de garder foi et espérances. En ces temps d’anxiété, donne-nous la paix.
Jésus-Christ, guéris-nous.

https://st-augustin-rennes.fr/2020/03/17/priere-proposee-par-jean-claude-lemaitre/



 


Psaume pour les soignants

 

26 mars 2020 2020

Prière réalisée par la Mission Ouvrière du diocèse de Lille

Seigneur,

Merci d’avoir semé dans le cœur de certains Le don, le talent et la force de prendre soin. Ce désir étonnant de remettre debout Ceux que la maladie avait mis à genoux.

De celui qui nettoie à celle qui opère, De celle qui rassure à celui qui transfère. Tu as placé dans le cœur des soignants Un trésor plus précieux que l’or et l’argent.

Mon Dieu, bénis ceux qui jour après jour Affrontent la souffrance avec tant de bravoure. Maudis les puissants qui depuis des années Sur l’autel de l’argent les ont tous sacrifiés.

Donne à nos soignants la force de tenir Contre cette épidémie dont nous craignons le pire. Donne à chacun de nous d’agir avec raison Pour ne pas rendre impossible leur mission.

Que cette épreuve soit une prise de conscience, Que leurs cris d’hier étaient plein de bon sens. Aujourd’hui, chacun d’eux est pour nous un exemple. Demain, nous chasserons les marchands du temple.



 


Message de l’ACO de l’Orne

 

25 mars 2020 2020

En ces temps difficiles, l’Action Catholique Ouvrière de l’Orne (ACO), tient à exprimer son extrême solidarité avec toute la population et spécialement ceux et celles d’entre nous qui sont les plus impactés par cette épidémie du COVID-19.

En ces temps difficiles, l’Action Catholique Ouvrière de l’Orne (ACO), tient à exprimer son extrême solidarité avec toute la population et spécialement ceux et celles d’entre nous qui sont les plus impactés par cette épidémie du COVID-19.
Nous pensons bien sûr aux malades, et parmi eux, les plus gravement atteints mais aussi à cette foule de soignants qui se dévoue jour et nuit au service de leurs frères et sœurs souffrants. Nous pensons également aux plus pauvres, aux plus âgés, aux plus isolés pour qui ce fléau représente un danger encore plus grand et tout spécialement les sans-abris.
Nous rejoignons ceux qui déjà ont appelé chacun et chacune à un maximum d’attention, de compassion et de solidarité. Chacun, à sa mesure, peut agir : aider les voisins en difficulté pour faire les courses, contacter par téléphone les personnes hospitalisées ou en EHPAD qui vivent cruellement cet isolement contraint, rester en contact les uns avec les autres par email ou sur les réseaux sociaux. Ces outils de communication, tellement décriés d’ordinaire (et parfois à juste titre), utilisons-les enfin pour exprimer une vraie fraternité.
Soyons attentifs à soutenir celles et ceux qui, en cette période, ont à vivre un deuil et qui subissent les restrictions en cours quant aux obsèques de leur défunt (*) ; défunt dont ils n’ont pas pu, souvent, accompagner les derniers instants, compte tenu des circonstances.
Dans une lettre au Premier ministre, le Secours Catholique-Caritas France, par sa présidente, Véronique Fayet, rappelle l’importance d’accorder une attention particulière aux plus fragiles dans cette période et fait des propositions au Gouvernement pour venir en aide à ces publics. (**) D’autres associations se mettent au service des plus précaires. Des représentants du personnel, comme chez Renault, PSA, veillent à ce que les exigences en matière de protection sanitaire des travailleurs soient respectées. Frères et Sœurs en ACO, restons unis dans la prière pour tous ceux-là en n’oubliant pas ceux qui ont choisi de continuer leur travail dans les commerces, les usines et les différents services pour assurer l’essentiel de ce dont nous avons besoin pour traverser cette crise avec les risques que cela comporte.
Demeurons prudents et disciplinés, quoiqu’il nous en coûte et surtout, autant que possible, gardons une forme d’humour partagé qui, au-delà de tout, aidera chacun à surmonter les épreuves présentes et à venir.
En toute fraternité.
Le Comité diocésain ACO de l’Orne :
Thierry, Lionel, Emmanuelle, Nicole, Christian



 


Malgré le Covid 19..vivre le carême 20

 

25 mars 2020 2020

Texte ACO de Laval

Beaucoup de belles rencontres étaient prévues ces jours-ci, avec les amis sourds à Laval, avec des personnes en ACO ( Action Catholique Ouvrière) travaillant en ESAT, des célébrations dominicales ou en semaine, une soirée intergénérationnelle de prière etc… et voilà, tout est supprimé !!! …Jusqu’à nouvel ordre



 


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