ACO France - Action catholique ouvrière
https://acofrance.fr/spip.php?page=imprimer_rubrique&id_rubrique=23

Témoins



Un couple engagé : Raymond et Manette

 

5 janvier 2024 par Jean-François Courtille

« Entre, tu es ici chez toi ! »… C’est ainsi que Raymond et Manette accueillent, rayonnants et les bras ouverts, celui ou celle qui frappe à leur porte. Arrivés de Moselle dans le Perche en 2018 pour se rapprocher de leurs enfants, ils ont très vite tissé des liens avec leur voisinage et rejoint l’équipe d’Action catholique ouvrière locale.

Né au Luxembourg en 1938, Raymond arrive en France dès l’âge de deux ans. Fils d’ouvrier – son père travaillait dans les mines de fer de l’ARBED* - il y entre à son tour à 14 ans comme apprenti. Devenu ajusteur-mécanicien, il y restera jusqu’à sa retraite. Seule consigne paternelle dès le départ : « Tu prends ta carte au syndicat (la C.G.T.) et quand les copains votent la grève, tu suis le mouvement ! ». Cette consigne fut bien respectée.

Une histoire d’amour qui naît au sein de la JOC

Benjamin d’une famille de huit enfants, Raymond grandit dans la tradition religieuse de l’époque. Au retour de 28 mois d’armée - il a 22 ans - un prêtre, Henry Cossart, le prend en stop et lui propose de rejoindre le foyer local des Jeunes où se réunit la Jeunesse ouvrière chrétienne. Il se rend alors à une première réunion publique organisée par ce mouvement. Le thème : « Comment organiser nos loisirs et partir en vacances ? »
Nés en 1942 en Meurthe-et-Moselle, Manette et son frère jumeau viennent doubler la fratrie. Manette n’a que trois ans lorsque son papa, mineur lui aussi, décède. Son certificat d’étude en poche, elle deviendra employée de maison. A 18 ans, Manette adhère, elle aussi, à la JOC. C’est là qu’elle entrevoit la possibilité de devenir éducatrice. Elle le sera… jusqu’à son mariage.
En 1964 la JOC organise à Strasbourg le Rallye européen où sera proclamé le Statut du « jeune travailleur » en Europe. Parmi les 30 000 jeunes rassemblés au stade de la Meinau : Raymond et Manette. L’événement fera naître dans le cœur de nos deux tourtereaux des idées de « programme commun ». Ils se marient en 1968 et auront deux enfants. Ils rejoignent l’ACO de Villerupt.

Un goût commun pour la solidarité

Tous deux partagent le goût de la solidarité, d’avancer ensemble, tous ensemble ! D’où leur engagement au CCFD-Terre solidaire, dans la vie associative et celle de la cité – Consommation Logement Cadre de Vie (CLCV), Amnesty international et parents d’élèves pour Manette, conseil municipal (six mandats sur trois communes), pour Raymond.
En 2022, le CCFD du Perche accueille Toavina, un partenaire CCFD-Terre solidaire de Madagascar. Nos deux amis se portent aussitôt volontaires pour l’héberger durant cinq jours… Qu’importe la fatigue ! On verra également Raymond, alerte, aux manifestations percheronnes contre la réforme des retraites.
La désespérance que provoque le chômage, les fins de mois difficiles qui poussent une certaine jeunesse à détruire ce qui lui est essentiel, les inquiètent. « Une seule réponse : continuer à s’engager dans les syndicats et en ACO ! », disent-ils.

L’Action catholique ouvrière du Perche se nourrit de l’éternelle jeunesse du cœur dont ils témoignent. Merci, Raymond et Manette, pour la sagesse, la paix et l’humour qui vous habitent et que vous partagez si bien.

Thierry Dubois

* Aciéries Réunies de Burbach-Eich-Dudelange.



 


« Le regard humain de l’ACO nous a fait du bien »

 

27 octobre 2023 2023 par Jean-François Courtille

Patrick Brun, avec Vincent Labrousse, Yann Augras et d’autres, fut l’un des leaders syndicaux de l’entreprise GM&S de la Souterraine dans la Creuse(23)* qui a conduit avec les salariés.es une lutte homérique face aux pouvoirs publics, à Renault et Peugeot, pour maintenir et développer leur entreprise. Une lutte, pour partie victorieuse, qui se poursuit aujourd’hui à travers les décisions de justice. Il relit pour nous le soutien que lui ont apporté les militants.es ACO du diocèse de Limoges.

« La première fois que nous avons vu venir les militants chrétiens de la Mission Ouvrière, via l’ACO, pour nous soutenir, nous avons été surpris. Agréablement surpris. Puis, chaque visite, chaque partage nous faisait non seulement plaisir, mais nous réconfortait malgré notre humanité blessée par cette volonté de casse industrielle ». Ainsi s’exprime sans détour et posément Patrick Brun, ancien GM&S, président du Comité Social et Economique de l’équipementier automobile LSI, le repreneur du site de La Souterraine, et délégué syndical CGT.

La lutte a révélé des personnalités

Le militant se veut aussi un homme de foi adepte, entre autres, du pèlerinage de Magnac Laval pour la Pentecôte. « Vous savez, poursuit-il, nombre d’entre nous priait. J’ai vu des personnes, auxquelles je ne pensais pas, se mettre debout. Nous avons été surpris de découvrir des intelligences cachées émerger et se mettre au service du collectif, des plus fragilisés. Malgré la dureté de la lutte des personnalités se sont révélées ».

Un témoignage chrétien émancipateur

Quant aux visites et aux partages avec les militants.es ACO « leur présence humble, leurs échanges, nous ont aidés à réfléchir sur notre lutte. Leurs expériences spirituelles et leurs regards humains nous ont accompagnés et fait du bien ». La visite de Mgr Bozo sur le site industriel fut aussi une belle surprise pour un bon nombre d’entre eux. « Son écoute bienveillante des témoignages de vies, des réalités complexes de l’entreprise et les échanges qui s’ensuivirent en ont étonné positivement plus d’un » témoigne-t-il. Il faut dire que la présence, durant des années, de prêtres ouvriers a marqué les esprits, y compris parmi les non croyants, d’un témoignage chrétien émancipateur au plus près de la vie de ces salariés.

Pour ceux qui s’interrogent sur la dimension supposée contradictoire d’être chrétien et engagé syndical, Patrick Brun témoigne : « Jésus Christ a sa place dans mon cœur et dans mes prières. Lutter pour le respect de la dignité humaine fait partie de la vie et de ma foi ».

Jean Philippe TIZON
Diacre permanent
Animateur du comité diocésain de l’ACO

* « Témoignage ACO » a relaté à maintes reprises dans ses colonnes la lutte et les partages de ces salariés.es.
* Article paru pour partie dans l’édition diocésaine « Le Sillon »

Illustration : Patrick Brun



 


Enseignant et citoyen du monde

 

30 août 2023 2023 par Jean-François Courtille

Guillaume Hoibian, 56 ans, est professeur d’histoire et géographie dans un lycée de Seine-Saint-Denis. Responsable du SNES dans son lycée, il milite au Réseau Education Sans Frontières et participe au Collectif Pour une histoire de l’UNEF !

« Je n’imagine pas une vie sans engagement au service des autres ». De l’UNEF* et la FRUF** au SNES*** et au Réseau Education Sans Frontières, en passant par le Parti communiste et l’UEC****, Guillaume a un riche parcours militant. Installé avec son épouse à Fontenay-sous-Bois (94), père de 2 enfants, il enseigne l’histoire et la géographie au lycée Flora Tristan de Noisy-le-Grand (93). « Un établissement passionnant avec une population mixte au plan social ». Guillaume Hoibian est responsable du SNES dans son lycée. Il a fait grève et manifesté contre la réforme des retraites. Il s’investit avec ses collègues dans le Réseau Education Sans Frontières. « Nous aidons les élèves sans papiers qui le souhaitent : aller avec eux à la sous-préfecture, rédiger des courriers… Un engagement concret qui produit souvent de bons résultats ». Mais Guillaume scrute avec inquiétude la future Loi Asile et Immigration.

Une histoire familiale militante

Guillaume Hoibian est le fils d’un pasteur ouvrier de l’Eglise réformée de France, devenue l’Église protestante unie de France, aumônier de prison, co-fondateur de l’ARAPEJ***** et de la FARAPEJ. Sa mère, cadre infirmière, a été directrice de maison de retraite dans la Drôme. Elle a milité un temps au Parti socialiste. Sa sœur militait au sein de la Jeunesse communiste. « Ce contexte familial a été stimulant. J’ai adhéré au Parti communiste en 1986 après avoir passé mon Bac. Je ne suis pas croyant mais je m’intéresse à la religion ». Guillaume s’inscrit en droit à l’université de Nanterre. Il est logé à la cité universitaire du campus. Il rejoint aussi l’UNEF, la FRUF puis l’UEC et participe au mouvement de décembre 1986 contre le projet Devaquet. « Une expérience militante extraordinaire, formatrice ». En 1988, il devient responsable national de la FRUF et entre au bureau national de l’UNEF. Il s’installe dans la résidence universitaire d’Antony. « Nous avons organisé une grève des loyers et gagné la rénovation d’une partie de la Cité U de Nanterre ». En 1990 il part au service militaire. A son retour Guillaume reprend des études d’histoire à Paris I. Il décroche sa maîtrise puis réussit le CAPES. Il quitte le PC en 1994 mais garde une sensibilité de gauche.

Passionné par son métier

Il enseigne 1 an dans un collège puis est affecté dans un lycée de Noisiel. « J’ai ensuite passé 16 ans au lycée Van Dongen à Lagny-sur-Marne. C’est là que j’ai adhéré au SNES ». Enfin, il postule pour le lycée Flora Tristan où il travaille aujourd’hui. « Je suis passionné par mon métier d’enseignant ». En 2021, il est recontacté par des anciens de l’UNEF ex-Renouveau à l’occasion des 40 ans de la fondation du syndicat. Il participe depuis au Collectif Pour l’Histoire de l’UNEF !, préparant un livre avec Frédérick Genevée aux éditions Arcane 17. « Le Collectif recueille les archives du syndicat, dispersées après la fusion des 2 UNEF. J’ai ainsi revu ou découvert des anciens et anciennes et surtout refait de l’histoire en explorant les archives ». Guillaume Hoibian se définit comme un humaniste engagé : « j’essaie de réfléchir aux défis qui se posent à nous aujourd’hui ».

Jean-François Courtille

*Union Nationale des Etudiants de France
**Fédération des Résidences Universitaires de France
***Syndicat National des Enseignants de Second degré
****Union des Etudiants Communistes
*****Association Réflexion Action Prison et Justice. La FARAPEJ est la fédération nationale des ARAPEJ



 


Guillaume Warmuz du stade de foot à l’aumônerie de l’hôpital

 

12 juillet 2023 2023 par Jean-François Courtille

Guillaume Warmuz, ancien gardien de but de Lens, Marseille, Monaco, Arsenal et Dortmund est aujourd’hui aumônier de trois EHPAD sur Le Creusot.

Témoin 608


 


Paul, militant à ATD Quart Monde

 

21 décembre 2022 2022 par Jean-François Courtille

Ingénieur dans l’industrie cosmétique, Paul Maréchal s’est engagé comme volontaire permanent avec l’association ATD Quart Monde. Une expérience qui lui a fait découvrir les talents et l’humanité des personnes les plus pauvres.

« Viens et suis-moi ». Cette phrase de Jésus au jeune homme riche a été comme un électrochoc pendant mes études d’ingénieur. Elle m’a mis devant une forme de responsabilité, un choix qui a orienté toute ma vie. « Te suivre, certes, mais pour aller où ? » : mes années d’école m’ont permis de découvrir des engagements très divers : cours en prison, soutien scolaire, scoutisme, puis je suis parti 2 ans comme professeur au Cameroun.

L’intelligence des personnes vivant la pauvreté

En rentrant en France, j’ai ressenti le besoin de « faire mes preuves » et suis devenu ingénieur dans l’industrie cosmétique. Parallèlement, j’ai rejoint ATD Quart Monde. Cela m’a donné l’occasion de m’engager avec des personnes en grande pauvreté et de découvrir les leviers fantastiques d’action développés par ATD, dans sa recherche de ne pas faire POUR, mais AVEC les gens : nous arriverons à éradiquer l’extrême pauvreté si nous prenons en compte l’expérience, les savoirs, l’intelligence des gens qui la vivent. C’est ainsi que sont nés le revenu minimum d’insertion - devenu RSA, la couverture maladie universelle, le projet « Territoires zéro chômeurs de longue durée »…
J’ai aussi découvert la proposition du volontariat permanent d’ATD : les volontaires permanents, issus de tous les milieux et de plus de 40 pays, se consacrent à temps plein à l’engagement avec des repères importants : disponibilité là où on a besoin de nous, vie simple, envie de se laisser transformer et d’apprendre des personnes en grande pauvreté, travail en équipe. Après 4 années passionnantes dans l’industrie, j’ai fait le pas et suis devenu volontaire permanent.
De cette période, je me souviens d’une femme en très grande exclusion. Elle disait « j’ai perdu ma dignité le jour où l’on a placé mes enfants ». Elle avait sombré au plus profond, face au déni de sa dignité de personne et de mère. Et pourtant, de chez elle, on voyait un fil qui passait chez la voisine : elle lui donnait l’électricité. Malgré la souffrance et le rejet, elle restait actrice face au dénuement de la famille voisine.

Des gestes de solidarité marquants

En 2003, avec mon épouse, nous avons rejoint l’équipe du Guatemala et avons contribué à son action pour l’accès de tous les enfants à une éducation de qualité. J’ai aussi animé l’atelier de peinture des jeunes vivant et travaillant dans la décharge publique. J’ai là encore été marqué, transformé, par les gestes de solidarité de personnes entre elles. Les jeunes de la décharge, le lieu le plus inhumain que j’ai vu, partageaient un bout de pain naturellement, simplement, lors de l’atelier de peinture. Cette manière évidente d’être solidaire au quotidien, j’en ai été témoin très souvent. J’ai réalisé pendant ces années à quel point permettre que tous les enfants et les jeunes puissent développer leurs talents et être acteurs de leur vie et de la société était l’un des moteurs déterminants de mon engagement.
Alors, effectivement, l’appel « viens, suis-moi » a toujours une résonance particulière en moi. Petit à petit, il m’a entraîné à la rencontre de personnes dont l’humanité est bafouée, méprisée. J’ai pu comprendre qu’en agissant ensemble, des changements étaient possibles, et que ces rencontres étaient sans doute le cœur même de notre humanité, où peut-être le Christ nous invite.

Paul Maréchal



 


Contre vents et marées, assurer la mission

 

2 septembre 2022 2022 par Jean-François Courtille

Olivier est professeur des écoles et directeur à Fécamp, en quartier populaire. L’école de son enfance ! Un vrai choix.

Chaque matin, je salue le personnel et mes collègues. Pour moi, nous formons une seule équipe, même si nous dépendons de deux administrations. Et croyez-moi, ce n’est pas évident pour tous !
8h00, le téléphone sonne, signe d’incertitude. En général, tout se passe bien. Mais régulièrement, il faut gérer l’urgence : un remplacement, une fuite, une panne, des dégradations, la colère d’un parent... Pas un matin ne se ressemble.
8h20 : j’accueille les élèves. Depuis deux ans, tout est bouleversé. Masque, test, désinfection : des gestes pas faciles à faire respecter sans le soutien des parents.

Mon quotidien est complexe à appréhender. 80 % de mon travail est de l’imprévu. Combien de fois ai-je listé les tâches à effectuer pour les retrouver le soir inachevées, pris dans le tourbillon des aléas de la journée ? Infirmier, plombier, électricien : tant de casquettes ne rendent pas toujours le travail épanouissant. Pourtant je tiens. Parce que les relations humaines en valent le coup, que le travail avec les partenaires de l’école m’enrichit.

C’est dur d’apprendre le décès d’un parent ou un placement d’enfant. Mais c’est bon d’être remercié pour l’écoute offerte et l’accompagnement dans ces épreuves. C’est dur de lire des accusations diffamatoires dans la presse locale. Mais c’est bon d’être soutenu par l’équipe pour rétablir la vérité. C’est dur de manquer de moyens, de reconnaissance. Mais c’est bon, entre directeurs, de se soutenir, se conseiller. J’aimerais trouver un lieu d’écoute au travail. Ah oui, ça existe : un numéro vert… Sans parler de l’absence de médecine du travail.
Heureusement, jusqu’ici, chaque « c’est dur » a trouvé son « c’est bon », rendant acceptable ma fonction. Mais pour encore combien de temps ?

Mes engagements m’offrent un autre regard sur le monde, j’y parle « travail » autrement, j’y jette mes filets, j’y élargis l’espace de ma tente. ACE, JOC, vie du village, CFDT, collectif Solidarité Bosnie-Herzégovine… Autant de lieux de partage, de dialogue, d’action. Sans oublier Virginie, Luc, Camille et toute la famille !

Oui, je crois dur comme fer à ma mission de service public. J’y mets en œuvre mes convictions et les valeurs qui me façonnent :
Je crois à la dignité. Elle m’invite à être à l’écoute de chaque enfant et adulte, sans jugement, pour leur permettre de grandir, de s’émanciper.
Je crois en la solidarité. Elle m’invite à proposer un projet collectif autour de l’école : encourager les familles à s’investir dans la vie de l’école et du quartier, les élèves à se soutenir, à vivre des projets de solidarité.
Je crois au partage, à la paix, à la fraternité...
Et puis je crois en toi, Jésus-Christ, fils de Dieu. Comme sur les chemins d’Emmaüs, compagnon chaque jour, tu m’ouvres les yeux sur la vie. Tu me dis : « Confiance ! ». Tu ne t’es jamais posé comme roi, mais comme serviteur. Tu m’invites à cheminer avec ceux que je croise sur ma route, à me mettre au service de ma mission pour une école accueillante.

Alors, chaque matin, j’ouvre la porte. Même si la veille a été difficile, je crois que des solutions sont toujours possibles. Je refuse la fatalité. Je me nourris des « Bonjour ! » distribués, des traits d’humour partagés, des « Merci ! », « Courage ! », « Bravo ! »,...

Et chaque soir, en fermant la porte, je garde le souvenir des bons moments et j’imagine des lendemains qui chantent !

Olivier Hericher



 


Je me souviens... la liberté

 

31 août 2022 2022 par Jean-François Courtille

Philippe, de par ses anciennes responsabilités au sein du CCFD Terre-Solidaire, connaît bien l’est de l’Europe, en particulier l’Ukraine. Il nous partage son cri du cœur.

Je me souviens avoir partagé une couchette dans le train Bucarest-Kiev à l’hiver 1994. Le voyageur qui m’accompagne est un poète ukrainien, élu député du Roukh, parti politique démocratique d’Ukraine créé après la chute du Mur de Berlin. Il écrit toute la nuit à la lueur d’une veilleuse. Après l’arrêt du train par la 14ème armée russe qui reçut l’ordre de me contrôler en rase-campagne moldave, je lui demande ce qu’il écrit avec tant d’application. Il me répond : "Je dois présenter demain le projet de Constitution pour l’Ukraine indépendante ". À la question, "Pourquoi avez-vous la Constitution française à côté de vous ?", il sourit : "La France est pour nous le pays des libertés et c’est une inspiration évidente pour nous".

Je me souviens de Basile, ancien ouvrier d’un kolkhoze près d’Ivano-Frankivsk, à l’ouest de l’Ukraine. En 1993 il veut devenir fermier indépendant en renouant avec l’agriculture familiale. Il sera soutenu par le CCFD pour réaliser ce projet, rencontrera des agriculteurs, des éleveurs français… Alors que le kolkhoze est détruit, il se trouve seul à tenter cette aventure, seul devant d’anciens apparatchiks qui ne souhaitent que son échec. A l’approche de la première récolte, les villageois commencent à se parler, à lui parler. La confiance fait timidement quelques pas. Tout le monde est présent pour célébrer la récolte du "premier fermier libre" et la liberté retrouvée d’entreprendre et de gérer collectivement leur territoire. Des centaines de personnes suivront son exemple.
Je me souviens de Kharkiv, d’Odessa, de Marioupol, de Prypiat…

Je me souviens que vous, leaders politiques qui avez choisi le populisme comme idéologie pour conquérir le pouvoir, vous avez provoqué dans notre Histoire tant de guerres avec leurs cortèges de victimes et de destructions comme dans les Balkans, au Rwanda, en RDC, dans le Caucase, en Syrie… Aujourd’hui, en Ukraine.
Vous avez choisi cette idéologie qui abîme les esprits en les enfermant dans le ressentiment et l’inaction.

Je me souviens de vos discours outranciers qui abîment l’Europe et la divisent au point de la faire imploser. Vous envoyez à la face du monde l’image d’une Europe dirigée par des bureaucrates incapables, une Europe où il ne fait pas bon vivre alors que la terre entière nous l’envie malgré ses faiblesses. Les évolutions pour la rendre plus forte et plus solidaire vous importent peu, vous qui vous réfugiez uniquement dans son dénigrement.

Je me souviens de vos paroles violentes et excessives pour qualifier nos gouvernants. À vous entendre, la France est dirigée depuis 20 ans par des autocrates réduisant les libertés et les droits du peuple. Pendant ce temps, vous distillez des paroles complaisantes envers les populistes les plus dangereux, vous les soutenez et leur proposez des rapprochements économiques et stratégiques. Vous présentez une vision décadente des démocraties européennes, les offrant en pâture aux dictateurs du monde.

Je me souviens de vos excès concernant l’immigration, enfermant la France dans deux camps supposés incompatibles (extrême droite et extrême gauche), mais en fait concourant ensemble à transformer les émigrés en boucs-émissaires et en otages d’un débat populiste violent, médiocre et clivant. Votre entêtement à placer cette question au cœur des débats de société produit de plus en plus de Français à votre image : intolérants et repliés sur l’imposture du "tout va mal".

Philippe Pinglin



 


Une autre humanité verra le jour

 

17 mai 2022 2022

Annie Baylac vit dans les Hautes-Pyrénées. Elle milite dans un parti, un syndicat et 3 associations.



 


REALISATEUR CHRETIEN EN MISSION

 

18 novembre 2021 2021

(35) - Rien ne me prédisposait à devenir un réalisateur audiovisuel au sein d’une unité de production audiovisuelle diocésaine catholique. Après 5 ans comme éducateur socio-sportif dans un foyer de jeunes travailleurs, j’ai démissionné et commencé à réaliser des productions audio-visuelles semi-professionnelles, surtout pour des centres sociaux.

Une rencontre

Témoin_601_Réalisateur chrétien en mission

C’est la rencontre avec Benoît Vanoni, réalisateur aux "Productions du regard"*, et son départ, qui m’a permis d’y commencer ma carrière de réalisateur de magazines pour porter un regard chrétien en 13 minutes sur la société, ses problématiques, sur l’Ille-et-Vilaine.
Dans mon cheminement personnel spirituel, je me suis senti appelé en mission, tout comme l’étaient les pères Francis Méhaignerie et André Triverio respectivement fondateur et premier réalisateur.
C’est dans cet esprit, et en parallèle de mes réalisations pour TV Rennes, que j’ai mis mon enthousiasme et ma capacité de travail au service du diocèse de Rennes. J’ai alors commencé à créer des contenus institutionnels stimulants et enthousiasmants pour la communication du diocèse, notamment en accompagnant différents événements majeurs : Pentecôte 2012 et 2017, Forum en Église, Ecclésia campus et la démarche synodale.

Pour un souffle missionnaire

Je vis de belles rencontres et découvre de belles personnes dans des moments intimes où elles livrent leur intériorité avec une confiance et une simplicité incroyable. Ces moments extraordinaires j’essaye de les valoriser et de les mettre en exergue avec le plus de tact possible.
Je ne peux pas dire que cela stimule ma foi, mais cela fait de moi quelqu’un qui aime profondément les porteurs d’espérance, ceux qui ont foi dans le Christ. J’apprends à les comprendre, je chemine à côté d’eux, je les écoute et je restitue leur témoignage, qu’ils soient religieux, laïcs.
Je souhaite que ces émissions soient un souffle missionnaire, un témoignage de l’Église en mission, d’une Église audacieuse qui va à la rencontre de femmes et d’hommes animés par l’espérance, qui tendent la main, prennent en charge les plus fragiles ou font de la beauté quelque chose de constructif.
Les réalisations sont aussi bien des séquences courtes, en épousant les canons de la vidéo pour le web, que des documentaires pour la TV dans une démarche au long court d’approfondissement.

Des témoins éclairants

Beaucoup de témoins m’ont marqué lors des centaines de magazines réalisés. Il y a Franck né très lourdement handicapé mental et physique. Ses parents ont vécu un apprentissage de l’amour douloureux mais aussi accompli, ancrés dans "Foi et lumière" pour apprendre à aimer leur enfant. Je pense à plusieurs prêtres témoignant de leur vocation, de leur relation à l’Église et au monde. Il y a aussi des artistes comme Augustin Frison-Roche, peintre de la fresque géante représentant l’Apocalypse à la cathédrale de St Malo, Laurent Esquerré, sculpteur des 4 Vivants de la cathédrale de Rennes. Ils ont témoigné de leur foi et du message qu’ils souhaitent faire passer à travers leurs œuvres.
Toutes ces productions télévisuelles (documentaires, reportages, magazines), séquences institutionnelles et toutes ces personnes m’éclairent. Je ne pense pas que cela suffise à faire de moi un chrétien apaisé, mais en tout cas, un chrétien toujours en chemin, en mission...
Pour finir, je m’approprie les mots éclairants de Patrick Richard dits à l’occasion d’un tournage : « Je ne suis pas un chanteur chrétien mais un chrétien qui chante ». Moi, je ne suis pas un réalisateur chrétien mais un chrétien qui réalise…
Emmanuel MASSOU



 


Accompagner les personnes blessées

 

27 juillet 2021 2021 par Rédaction ACO

Charo Sauvage est mère de famille (3 enfants et 5 petits-enfants), mariée à un diacre (Patrice) et engagée durant sa vie professionnelle dans la formation des adultes.

Depuis une vingtaine d’années, mon occupation principale est l’accompagnement spirituel, en particulier auprès des personnes blessées par la vie.

Des personnes blessées
Ce sont des personnes qui ont vécu de graves traumatismes, pendant l’enfance ou après viol, inceste, maltraitance, abandon… Ces blessures les empêchent d’être des hommes et des femmes "debout" et de vivre une foi équilibrée. Elles ont du mal à faire confiance aux autres, à elles-mêmes et à Dieu, d’où la nécessité de faire un travail sur leur histoire personnelle pour parvenir à donner un pardon à ceux qui sont à l’origine de ces blessures. Le travail que je propose dans le cadre de la Fraternité du Bon Samaritain -association fondée par Edouard Gueydan, jésuite- n’est pas une thérapie, mais une approche psycho-spirituelle. À la lumière de la foi, il s’agit d’identifier nos blessures et de pardonner au nom du Christ à nos agresseurs. Ce processus prend du temps, soit lors d’une session de huit jours ou à travers d’accompagnements personnels sur plusieurs mois ou années.

Accompagnatrice spirituelle
Le hasard m’a amenée à accompagner pendant un an un ami en fin de vie, alors que je n’avais pas de formation en ce domaine. C’est auprès de lui, à travers une écoute sans jugement, que j’ai ressenti la nécessité pour chacun de se réconcilier avec son histoire à travers le pardon. C’est après que le P. Gueydan, qui m’avait accompagnée pendant des Exercices spirituels de St Ignace, m’a proposé de devenir accompagnatrice spirituelle et de contribuer à la fondation d’une association orientée vers les personnes blessées et le thème du pardon : la Fraternité du Bon Samaritain.

La foi est essentielle
Dans ce travail de pardon, la foi est essentielle. Elle en est vraiment la clé de voûte. La guérison des blessures ne peut intervenir qu’à travers un "tiers" : l’Esprit d’amour et de vérité qui est l’acteur principal. C’est Lui qui éclaire et donne la force de pardonner. Sans Lui certains pardons sont impossibles.

Une foi enrichie par cet engagement
Comme tout être humain, je suis aussi une personne blessée et je suis moi-même accompagnée par une personne d’expérience qui m’a aidée (et m’aide encore) à vivre une foi plus cohérente et authentique. Cette démarche m’a permis d’aller vers la Source qui était obstruée par mes blessures. Par ailleurs, cet engagement m’a rendue témoin d’expériences merveilleuses de transformation personnelle et m’a convaincue de la présence de Dieu en chacun de nous, en particulier à travers nos fragilités. Je fais souvent l’expérience que le Christ ressuscité et ressuscitant vient frapper à la porte de nos blessures pour transformer toute notre vie grâce au pardon.

Engagée dans la diaconie de l’Église
Mariée à un diacre, nous vivons ensemble en couple, des temps de prière, de méditation et de dialogue qui m’aident à avancer, car je côtoie souvent de grandes détresses existentielles. Et, je dirais que je suis, comme Patrice, engagée dans la diaconie de l’Église à travers mon attention à ce type de souffrance, qui est certes moins visible que la précarité sociale, mais qui mine tant de personnes en quête de réconciliation profonde avec elles-mêmes, avec les autres et avec Dieu.

Charo Ramos Sauvage



 


Climat et démocratie se sauveront ensemble !

 

17 septembre 2020 2020

42 (Loire) - Dominique Gillier, syndicaliste, a été secrétaire général de la Fédération CFDT Métallurgie et membre du Bureau confédéral. Il est Vice-président du Conseil économique, social et environnemental (CESE), composé de 80 organisations de la société civile. Il témoigne du travail de la Convention citoyenne pour le climat (CCC) dont il est membre du comité de gouvernance.

Depuis octobre 2019, 150 personnes constituent la CCC. Voulue par le Président de la République, son organisation a été confiée au CESE. Sa mission est de proposer des mesures concrètes de lutte contre le changement climatique, afin d’atteindre une baisse d’au moins 40 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030, dans un esprit de justice sociale. Cette initiative est une réponse politique, à l’issue du grand débat national. Elle est née dans un contexte de tensions sociales (‘Gilets jaunes’) et d’attentes fortes de la société (marches pour le climat, pétition ‘l’Affaire du siècle’…).

Des citoyens prennent les choses en main

La CCC correspond aussi aux demandes de la société civile organisée, soucieuse de replacer les citoyens au cœur de la décision publique, demandes du CESE, de Think tank, d’ONG écologistes, et de collectifs… D’autres pays ont choisi cette méthode : en Irlande sur l’avortement, au Texas sur le développement de l’éolien, en Islande sur sa constitution, actuellement en Grande-Bretagne sur le climat également…

Les membres de la CCC ont été désignés par tirage au sort, selon des critères prédéfinis afin d’assurer une « représentation descriptive » de la population française (sexe, âge, niveau de diplôme, situation socio-professionnelle, type de territoires et zone résidentielle). Ils sont indemnisés, comme des jurés d’assises. Je constate avec intérêt qu’ils sont, tous et toutes, personnellement très engagés dans cette mission, assidus, constructifs, bienveillants entre eux, et soucieux de l’intérêt général.

Un travail organisé au service du bien commun

Un Comité de Gouvernance, composé de personnalités qualifiées (dans l’écologie, la démocratie participative, l’économique et le social), organise les travaux dans le respect du mandat et s’appuie sur des animateurs professionnels. Trois ‘Garants ‘ de l’indépendance et de la sincérité des travaux ont en outre été nommés. Des intervenants de différents types et disciplines ont été auditionnés et les citoyens peuvent recourir à des experts et à des ‘vérificateurs de fait’. Les débats sont transparents, retransmis sur Internet, ouverts au public, à des observateurs, des chercheurs, des journalistes…

Cinq groupes thématiques (se nourrir, se déplacer, se loger, produire et travailler, consommer) se sont réparti le travail. L’assemblée plénière a ensuite pris le relais pour finaliser et valider les propositions qui seront publiées normalement en juin. A titre d’exemples : favoriser les circuits courts, prolonger la durabilité des objets, accompagner les évolutions professionnelles, réguler les publicités, stopper l’artificialisation des sols, favoriser les transports collectifs.

Ouverture à des possibles

À l’heure où les peurs, les colères, le repli sur soi, la recherche de boucs émissaires, les inégalités… menacent la démocratie et la cohésion sociale ; à l’heure où la transition écologique, doublée de la crise sanitaire, constitue un défi pour l’humanité, la CCC démontre que des femmes et des hommes placés en responsabilité sont capables d’intelligence collective pour le bien commun.

Dominique Gillier



 


La pauvreté, ni la solidarité n’ont de frontières

 

23 juillet 2020 2020

Conseiller travailliste dans un quartier populaire de Londres, Paul Edwards témoigne du développement de la pauvreté, de la pertinence de l’action collective si humble soit-elle et de la foi qui l’anime.

Après 10 ans d’austérité, nous voyons une progression rapide des familles qui travaillent et malgré tout sont pauvres. Le travail est de plus en plus précaire : « l’économie des petits boulots » (gig economy), c’est-à-dire avoir deux boulots, faire des doubles journées et des heures supplémentaires pour payer les factures.
Dans ma région du Nord de Londres, 25000 enfants vivent dans la pauvreté. Dans cette région, le nombre de familles dépendant de la banque alimentaire pour se nourrir a augmenté de 73% depuis 5 ans.
Dans le quartier où je suis conseiller travailliste, il y a une école secondaire où 50% des élèves ont droit aux repas gratuits, parce que leur famille est pauvre. Pour 48% d’entre eux, l’anglais est une seconde langue. Dans un système éducatif mené par des désirs de grande réussite, on laisse une école comme celle-là se débattre et échouer.

Agir avec… porte des fruits

Avec trois camarades, nous encourageons le travail et les valeurs de cette école qui croit que tous ses étudiants ont droit à l’égalité des chances et à la dignité.
Nous avons impliqué dans un travail d’équipe, une communauté dépassant le cadre de l’école. Elle travaille à atténuer, autant que faire se peut, les inégalités et les handicaps de leur situation.
Ainsi, nous avons monté une ferme communautaire où élèves et adultes, ensemble, cultivent les légumes pour l’école et la communauté de proximité. Cela leur permet d’apprendre la culture des plantes et leurs valeurs nutritives. Nous avons aussi créé une apiculture bio, d’après les écrits de l’Abbé Emile Warré.

Peu à peu, nos étudiants ont assez de confiance en eux pour s’affirmer face aux adultes sur la réflexion et l’action face au réchauffement climatique.
Nous sommes témoins de leur découverte progressive qu’en travaillant ensemble, en apportant sa petite contribution, quelle que soit son importance, les choses peuvent s’améliorer. Et qu’il vaut mieux agir avec d’autres plutôt qu’à leur place. Ainsi, ils construisent une communauté...
Rien de bien révolutionnaire dans tout cela. Mais, le résultat est la transformation de ceux qui sont impliqués. Nous avons ainsi vu la solidarité progresser dans la communauté. Beaucoup de bonnes volontés se sont engagées.

Comme Jésus nous l’a appris

Parmi eux, trois personnes m’ont inspiré. Ce sont mes camarades : Fred, Mary et Amy. Nous avons découvert des valeurs partagées. Nous avons réfléchi à notre engagement dans ces actions. Trois d’entre eux sont croyants, un ne l’est pas. Et pourtant, nous avons pu lire l’Évangile ensemble, pour voir que toute sa vie, Jésus a fait preuve d’une compassion sans limite pour les pauvres et les opprimés. Il n’a pas fait un idéal de la pauvreté. Au contraire, son souci était que personne ne soit en manque. Il incitait les gens à partager leurs possessions matérielles. Mais ceci n’est possible que s’il existe une communauté d’entraide, que ce soit au niveau régional ou mondial.

En 2009, l’ACO a accueilli l’assemblée générale du MMTC à Nantes. Grâce à l’action de nombreux bénévoles, les délégués des quatre continents ont pu se rassembler pour partager leurs engagements et raffermir leur foi grâce aux partages. Ils ont acquis la conviction qu’il n’est pas nécessaire de venir d’un pays riche pour apporter le changement. Par l’action collective, même humble, nous expérimentons la présence du Christ. Notre engagement avec les autres nous inspire confiance pour construire ensemble un monde plus juste.

Paul Edwards

595_TEMOIN

<lecteurpdfdoc1881>



 


S’ENGAGER : UNE SOURCE D’EPANOUISSEMENT

 

9 avril 2020 2020

42 (Loire)- Vincent n’envisage pas sa vie, son chemin spirituel, sans engagements collectifs.

J’ai pris conscience de ce qu’est l’engagement lorsque j’étais Jociste. J’ai rejoint une équipe JOC en trainant un peu les pieds... mais j’ai vite découvert tout le dynamisme qu’apporte un engagement collectif ! Lors d’une réflexion sur l’engagement avec d’autres jocistes en enseignement sup’ j’ai décidé de m’investir dans l’aide aux devoirs auprès d’élèves de primaire et collège dans un centre social proche de chez moi. Depuis lors, je suis toujours engagé dans des collectifs.
Des engagements multiples
Si je dois lister mes engagements : je suis président d’un centre social depuis 2010. Au CCFD-Terre solidaire je suis militant à St-Etienne et membre du comité d’animation du réseau thématique « Palestine-Israël » au titre des voyages Un Pied en Palestine que j’accompagne. Je suis membre de l’équipe d’aumônerie de la maison d’arrêt. Je suis syndicaliste à la FEP-CFDT. J’aide à l’organisation et l’animation de camps d’été en langue française en Palestine. J’ai créé une association pour promouvoir l’artisanat palestinien et permettre aux artisans de vivre de leur travail.
L’importance de l’appel
Le premier point commun porteur de sens est que j’ai été appelé. Par Nabil pour candidater au CA du centre social et par Fadila pour candidater à sa présidence ; par Monique pour la maison d’arrêt ; par la JOC pour siéger au CCFD (il y a une vingtaine d’années) et par des salariés du CCFD pour accompagner des voyages en Palestine ; par les religieuses pour les camps d’été en français qu’elles ont créés en Palestine.
Ces appels signifient que je ne suis pas seul à décider, mais que mes compétences peuvent être utiles à un projet collectif. Cela m’a aidé à dépasser mes craintes et à oser vivre des aventures que je n’aurais pas tenté seul !
Ce que tu fais à ce petit qui est mon frère…
Un deuxième élément commun est que ces engagements répondent à un impératif d’ordre spirituel : ce que tu fais à ce petit qui est mon frère c’est à moi que tu le fais (Matthieu 25). Mes deux témoins sont St Vincent-de-Paul et Georges Guérin.
Le premier a une grande place dans ma famille via les Filles de la Charité qui ont élevé certains de mes arrière-grands-parents. J’ai ainsi beaucoup entendu parlé de lui et lu ces réflexions spirituelles. J’ai toujours en tête qu’il invitait chacun à accueillir toute personne comme s’il accueillait le Christ lui-même, c’est à dire que l’action est toujours un lien à Dieu, une autre façon de prier !
« Puisque le Christ est votre vie, moi je crois en vous » disait le P. Guérin. Je me sens toujours jociste, dans cette attention aux plus faibles, d’où le choix d’œuvrer au cœur du monde populaire, du milieu ouvrier. C’est valable dans mes engagements bénévoles, mais aussi dans mon travail d’enseignant (enfants du voyage, familles fragilisées) ou dans le choix de mon lieu d’habitation.

Des choix s’imposent
Je ne suis plus investi en politique, après des investissements forts : 2 campagnes municipales (Vénissieux et Rive de Gier), élu d’opposition (membre du MRC) durant un mandat. J’y ai beaucoup appris y compris par désillusions, mais j’ai fait des choix pour ménager ma vie de couple et mon équilibre perso. C’est aussi pourquoi, même si je participe à des initiatives en Mission ouvrière, je ne suis pas en équipe de RDV. Mais c’est une affaire à suivre...

Tous ces engagements sont une source d’épanouissement. Ils me vivifient dans ma vie intérieure et dans les relations humaines ! Tout comme je le vois dans la vie de plusieurs membres de ma famille.

Vincent Royon



 


« J’ai décroché un portrait »

 

9 avril 2020 2020

Orléans (45) – Face à l’urgence climatique et à l’inaction gouvernementale, des jeunes militants du collectif ANV-COP21 ont décroché des portraits présidentiels. Franzeska en était.

Je m’appelle Franzeska et j’ai 26 ans. Le 2 mars 2019, avec douze autres citoyennes et citoyens, j’ai décroché un portrait de Macron près d’Orléans dans une action non-violente dénonçant le vide de sa politique climatique et sociale. Le 13 septembre, je suis passée en procès pour « vol en réunion », jugée coupable et condamnée à 200€ avec sursis.
Urgence climatique et sociale
Déjà à l’école on nous parlait du « changement climatique », comme phénomène physique qui est politiquement connu et se discute lors de conférences internationales. Depuis, j’ai pu constater que le monde continue de tourner de travers – et que cette réalité s’imposant à ma génération met désormais fondamentalement en question mes projets de vie personnels : la fin du monde tel que nous le connaissons est non seulement décrite mais datée pour les quelques décennies à venir par un consensus exceptionnel des scientifiques au niveau mondial.
Depuis toute petite, j’essaie de me soucier de ce qui m’entoure, fais des efforts en recherche de cohérence. J’ai fini par remarquer que ces gestes ne suffisent pas. Pendant que je choisis d’avoir soif plutôt que d’acheter une bouteille en plastique, d’autres appuient sur l’accélérateur : élaborent TAFTA, CETA et APE (colonialisme 2.0), forent encore plus de pétrole en eaux profondes, regardent de haut les noyades en Méditerranée et ferment des hôpitaux. C’est bien notre système qui marche sur la tête. Avec les alertes du GIEC et le rapport de B&L évolution, j’ai commencé à comprendre l’ampleur de l’urgence : nous sommes les dernier-es à avoir encore des leviers d’action à portée de main pour empêcher ou au contraire accélérer un emballement climatique - la fenêtre pour agir est en train de se fermer à jamais. Et nous sommes les premier-es à en vivre les conséquences. Pire : des millions de personnes sont concernées déjà par des catastrophes climatiques, et nos pays occidentaux en sommes coupables, nous donnant une responsabilité historique supplémentaire à limiter encore les dégâts.

Quel pourrait être mon rôle, en tant que membre de cette génération si fatidique pour l’humanité ?

J’ai rejoint Alternatiba en janvier 2018 et j’étais enthousiaste de découvrir un mouvement politique, radical, inclusif et organisé, combinant comme une évidence climat et questions sociales. Plein d’alternatives existent déjà et ont fait leurs preuves, permettant de construire une société soutenable et même désirable, basée sur les liens et la solidarité d’une communauté renforcée.
En juin 2018, j’ai participé à une formation à l’action non-violente. Tout en respectant les personnes, la désobéissance civile me permet de sonner l’alerte d’une façon qui est plus difficile à ignorer. Avec ces deux jambes du mouvement, alternatives et résistances (avec Action Non-Violente COP21), nous essayons de construire le monde de demain tout en résistant à ce qui détruit notre vie à tou-tes et celle de toutes les générations à venir.
Le 2 mars, j’ai décroché un portrait de Macron. Macron dont la politique actuelle nous mène vers un réchauffement planétaire de +4°C, donc un monde voué au chaos, aux guerres et à la faim. Macron qui se prétend champion du climat. Cette photo qui vaut 9,90€ et qui n’est ni obligatoire, ni nécessaire au bon fonctionnement d’une mairie, m’a valu une garde à vue de 9 heures, une perquisition et un procès pour vol en réunion.

Franzeska Bindé
ANV-COP21 Orléans



 


Travailler dans le service public

 

29 juillet 2019 2019

Frédéric, ingénieur à VNF (Voie navigable de France) témoigne de son parcours et de ses convictions.

Travailler dans le service public s’est révélé progressivement comme une cohérence de ma vie depuis ces vingt dernières années.
A la fin de mes études secondaires, je souhaitais m’épanouir dans les métiers liés à l’aménagement des territoires, en lien avec l’environnement.
Du ministère de « l’équipement », actuellement « ministère de la Transition écologique et des solidarités », les différentes missions et métiers exercés m’ont confirmé dans mon choix initial. J’ai la volonté de préserver cette mission, ce service du bien commun et de l’équité pour les territoires.

Les socles du service public
La réalisation de constructions publiques, la préservation des terres agricoles, des forêts, de la ressource en eau, tout en œuvrant pour un urbanisme respectueux sont les socles d’un service public. Ils demandent de prendre soin de chacune des ressources que la terre nous offre, en lien avec les élus et les habitants des territoires.
Travailler au service du public, signifie pour moi, être ce levain dans la pâte humaine. Il est nécessaire de rester à sa place, en service, pour écouter, proposer, en vue d’améliorer la vie de chacun dans le respect de l’environnement.

Œuvrer au bien commun
Dans un contexte national d’interrogations, j’ose affirmer ce besoin d’un service public pour tous et auprès de chacun.
Travailler dans le service public est pour moi une manière de prendre soin des territoires oubliés, et des hommes. « Le service public est le patrimoine de ceux qui n’en ont pas », dit le proverbe.
S’engager syndicalement est une manière complémentaire pour moi de défendre, ce nécessaire « tissu de liens » que sont les services publics, quel que soit le territoire, afin que l’enjeu économique ne prenne pas le dessus.
Ce cheminement est en cohérence avec ma foi dans le Christ serviteur. Prendre soin, être présent pour apporter la fraternité humaine, s’inscrit dans l’Evangile (Mt 25, 40). Alors oui, j’aime œuvrer au bien commun, dans le service donné aux autres, comme le mentionne le pape François, en écoutant « tant la clameur de la Terre, que la clameur des pauvres » LS49

Répondre aux enjeux pour l’avenir
Aujourd’hui mes missions à « VNF » s’exercent dans le domaine de la gestion des ressources en eau et des milieux naturels.
Les modifications, ces derniers siècles, de l’utilisation de la ressource en eau, le changement climatique en cours, engendrent des conséquences importantes : périodes de sécheresse, crues violentes... L’eau, est une question transversale pour notre vie : agriculture, industrie, eau potable, énergie !
Ainsi, tout est lié, comme le mentionne le pape François dans l’encyclique Laudato Si’ [§137]. « Prendre soin » de la Création est une nécessité [LS §139]
Le service public contribue à œuvrer au bien commun vis-à-vis des enjeux actuels et pour demain.

Appelé par l’Église
Je suis appelé par l’Église au diaconat permanent. Je serai ordonné le 7 juillet. Je ressens cet appel profond de Dieu, dans une vie donnée, pour servir le Christ, l’Église, dans le monde. Mes engagements dans le service public font sens dans l’appel du Christ à son service.
Le service ou « le prendre soin » des femmes et des hommes, des milieux naturels, des créatures, dans l’amour de la Parole de Dieu, configure pour moi cet appel du Seigneur.
Frédéric Wiker



 


QUE TA VOLONTE SOIT F.Ê.T.E

 

9 avril 2020 2020

Gard (30) - Avant de découvrir l’ACO, Cécile a eu un parcours de vie marqué par le handicap où se croisent chemins d’engagements et chemins de foi.

Après avoir intégré le monde du travail, malgré la maladie, très tôt, la relation employeur-employé fut bousculée par la reconnaissance de ma qualité de travailleur handicapé (TH). Un parcours du combattant, dès l’âge de 20 ans, s’imposa qui, au fil des ans, devint combat d’espérance.
Ce parcours fut émaillé de tas d’évènements, où d’étapes en étape j’ai dû évoluer. Le Seigneur était là, me bousculant tant de fois… à tel point que le lien entre la vie et la foi m’interrogeait sans cesse. Il me fallut me battre au niveau emploi car être embauchée avec l’étiquette TH n’est pas évident ! La maladie suivait son petit bout de chemin et les traitements m’immobilisaient ; j’étais donc souvent en arrêt maladie.

Des liens qui aident à tenir bon
Faire face fut un « aller vers », notamment avec l’Association des Paralysés de France (APF) qui est venue donner un but à ma vie. Que de mains tendues au bon moment pour me relever. Bref, j’étais en lien, c’était précieux !
A l’âge de 30 ans, terrible épreuve… ! Un temps de révolte intense par cette mise en invalidité que j’avais tant repoussée. Par miracle je rencontre la FCPMH (Fraternité chrétienne des personnes malades et handicapées), la FRAT et qui donna un sens à ma vie. Ce « lève-toi et marche » de l’Évangile était moteur. J’y ai cheminé pendant 30 ans. Devenue responsable d’équipe c’était loin d’être une promotion mais un don du ciel me permettant de me mettre au service. J’y ai reçu tant de paroles encourageantes. On m’a dit « va » ou encore « ici, ça sert ton Évangile ». Et cet Évangile, on nous demande d’en vivre.
Notre équipe partageait un local avec un club du quartier et nous avions pignon sur rue. Cette présence d’Église au cœur du monde avait un côté plaisant. Ma mission en FRAT, notre mission d’équipe : être apôtre d’autres personnes malades et handicapées. C’était vivifiant quand nous créions-invitions-animions des espaces de parole, orientés vers divers groupes… où chaque fois, au contact de chacun, nous grandissions.
J’étais emballée par les dimensions du Mouvement. Je me laissais questionner par le Christ, il était dans ma vie. Mais malgré tout ce que j’y vivais, trop, c’était trop ! En effet j’étais atteinte d’une myasthénie et je devais être très prudente avec la répétition des mouvements.
Je vivais vraiment un face à face poignant avec le Seigneur. Les jours suivant, je fus appelée à agir uniquement dans la proximité et à rejoindre le CCAS. Malgré les difficultés, je m’y suis épanouie.

Faire peuple
Chaque année, aux alentours de Noël, en équipe, nous rejoignions la Mission ouvrière. Des échanges, très riches ! Nous apportions notre témoignage et affirmions nos différences. Petit à petit j’ai appris à vivre pleinement, autrement. Pour autant j’ai poursuivi le combat, tant auprès du monde médical que paramédical, afin d’y défendre mes droits. L’AFM (Association Française des Myopathes) fût, pour moi, un précieux secours.
Avec cette association tout un élan démarra avec le club du quartier pour organiser le Téléthon en partenariat avec la mairie. Motiver chacun, faire bouger, faire connaître la maladie et les recherches, informer des avancées, mettre des personnes en lien, c’était ma façon de « faire peuple » avec d’autres.
Après la Frat, j’ai rejoint l’ACO, bien présente sur le terrain et aujourd’hui, à 71 ans, je m’y sens bien à ma place. Avec Marie-Claire nous devenons responsables d’équipe en tandem. Tout au long de ce parcours, la prière m’a toujours accompagnée et le sacrement des malades fût une force intense pour propulser ici où là, en étant proche de chacun.

Chemin des hommes, chemins de Dieu
Chaque jour n’est-il pas commencement ?

Cécile



 


Engagée contre le système prostitutionnel

 

9 avril 2020 2020

Toulouse (31). Julie, militante ACO, est engagée depuis longtemps au Mouvement Le CRI.

Originaire d’un petit village des Pyrénées centrales, ayant réussi le concours des PTT, je suis « montée à Paris » en 1957. J’avais tout juste 20 ans et encore mineure à l’époque.
Ma foi est née dans une famille rurale très modeste qui m’a nourrie des valeurs de service, de partage, de dévouement et de solidarité.
Syndicaliste à la CFTC (je ferai plus tard, avec d’autres, le chemin aboutissant à la création de la CFDT), une de mes premières actions fut une pétition pour réclamer un accueil en gare pour les jeunes filles arrivant à Paris.
Le racolage des jeunes provinciales que nous étions était monnaie courante. Dans le contexte de la guerre d’Algérie, il « fallait » approvisionner les BMC (Bordels militaires contrôlés)…
Ces jeunes filles avaient de maigres finances. Les salaires étaient bas, les loisirs inexistants, les logements en hôtel ou en « chambre de bonne » étaient trop chers.

En harmonie avec ma foi

Leur méconnaissance de la capitale et leur isolement en faisaient des proies faciles pour les rabatteurs de toutes sortes : « À la rencontre » était la formule qui camouflait ces actes qui se répétaient à compter du 25 du mois rue des Archives, à la sortie du central téléphonique. Ce fut pour moi la découverte du risque prostitutionnel. Ma foi était en harmonie avec ces combats aux côté de ces êtres humains, pauvres et méprisés.
Mon engagement profond contre le système prostitutionnel s’est fait on pourrait dire « à reculons ». Mariée, deux jeunes enfants, nous habitions Toulouse. Mon mari, Roger, avait un engagement militant profond. Il s’est trouvé, dans des conditions particulières, amené à prendre la présidence du Mouvement Le CRI, à Toulouse ; Mouvement, créé en 1981, pour lutter contre l’enfermement, soit dans la prostitution soit dans les prisons. Pour la petite histoire, le CRI est né d’une rencontre dans un train Paris-Dijon de militants syndicaux interpellés par des femmes en situation de prostitution qui leur ont exposé leurs problèmes.
Durant les « journées prison » organisées à la cinémathèque de Toulouse, j’ai fait la rencontre d’une « survivante » : « Maldy bonheur ». Choc bouleversant.
Le cheminement à ses côtés une année durant pour la réalisation d’un ouvrage - « j‘ai tourné la page » - pour donner « des mots aux maux », puis les universités « lanceurs d’alertes » organisées par le CRI m’ont conduite à mon engagement d’aujourd’hui aux côtés des femmes de la Marche Mondiale des Femmes contre la pauvreté et les violences faites aux femmes.
Une des premières universités du CRI posait la question : « Au marché du sexe, client qui es-tu ? ». La focale ne se portait plus sur la femme blâmée et coupable mais sur les agents du système.

Une lutte primordiale

En 1990, s’est constitué à Toulouse, le collectif « Midi Pyrénées pour les droits des femmes ». J’ai trouvé là un lieu et des compagnes avec lesquelles nous avions des analyses communes sur l’exploitation des femmes par le patriarcat et le système capitaliste.
Ceci m’a poussée à des lectures, à des rencontres, à une réflexion, à approfondir mes analyses et à écrire des textes en commun pour dénoncer ce fléau.
Cette lutte me paraît primordiale car
- notre société de consommation et de gaspillage ne développe pas le respect de soi, de son propre corps, de son propre désir ;
- notre société a tu les violences engendrées par ce système.
Je suis frappée par le silence assourdissant qui entoure ces situations de détresse. Il me semble nécessaire d’aborder ces questions avec des femmes, des hommes, mais aussi des enfants.

L’intégralité de ce témoignage se trouve sur le site de l’ACO : acofrance.fr

Livres disponibles au Mouvement Le CRI,145 chemin de Nicol 31200 Toulouse (10 euros, port compris)

Julie



 


De la compréhension du monde à l’engagement collectif

 

19 février 2019 2019

Txetx Etcheverry est un des grands noms d’un militantisme engagé pour le climat, la paix et la justice sociale. Il est le co-fondateur du mouvement Bizi (1), à l’origine d’Alternatiba (2)

De la naissance de son engagement, à sa manière de vivre et de penser le militantisme Txetx nous offre l’occasion d’oser à notre tour nous questionner sur notre parcours militant, les moyens de le transmettre et de le faire vivre.

Comprendre le monde

« J’ai eu conscience assez tôt qu’il y avait de grandes des injustices dans le monde. Ma mère était abonnée à la Vie catholique et à Croissance des Jeunes Nations. J’étais avide de découvrir et j’ai appris là que s’il y avait des gens qui mouraient de faim c’est qu’il y avait un système économique qui répartissait inéquitablement les richesses. Ça m’a vraiment remué les tripes. A cela se rajoutait au Pays basque un problème identitaire, le fait de faire partie d’une génération dont la langue et l’identité mouraient. C’est paradoxalement dans ces années ou j’ai arrêté de croire en Dieu que j’ai commencé mon engagement avec le MRJC, à 15 ans, parce que dans ma campagne il y avait une surexploitation des jeunes travailleurs saisonniers. Nous avons organisé une permanence pour les informer qu’ils avaient des droits. Je suis allé au lycée sur la côte basque, la zone urbaine. Là, un prêtre qui faisait des clubs dans un quartier ouvrier m’a proposé de l’aider. Après sont venues les luttes lycéennes, les luttes antimilitaristes, des luttes basques… Aujourd’hui je me bats contre le réchauffement climatique car si on laisse s’emballer le climat on peut dire adieu à la paix, aux droits de l’homme, à la justice sociale... »

Un enrichissement permanent
« Mon désir de changement radical est beaucoup plus important aujourd’hui que durant ma jeunesse. J’ai toujours vécu l’engagement comme un enrichissement permanent. Je n’ai pas fait d’études. Le militantisme est une super école qui m’a fait connaître des relations humaines ultra riches que je n’aurais pas eues sans être engagé. Mon parcours, tout ce que j’ai appris je l’ai vécu de manière collective. Aujourd’hui les jeunes s’engagent mais ils veulent voir tout de suite le résultat. Cela est sain mais dangereux car c’est un engagement à base très individuelle qui ne protège pas des coups durs. Le collectif protège, enrichit, donne de meilleures idées. »

Bâtir par le collectif
« Les gens qui ont fait des études peuvent théoriser, penser… moi, je n’y arrive pas y compris sur le sens de mon engagement, si je n’ai pas des discussions collectives. Avec Alternatiba nous avons construit l’engagement sur un mode très collectif. Il y a une identité de groupe très forte.
Avec Bizi, nous avons fondé Alternatiba sur un équilibre entre un travail très sérieux, le convivial et le fait d’être à la fois radicaux et pragmatiques, déterminés et non-violents. Nous avons des réunions qui commencent et finissent à l’heure, des ordres du jour minutés et des comptes rendu systématiques… Ce cadre rigoureux est rassurant quand on s’engage. Nous accordons aussi beaucoup d’importance à la formation.
Enfin, il faut faire en sorte d’organiser les gens autour de batailles précises, à notre portée mais suffisamment ambitieuses pour que ce soit motivant. Il faut que les gens puissent prendre conscience de leur capacité à faire bouger les choses afin d’être motivés pour des objectifs plus grands.
Aujourd’hui, une de nos pistes de travail est d’aller sur les quartiers où il y a de moins en moins de présence militante ou associative et aider à l’auto-organisation des gens pour essayer de construire des réponses sociales et écologiques à leurs besoins au quotidien. Si j’avais une sollicitation à faire à l’ACO c’est de nous donner des conseils pour rejoindre les gens de ces quartiers. »

Propos recueillis par Sylvain Knittel

(1) https://bizimugi.eu/
(2) https://alternatiba.eu/



 


Père et créateur

 

4 janvier 2019 2019 par Rédaction ACO

Alexis Gruss a pris une pause en plein montage de son nouveau spectacle, pour nous témoigner de sa vie et de sa foi.

Homme passionné par sa famille, son métier, la vie, la piste, la musique, les chevaux… Il a beaucoup d’esprit et d’humour derrière lesquels il dissimule des blessures dont il nourrit ses réflexions et tire une profondeur indéniable.

La famille, un fondement

Il a des origines italiennes, alsaciennes et normandes. Des histoires de rencontres merveilleuses qui ont vaincu les préjugés. Né en 1944, dans la caravane de sa grand-mère, il a toujours vécu avec ses parents dans un univers de spectacle familial dans lequel il a aussi entraîné ses enfants et petits-enfants. Ensemble, avec d’autres, par des efforts physiques, intellectuels, financiers, de solidarité, d’entraide énormes, ils produisent de l’émerveillement et des applaudissements. Cette complémentarité fait leur force. Pour créer un spectacle, il leur faut 3 ans. Des années de travail pour produire des gestes éphémères.

Des convictions enracinées
C’est un homme qui croit à l’instruction, à l’éducation, à la transmission, au don et à la complémentarité, pas à l’égalité ni à la tolérance. Il sait qu’il faut du temps pour rencontrer, choisir, assembler. Il déplore qu’aujourd’hui on cherche surtout à prendre dans un objectif lucratif, et pas à donner.
Pour lui, éduquer c’est faire sortir de soi pour faire grandir et il applique cela à toute nature (humain, animal, matière…). Son rôle d’artiste, c’est de sublimer la nature et de la magnifier. Bien loin des positions des antispécistes (1) qui l’ont contraint à se défaire de son éléphant.
Assembler, chercher l’équilibre, l’harmonie, ainsi, tente-il de faire la volonté de Dieu en sachant que le temps ne revient pas. Tous les 15 août et les 24 décembre, des messes sont célébrées sous le chapiteau. « Si on ne fait rien, il ne se passe rien. Si les gens viennent, c’est qu’ils y trouvent ce qu’ils cherchent ».
Un univers
Le cirque, son monde, son travail, une vraie distraction dit-il. La piste, un lieu, mais aussi une forme géométrique circulaire infinie ; son outil de travail d’où on peut s’élever mais pas sortir. Découverte voilà 250 ans, d’où le thème du spectacle*, elle fait 40 m de circonférence et 13 m de diamètre ; elle est à l’échelle des dimensions de la terre. C’est un espace scénique fantastique où tout mouvement développe un sens de l’équilibre absolument extraordinaire par le magnétisme provoqué, qui attire à l’extérieur. Elle n’a jamais de fin. D’ailleurs pour lui, il n’y a pas de dernière séance, ce sont des avant-premières, puisque ça tourne. La piste est aussi universelle ; on y voit des artistes de toutes nationalités et toutes les espèces d’animaux. La terre dont elle est recouverte (la sienne, qu’il déplace), où s’enracinent profondément son histoire familiale et ses créations, est aussi fertile.
Les créations sont également inspirées de moments incroyables, dont il reconnaît le privilège. En hiver, il voit la Tour Eiffel de sa fenêtre. Il a assisté à la Philharmonie de Berlin à une répétition dirigée par Karajan, et découvert qu’il ne peut y avoir d’harmonie, sans accord et sans synchronie par l’action du maître, comme la vie. Des expériences et émotions dont la synthèse est bien l’amour.

Propos recueillis par Elisabeth Peralta

1 Militants refusant la suprématie humaine sur les animaux et luttant pour que les intérêts de ceux-ci soient pris en compte

 *Origines, spectacle du 13 octobre 2018 au 3 mars 2019à Paris, Porte de Passy
 A paraître : Les bâtisseurs de l’éphémère de Natalie Petiteau, par la Société Printteam de Nice,2018, 192 p.



 


J’adore retourner à l’école !

 

7 novembre 2018 2018

Essonne (91) Claudine est revenue à l’école pour un emploi d’Auxiliaire de vie scolaire (AVS). Elle nous partage son parcours grâce à Marie-Chantal, enseignante, membre ACO.

Un soir, pendant l’étude, elle expliquait à une élève la règle d’orthographe du a – à. Elle dit souvent aux enfants, qu’il faut travailler à l’école pour avoir un beau métier plus tard. Je me suis rappelée de l’arrivée de Claudine à l’école. Cette grande dame s’est présentée, avec dans son sac le souvenir de son parcours chaotique et l’angoisse de ceux et celles pour qui l’école a été un moment difficile. Aujourd’hui on peut regarder le chemin parcouru !

Des souvenirs douloureux
« J’ai eu un CAP d’employée de bureau. Il a fallu que je travaille tout de suite, à 16 ans, comme conditionneuse. J’ai toujours travaillé en usine. J’ai aussi eu un emploi d’étiqueteuse dans un labo de boucherie : 12 heures par jour sans pause. Un jour, un chariot de viande m’est tombé dessus, mon dos a lâché. J’ai été licenciée et déclarée travailleuse handicapée. Impossible de retrouver un emploi : je suis allée tous les jours à Pôle Emploi. J’ai passé les tests pour être AVS. »

J’adore ce que je fais !
« Enfin, j’ai reçu un coup de téléphone “Vous allez vous occuper d’un enfant handicapé. Vous apprendrez sur le tas.” C’est Martine, (une autre AVS de l’école) qui m’a tout appris. Elle m’a rassurée, formée. Je n’ai pas eu d’autre formation. Je me suis découvert une vocation. J’adore ce que je fais : retourner à l’école. »
Le travail de Claudine et des autres AVS, est d’être avec les élèves en situation de handicap dans la classe, et de leur permettre de suivre une scolarité avec les autres enfants de leur âge. Cette mission implique des relations très fortes avec les élèves. Pour les enseignants, il faut accepter un autre adulte dans la classe. C’est une relation quelque peu inédite entre l’AVS, l’enseignant ou l’enseignante, l’élève et les parents. L’AVS reçoit souvent les confidences, les câlins des élèves…
Il est inacceptable de continuer d’embaucher ces personnes sans formation, avec des salaires de misère. Ce n’est pas cette école inclusive que nous voulons. Alors même que cette expérience revalorise et fait évoluer ceux et celles qui la vive. « Mon regard a changé sur l’école. Avant, je disais comme tout le monde : “Ils ont toutes les vacances et terminent à 16h30”. Maintenant je dis : “C’est un sacerdoce !” ».

Agir pour les autres
« Martine m’a aussi “embarquée“ dans toutes ses actions sur le quartier pour les enfants (sorties avec le Secours populaire, sapin de Noël…). Je me suis mise sur les blogs. Pour signer le contrat, les AVS étaient accueillies comme des moins que rien par l’administration du lycée. C’était inadmissible de nous traiter de cette façon. Pour répondre à nos questions, en particulier sur notre temps de travail, la possibilité d’avoir un contrat de droit public… je suis allée sur les blogs et je me suis syndiquée. Les boulots que je faisais avant, ce n’était pas valorisant. T’es fière de toi quand tu rentres chez toi. Si le gamin que tu suis, réussit quelque chose ou quand les gosses disent “Merci de m’avoir aidé”, c’est un bonheur et c’est pour cela que je ne veux pas changer ».

Claudine et Marie-Chantal
Contact : loicmarie1 chez orange.fr



 


Joie et force

 

23 mai 2018 2018

RHÔNE (69) Lydia nous témoigne de la force qui la fait vivre.

Je suis née dans un milieu athée mais j’ai tout de même été baptisée à l’âge de 7 ans. À 15 ans, je suis allée à la communion de mon cousin et j’ai découvert une église autre que celle que je voyais à la télé. J’ai commencé à me poser des questions. En 1986, le pape Jean-Paul II vient à Gerland 1 : une copine me propose d’y aller. Et voilà, c’est parti. Nous rencontrons la JOC 2. Je commence la Révision de vie (RDV). Grâce à Jacques Jouham, prêtre accompagnateur de l’équipe, je découvre l’Évangile et fais alors ma communion à 20 ans.

Une vie spirituelle

Aujourd’hui, je ne vais pas souvent à l’église, mais cela ne m’empêche pas de prier pour les copains, la famille, les collègues de boulot, les voisins… Quand je le peux, j’aime beaucoup aller au 44 (notre local de la Mission ouvrière), où nous sommes un petit groupe à partager l’eucharistie avec beaucoup d’échanges et de prières, le deuxième vendredi soir de chaque mois, autour de Jojo, prêtre ouvrier. À Vaulx-en-Velin, où j’habite, il y a un partage d’Évangile (initié par des religieuses du Prado 3, actuellement assuré par un collectif aidé d’un prêtre). La RDV m’aide à prier, elle est, pour moi, une source de vie pour redémarrer surtout dans les moments difficiles. Les membres de mon équipe ACO ont toujours été là pour m’écouter et m’interpeller, au besoin. Il ne m’est pas toujours facile de m’exprimer oralement surtout au moment du Juger. J’aime beaucoup les prières qui sont dans Témoignage, Repères. Parfois, j’en écris. Au cours de ces mêmes RDV que nous sommes arrivés à équilibrer, nous essayons souvent de lire une prière ou de dire un Notre Père. À ce moment-là, je ressens bien la communion avec les autres.

Être en communion

Dans tous les temps forts, j’ai vécu des moments formidables car l’eucharistie et la prière prennent encore une autre dimension. J’ai pu communier dans des grandes assemblées lors des rassemblements. Je suis revenue de ces temps grandie dans ma foi, dans ma mission de partage avec les autres et dans mon amour pour Jésus-Christ. J’adore les récos où tu approfondis vraiment l’Évangile et où tu es en communion avec les autres. Ces temps de vie spirituelle et de prière me nourrissent chaque jour, ils m’apportent une joie de vivre. J’arrive à dialoguer plus facilement avec des gens inconnus, lors de rencontres dans la vie professionnelle ou sportive, les transports en commun… Il y a quelques années, ce n’était pas le cas. Aujourd’hui, je dépasse ma timidité et je pense être poussée par une force qui m’engage à aller vers l’autre et me donne un autre regard plus compréhensif sur certaines personnes. On me dit souvent : « Tu as toujours le sourire ! ». Je pense que cette force en est la raison. Elle m’aide aussi dans ma responsabilité au Comité de secteur ACO. Bien sûr, j’ai aussi des moments de cafard. J’ai même eu de la colère contre Dieu, mais cette force est toujours là et me pousse à me relever toujours un peu plus haut. Et puis, il y a toutes ces petites joies : les RDV avec mon équipe, mon quartier où je rencontre des gens formidables, les ami(e)s que je connais pour la plupart depuis 30 ans, mes 50 ans organisés en surprise par des copain(ine)s, la solidarité des filles au sport…Le chant Écoute, écoute me fait penser que c’est cette présence du Seigneur vers moi qui me pousse à suivre ce chemin de spiritualité, me permet de vivre la double fi délité à la fois au Christ et au monde ouvrier.

Lydia Maubert

1. Stade à Lyon.
2. Jeunesse ouvrière chrétienne.
3. Famille spirituelle (prêtres et laïcs) fondée par le Bienheureux Antoine Chevrier en 1856, ayant pour mission d’annoncer le Christ aux pauvres.



 


En mission d’Église

 

23 avril 2018 2018

GIRONDE (33) Maïté, 33 ans, est Laïque en mission ecclésiale (LEME) depuis 2016. Elle a reçu deux missions : permanente de l’Action catholique des enfants (ACE) et permanente de la Mission ouvrière (MO).

J’ai été engagée en équipe JOC, puis nous avons rejoint l’ACO. J’ai été appelée à l’ACE 33 pour être présidente avant d’intégrer ma fonction de permanente.
Un travail
Dans mon travail précédent, secrétaire dans un cabinet comptable, j’avais des difficultés ; cette mission est arrivée au moment opportun.
J’ai été accompagnée par l’ancienne permanente, par la coordinatrice laïque, et par le délégué diocésain de la MO. J’ai senti tout de suite de la confiance de leur part mais aussi de tous les bénévoles qui m’entourent. Certaines périodes de l’année sont plus difficiles (rentrée scolaire, décembre/janvier, fin de l’année scolaire) car il y a beaucoup de réunions ou temps forts. Ils se déroulent souvent le soir et le week-end : il n’est pas toujours facile de faire place à sa vie privée. Mon compagnon, athée, m’a soutenu dans mon changement de travail. Il comprend mon engagement et, grâce à lui, il a découvert les mouvements et les actions menées, soutenues par l’Action catholique. Il pense que les mouvements comme les nôtres devraient être plus médiatisés. Cela me fait chaud au cœur.
Je travaille à la maison diocésaine. Avec les autres salariés des services et mouvements, nous cheminons, construisons, partageons… Et, certainement, que cela prépare les élections des délégués du personnel qui devraient être prévues en 2018.

Un engagement

J’ai en charge un club ACE de 4 enfants (Adam, Aymen, Camilia et Héryne) sur le quartier populaire de Cenon Palmer. Trois sont de confession musulmane. Ils se confient, m’apprennent des choses, sourient, rient… C’est un plaisir de les retrouver. Leur amitié fait écho à la résolution de l’ACE Plus fort ensemble !, qui donne confiance. Ma foi se nourrit de cette confiance. L’ACE est l’apprentissage de l’Évangile par le jeu.
Ces missions m’apportent beaucoup. Le fait d’aller tous dans le même sens est très agréable. Mes compétences sont sollicitées et ensemble, avec quelques jeunes de la JOC, des adultes de l’ACO et/ou du CCFD, nous mettons en œuvre des fêtes, des temps forts et vivons des situations imprévues. Comme avec Ali et Martine, sans papiers, venus à Noël en MO, qui ont contribué à l’animation musicale et au chant. Cette ouverture me permet de sentir que nous sommes inscrits dans la mission de l’Église et que des invités peuvent se joindre à nous.

Tous deux relus

Je suis en équipe ACO. C’est important ! C’est un moment à soi qui permet de se poser, de se questionner sur notre vie, notre foi, nos actions et nos engagements. La mission est enrichissante mais parfois lourde, et donc la relire est essentiel. Je participe aux temps de formation et de relecture organisés par le diocèse pour tous les LEME salariés ou non. Cela permet de se poser sur la mission confiée, sur sa foi, et de partager avec les autres LEME qui rencontrent souvent les mêmes joies et aussi les mêmes difficultés dans leur engagement.
Il m’est souvent difficile de dissocier travail et engagement car ce qui est mon engagement est devenu mon travail. Cette dynamique est exigeante et stimulante. À la rentrée, j’ai décidé de faire du sport pour avoir un temps pour moi et j’en suis ravie. Je ne regrette pas d’avoir accepté cette mission et encourage d’autres personnes à la vivre.

Maïté Combret



 


Je ne peux pas ne pas m’engager

 

20 février 2018 2018 par Rédaction ACO

ASNIÈRES (92) Féliciano, membre ACO et militant socialiste, nous partage son état d’esprit en ces temps de doutes.

L’engagement militant dans un parti politique est une fête, lorsqu’il part d’un élan authentique venant du cœur, cohérent avec l’ensemble de nos aspirations profondes. Il est une fête quand les victoires et les conquêtes s’additionnent, mais il l’est aussi aux heures des sacrifices et des combats justes, que l’on pense perdus d’avance. Je dois avouer qu’après 17 ans d’engagement au parti socialiste (PS), je ressens moins cet esprit de fête. Je regarde aujourd’hui mon parti et me demande si j’y suis encore à ma place.

Des convictions et des doutes

Pour moi, l’engagement politique est une manière d’accomplir le « aimer son prochain comme soi-même ». Le parti semble avoir perdu de vue cet autre, plus fragile et précaire, ouvrier, étranger, femme, jeune, personne âgée… Le seul objet du parti semble être lui-même. C’est aussi un devoir pour ’les forts’ de porter sur eux la faiblesse de ceux qui n’ont pas cette force. Les conquêtes de droits nouveaux ; la consolidation de la démocratie locale, sociale ; l’opposition à la toute-puissance de l’économique sur le politique… Autant de forces à entretenir pour le parti.
Pour moi, le collectif est une dimension essentielle de l’engagement militant. Baptisé, j’ai été élevé dans l’idée que chacun est relié à tous les autres dans une dimension organique (allégorie du corps chez Saint Paul pour décrire l’Église). Or nous avons perdu le sens du collectif. Et c’est ici que réside, sans doute, mon plus grand désappointement en tant que chrétien catholique, engagé au sein d’un parti. Au PS, il me semble que nous sommes parvenus à ce moment de délitement redouté par Saint Paul dans sa métaphore, ce moment tragique où le pied dirait : « puisque je ne suis pas la main, je ne fais pas partie du corps ». Je crois toujours à la nécessité de l’engagement politique, en la puissance de l’action collective, au rôle des partis pour faire vivre et tenir ensemble les hommes et les femmes d’une même nation au-delà de leurs différences. Autant de certitudes battues en brèche aujourd’hui par le discrédit de la parole politique, la résurgence des populismes de toutes sortes, l’exacerbation des individualismes et des antagonismes de classe, de religion, de culture…

Une relecture salutaire

Plus dure sera l’action ; mais plus déterminé devra être l’engagement, plus solides les valeurs, plus claires les convictions. Je sais qu’il va falloir que je retrouve sens, c’est-à-dire à la fois signification et direction, à mon engagement politique. Parce que je sais que je ne peux pas ne pas m’engager, agir, prendre parti.
Il y a lieu, pour l’heure, de reprendre à nouveaux frais ce cheminement de l’engagement, forgé au fil de mes années en ACO : prendre d’abord le temps d’un regard lucide pour voir en vérité les choses, les situations et aussi les hommes et femmes avec lesquels je mène ou ai mené mes combats, moi compris ; juger ensuite, sans concession ni fausses excuses ce que sont nos valeurs, la sincérité de nos engagements, ce qu’ont été nos erreurs, mais aussi discerner ce qui reste de nos richesses, de nos forces, de nos possibilités de faire ensemble ; alors je pourrai à nouveau envisager d’agir, après en avoir déterminé les possibilités, les conditions et notre capacité collective à contribuer de quelque manière à améliorer les conditions de vie des plus faibles.

Féliciano Gomez



 


Chercheur de justice et de paix

 

7 décembre 2017 2017

ILE-DE-FRANCE Hisham Abu Shahla, 30 ans, Palestinien de Gaza, est doctorant en sciences politiques à Paris. Il prépare une thèse sur la question palestinienne : Une solution à un seul État.

Je suis arrivé en France en 2009, avec une bourse du gouvernement français pour étudier. J’ai fait un master en sciences politiques après une licence en économie et sciences politiques.

Concerné et impliqué

Enfant, j’ai vécu en Égypte, plus proche de Gaza pour notre vie familiale, mon père travaillait pour l’OLP , basée à l’époque en Tunisie. Nous avons donc vécu entre les deux. Je suis arrivé à Gaza à l’âge de 10 ans en ayant vu comment cela se passait ailleurs. J’ai ressenti nettement que nous vivions une situation anormale.
Je suis allé l’université islamique de Gaza après avoir été dans une école chrétienne. Mon engagement a commencé avec la fac en 2004. L’année qui suivit le décès d’Arafat , la majorité des leaders étaient assassinés. C’était la guerre ; la fin de la 2ème intifada. J’étais engagé dans un syndicat étudiant de gauche. On avait un petit journal. Je travaillais sur l’histoire du mouvement national palestinien. J’étais passionné par cela. Le plus difficile pour moi, ce fut la division inter-palestinienne. Cela a détruit mon idéal du militant engagé pour la Palestine. Je voulais partir ; j’étais un bon étudiant ; j’ai donc cherché une bourse pour poursuivre mes études.

Apprendre, informer, militer

Arrivé en France, à Nantes, j’ai rejoint l’Union Générale des Étudiants de Palestine et participé à des soirées de témoignages avec la mairie de Rezé.
Aujourd’hui, avec les autres Palestiniens que je rencontre, nous faisons des soirées pour apprendre notre histoire, loin de toute propagande, pour comprendre la réalité. Si on reste sur les slogans, ça tombe à un moment ou l’autre ; ça ne peut pas faire un projet politique. Je crois que la Palestine a besoin d’avoir un projet politique. J’organise des débats ou je suis moi-même invité. Quand il a fallu être dans la rue, nous y étions comme durant la guerre en 2014. Cela touchait aux limites du supportable, en particulier le discours du gouvernement français solidaire avec l’armée israélienne.

Refuser l’humiliation

Historiquement, la Palestine était une seule terre où tout le monde cohabitait. Mais, à partir du moment où la Grande-Bretagne a imposé un État juif, les choses sont allées vers la guerre. Pire : utiliser le discours sacré comme le fait le gouvernement d’Israël, c’est porter le conflit à l’infini. Aujourd’hui, un seul État contrôle tout : la terre, la population ; que ce soit en Palestine ou en exil. Le problème n’est pas de diviser un territoire déjà trop petit, ou de contester les espaces, mais d’établir une discrimination au plan des droits. Tant que cette inégalité subsistera, il n’y aura pas de paix. Ne pas accepter d’être humilié est inscrit dans la nature humaine.
Le conflit israélo-palestinien est un conflit politique. Vu de France, il n’est pas assez politisé. Il y a une colonisation en Palestine depuis 1948, avec une discrimination des Palestiniens (démolition des maisons, check-points…). Par mon travail, je veux essayer de proposer des bases scientifiques, pour avoir la légitimité.
J’invite chacun à chercher, à comprendre la situation et à ne pas tout voir avec les yeux franco-français ; à ne pas confondre le conflit Israël-Palestine avec les débats internes français, car cela n’aide ni en Palestine ni en France.

Propos recueillis par Sylvain Knittel



 


Un Carême de solidarité

 

21 septembre 2017 2017 par Rédaction ACO

ORNE (61) Actrice auprès de lui, Valérie témoigne du combat collectif de Patrick, son mari. Ils l’ont vécu en couple croyant.

Voilà 14 ans, Patrick intégra le groupe AMCOR Flexibles à Argentan. Nous avons quitté le Nord, famille et amis, nous nous sommes vite intégrés. Je suis devenue assistante maternelle, et catéchiste. Patrick a de nouveau été élu délégué syndical CGT. Nous avons 5 enfants.

Sacrifiés sur l’autel du capitalisme

Le 9 février 2017, le géant australien AMCOR, leader mondial de l’emballage flexible, annonce la fermeture du site argentanais avant l’été : 86 personnes concernées, âge moyen 45 ans.
Pour ce groupe, ce n’est pas une première. L’investissement en Asie est bien plus attrayant, et 446 millions d’euros de dividende en 2016 ne suffisent pas à faire vivre ’Messieurs’ les actionnaires. Il faut viser plus haut, sacrifier sur l’autel du capitalisme !
Cette fermeture, organisée en amont par la baisse des investissements, a été une grosse claque. Les salariés sont humiliés car ils entendent : « Si la situation se dégrade c’est de leur faute, ils ne connaissent pas leur travail ». Ils ont pourtant un savoir-faire reconnu puisque certains retrouveront rapide¬ment un CDI.
Pendant trois mois, les représentants des salariés négocient. Le blocage de l’usine est décidé lorsque des camions étrangers arrivent pour emmener les matières premières. Il dure 3 semaines, jour et nuit. 2 salariés sont mis en examen. Chaque jour est différent. Les rebondissements et les tentatives d’intimidation sont physiquement et moralement éprouvants. Heureusement les salariés ont sollicité dès le début, une avocate ; une vraie militante.
Sans son aide, des limites auraient probablement été franchies et c’est ce que cherchait la direction. Depuis le 16 juin, les salariés sont mis en disponibilité et attendent leur lettre de licenciement qui ne devrait plus tarder. Ils n’oublient pas leurs camarades de Déca Propreté qui intervenaient à temps complet et qui seront eux aussi licenciés de leur entreprise.
Aujourd’hui nous appréhendons la fin avec le souhait de garder les liens tissés dans les évènements qui ont permis à beaucoup de s’engager et de se défendre. Les salariés sont fiers d’avoir mené un combat digne, en restant debout sans débordement.

Nous ne sommes pas arrivés là par hasard

S’il est compliqué de se projeter, d’envisager de repartir, cette épreuve a consolidé notre couple. Nous sommes encore plus proches, nous connaissons les pensées et la réaction de l’autre. Pratiquants, nous avions prévu d’aller nous ressourcer à Lourdes. Nous y avons prié pour les collègues et déposé une bougie devant la grotte à leur intention. C’était notre mission, même si les collègues de Patrick en ont souri. Il leur rappelle : « La bougie n’est pas éteinte, et l’espoir de rebondir existe toujours ». Notre Carême a été vécu sous le signe de la solidarité. Le conflit a débuté le mercredi des Cendres et s’est terminé à Pâques. Si cela n’est pas un signe de résurrection… Les collègues ont découvert que nous sommes chrétiens pratiquants, cela interpelle certains.
Délégué syndical depuis de très nombreuses années, Patrick relie son engagement à sa foi. Aider, être à l’écoute, défendre les autres : est bien conforme aux valeurs chrétiennes. Sa vocation n’a pas été d’être prêtre mais de fonder une famille et d’être au service de l’autre dans son engagement syndical.
De ce conflit, nous sortons grandis. Dans l’épreuve et la solidarité, nous nous surpassons. Nous sommes capables de bien des choses.
L’ACO a soutenu les grévistes en participant aux manifestations et par une déclaration adressée aux salariés et à la presse (voir site acofrance.fr).

Valérie Henry



 


Passer le témoin syndical

 

9 juin 2017 2017 par Rédaction ACO

Oise (60) Nadine nous présente son parcours d’engagée syndicale.

J’ai travaillé 23 ans dans une société spécialisée dans le traitement des abonnements de la presse écrite ou audiovisuelle ; essentiellement avec des femmes de tout âge en CDI, et aussi des intérimaires. J’y ai acquis une expérience syndicale qui me sert encore aujourd’hui.

Solidarité et prise de conscience

À compter de 2004, des rachats successifs par des fonds de pension vont déposséder l’entreprise de son fonds de commerce, de son savoir-faire, de son personnel (externalisation du travail). Avec les autres délégués du personnel (DP), nous avons conduit nombres d’actions, manifestations, réunions, délégations au siège social, retardant l’issue fatale.
J’étais sensible à la solidarité entre collègues et à la prise de conscience. L’objectif du syndicat était de rendre les salariés plus actifs. Sortir de la solidarité, c’était se condamner à la précarité. Il fallait être vigilant, ne pas dramatiser et défendre des personnes vulnérables comme les femmes seules. Le personnel est fragilisé, déstabilisé, fatigué par les luttes qui ont duré, et par le ’toujours plus de rentabilité’. Quand on est renvoyé de son travail, on souffre. Il y a perte de dignité, y compris la dignité familiale.
Après plusieurs années de combat, je fus à mon tour licenciée. Il m’a fallu une année pour refaire surface, puis retrouver du travail dans le service à la personne.

Un partage d’expérience

L’association embauchait des chômeurs par contrat aidé, sur une période de 6 mois pour une durée maximum de 2 ans. Il n’y avait pas de DP. Alors, lorsqu’il nous a été remis, avec notre bulletin de salaire, une note d’information Élection des représentants du personnel, j’en ai discuté avec Corinne, une collègue. Je lui ai parlé de mon expérience de délégué dans ma précédente entreprise. Elle s’est dite intéressée mais néophyte. Je la renseignais de mon mieux et Philippe, mon mari, lui parla de ce qui se passait dans son entreprise et lui conseilla de se syndiquer. Il lui donna les coordonnées d’un délégué syndical CFDT. Quelques jours plus tard, elle me prévenait par sms qu’elle sollicitait les autres collègues en CDI : « J’aimerais savoir si cela intéresse quelqu’un de se présenter. Si oui, pourriez-vous me contacter pour faire liste ensemble… N’hésitez pas à en parler à nos collègues. Je sais que ce n’est pas évident, on ne se connaît pas tous. Mais, dans notre intérêt, ce serait bien d’avoir des délégués… ». À la suite de cela, une personne s’est faite connaître.
Elles ont été élues titulaire et suppléante. Les premières questions ont porté sur la gestion des jours de congés, les contrats de travail et l’organisation du travail, car le Conseil général voulait faire des économies sur les kilomètres effectués et le temps passé dans les déplacements. Conséquence : plus d’auxiliaires de vie intervenant chez les usagers, qui ne s’y retrouvent plus et perdent leurs repères.
Aujourd’hui, je suis retraitée. Je prends du temps pour effectuer des visites auprès de personnes âgées seules. J’ai gardé contact avec Corinne qui m’informe de l’évolution du travail ; je la renseigne quand je peux et nous entretenons un lien amical. Je la soutiens toujours car, depuis son élection, elle a subi une campagne de déstabilisation. Elle s’est accrochée à son rôle de DP, a pris de l’assurance, pose des questions, obtient des réponses et remporte des petites victoires, comme cette journée récupérée pour elle et ses collègues.

Nadine Leviel



 


J’aimerais être un passeur

 

24 mars 2017 2017 par Rédaction ACO

NORD Philippe, en ACO à Lille, vient d’être ordonné diacre. Il témoigne de son parcours et du sens qu’il donne au sacrement reçu.

Inspecteur technique dans une multinationale, j’ai 53 ans et suis marié à Geneviève depuis 1984 ; nous avons trois garçons : Romain, Simon et Nicolas.

Un appel

En 2011, le prêtre de notre paroisse nous interpelle, Geneviève et moi, au sujet du diaconat permanent : surprise, interrogation, questions, pourquoi nous, pourquoi moi ? Nous en reparlons avec lui, avec des amis diacres et prêtres. Nous concluons que nous n’avons aucune raison de dire « non », mais il reste de nombreuses questions. Nous commençons la formation, « on verra bien où cela nous mène ». Néanmoins, je me rends compte que notre profil est atypique : je n’ai pas été interpellé pour ma présence visible dans la paroisse, ni pour mon implication dans des services d’Eglise. Je me sens bizarre aux yeux des autres appelés, parfois débarqué d’une autre planète.
Jésus a été attentif aux plus petits, aux exclus ; il a accueilli, écouté tous ceux qui dérangent, ceux qui sont en marge de la société ou de l’Eglise. Accueillir l’autre, pour nous, c’est être témoin et annoncer que Dieu est amour, qu’il a donné sa vie pour tous. Sa résurrection permet aux hommes de donner un sens à leur vie, mais aussi l’espérance d’un monde meilleur. Ma foi me motive dans l’action, donne un sens à mes engagements mais c’est aussi eux qui nourrissent ma foi par les témoignages entendus, les personnes rencontrées, celles que l’on voit changer ou grandir. Annoncer l’Evangile, c’est annoncer la Parole, qui peut être assimilée à une graine que l’on sème, mais ensuite, nous ne la maîtrisons plus, elle croît d’elle-même (Luc 8,4-15). Par contre, nous pouvons lui apporter des soins, de la lumière, nous pouvons être tuteur.

Dans un quotidien

Dans mes engagements politiques et syndicaux, surtout en tant que délégué syndical, j’ai appris l’humilité, l’écoute et l’importance de la parole de l’autre ; savoir l’entendre, la comprendre pour mieux pouvoir s’exprimer en leur nom. Dans mon entreprise, je suis en position d’écoute et d’attention. Quand des clients me parlent de leur foi ou de leur rejet de l’Eglise, cela me touche, me bouscule, avant j’y étais plutôt indifférent.
Dans la vie associative, en tant que président du club de basket, je comprends mieux une remarque d’un membre du Bureau : « oui mais toi, tu es différent, tu fais attention aux autres ». Je trouvais cela évident d’être attentif aux paroles, aux gestes des autres. Aujourd’hui, j’entends un Dieu qui me parle à travers ma vie, les événements, mais aussi par les témoins rencontrés tous les jours. Sans parler de Dieu, ils en expriment quelque chose par leurs attitudes, leur écoute… C’est pour moi l’image de Dieu fait homme parmi les hommes.

Des missions confiées

Tout cela nous a mené à l’ordination diaconale en octobre 2016. Mes missions confirmées par l’évêque (accompagnement du relais enseignement supérieur de la JOC et du Comité d’agglomération Lilloise de l’ACO), mes engagements associatifs sont, pour moi, à l’image de la vie de Jésus, de faire un bout de chemin avec les gens puis se retirer pour leur permettre de continuer (Luc 24,13-34). Je pense qu’être diacre, c’est être un homme, par lequel l’Evangile passe. J’aimerais savoir parler couramment ces deux langues : celle de la Parole de Dieu et celle de la parole des hommes, afin de traduire en mots de travailleurs l’amour de Dieu pour les hommes et leur ouvrir le chemin de la rencontre avec Dieu.
« J’aimerai être un passeur. Engagé comme… Engagé avec… tout un chacun dans la vie de tous les jours » .
Philippe Plichon



 


Défenseure des droits humains

 

16 janvier 2017 2017 par Rédaction ACO

Nouvelle présidente du Comité Catholique contre la Faim et pour le Développement (CCFD)- Terre Solidaire, Sylvie Bukhari-de Pontual nous fait l’amitié de se présenter.

Depuis toujours, j’ai été, par mes parents, au carrefour de différentes cultures et religions. Ils m’ont entraînée très tôt à vivre dans d’autres pays. Cela m’a profondément ouverte au monde et aux autres, à des réalités politiques, économiques et sociales si diverses.
Une éducation d’inspiration jésuite reposant sur la liberté, la responsabilité et le discernement, et quelques rencontres, furent décisives dans l’enracinement de ma foi en Christ et dans mon engagement pour la défense de la dignité et des droits fondamentaux des plus fragiles. Dom Helder Camara (Archevêque de Recife, une des voix prophétiques de l’après Concile Vatican II), en appelant à se mettre au service des pauvres, ou encore Guy Aurenche (avocat, ancien président du CCFD-Terre Solidaire), alors président de l’Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture (ACAT), vivant concrètement sa foi chrétienne au service des plus vulnérables, m’ont amenée à poursuivre des études de droit et devenir avocate.

Contre l’injustice

Spécialiste de droit international, j’ai été une militante de terrain assumant progressivement des responsabilités dans un engagement bénévole très fort pour la défense des droits de l’homme au sein de l’ACAT France, puis de sa Fédération Internationale (FIACAT). Ne supportant pas, viscéralement, l’injustice, j’ai essayé de mettre mes compétences juridiques au service de ceux qui en sont victimes, les plus faibles, les plus démunis, les plus défigurés, les moins ’présentables’ (les détenus de droit commun, souvent victimes de traitements cruels, inhumains, dégradants).
C’est pourquoi j’ai aussi participé à la création d’un master universitaire formant aux métiers de la solidarité internationale, et je suis devenue enseignante à la Faculté de Sciences Sociales et Économiques de l’Institut Catholique de Paris.

Pour la dignité

Parce que des proches ont été licenciés dans des conditions inacceptables et m’ont sollicitée pour les défendre face à leurs employeurs, j’ai plongé dans le droit du travail et j’ai alors découvert une réalité que je ne soupçonnais pas. Comment ne pas évoquer ces femmes licenciées au retour de leur congé maternité, ces victimes de harcèlement moral convaincues qu’elles étaient les seules responsables de leur descente aux enfers, ces salariés humiliés jusqu’à se sentir inutiles, priés de quitter séance tenante leur emploi ou se heurtant brutalement au refus d’accéder à leur lieu de travail… Redonner leur dignité à ceux qui ont ainsi perdu toute confiance et estime de soi, faire reconnaître leurs droits élémentaires, est devenu un combat essentiel pour moi.
Finalement, le fil directeur de ces engagements, professionnels et bénévoles, est fondé sur une alliance indissoluble entre prière et action. Parce que ce combat pour la dignité de ma sœur, mon frère en humanité, est lourd, ingrat, difficile, avec des succès malheureusement trop limités, alors la prière me donne le courage d’agir dans la durée. L’immersion quotidienne dans la Bible (même dans le métro) est un temps de respiration. L’encyclique Laudato Si’ et les discours du Pape François aux mouvements populaires m’encouragent à aller de l’avant : le Royaume de Dieu est ici, maintenant ; nous devons ensemble le bâtir. Voilà pourquoi j’ai répondu, avec joie et espérance, à l’appel du CCFD-Terre Solidaire. Il ne se contente pas de dire que les êtres humains doivent manger à leur faim. Il se bat aujourd’hui pour le respect des droits des personnes et pour une juste répartition des biens qui nous sont communs. Il est communion d’Église : sa collégialité de 29 services et mouvements d’Église (dont l’ACO) en est le vivant témoignage !
Sylvie Bukhari – de Pontual
Présidente du CCFD – Terre Solidaire



 


Acteur de fraternité

 

3 novembre 2016 2016 par Rédaction ACO

LOIRE (42) Vincent, président d’un centre social en quartier populaire, nous partage le sens qu’il donne à son engagement.

J’ai découvert les centres sociaux grâce à la JOC en 94-98 (nombreux engagements dans l’aide aux devoirs).

Culture et mixité sociale

J’ai choisi d’habiter dans un quartier populaire marqué par l’immigration, le Grand-Pont, à Rive-de-Gier : de belles solidarités, une identité propre, un milieu vrai et généreux, une chapelle, une mosquée et le centre social Armand-Lanoux. J’y ai commencé par l’aide aux devoirs des collégiens. Un souvenir particulier : ces jeunes maghrébins médusés que je parle l’arabe sans être musulman… Ils devaient être dans mon esprit lorsque j’ai accepté de rejoindre le Conseil d’administration (CA), car ce qui doit animer ce type de structure me semble être l’accès à la culture dans toutes ses dimensions. Je voulais apporter ma pierre à cet édifice qui connaissait alors des difficultés financières et de gouvernance. Élu en 2010, lors du 1er CA, Fadila (gardienne pour l’office d’HLM) me propose de me porter candidat à la présidence. Être appelé par une habitante du quartier, militante, connaissant bien les habitants et respectée par tous, a eu beaucoup de poids.
C’est une chance de vivre cette responsabilité. Je suis témoin de l’engagement fidèle des nombreux bénévoles qui investissent animations et activités diverses. C’est être au cœur d’une action collective pour proposer des actions culturelles et innover, répondre aux besoins décelés des adhérents et aux attentes exprimées. Bénévoles et salariés forment une équipe aux talents, capacités et profils multiples. Bel atout qui attire un nombre croissant d’adhérents, eux-aussi aux profils de plus en plus variés. Cette mixité sociale des familles est une des bases de notre projet social.
Rien n’est idyllique bien sûr. La gestion du personnel, lorsque l’on est employeur associatif, peut causer des soucis. Il nous a fallu licencier deux salariés, dont un pour faute grave… J’ai ainsi découvert le tribunal des Prud’hommes. Ce n’est pas toujours facile à vivre. Heureusement, le licenciement a été validé, l’affaire est terminée et laisse place à la vie.

Lieu d’écoute et d’échange

Dans cet engagement, je m’appuie sur ma Foi (en l’Incarnation parmi nous du Tout-Autre) reçue de la famille, nourrie en ACE et JOC, réfléchie grâce aux GFO et mon volontariat en Palestine. Si je crois que Dieu s’installe dans le quartier, dans les allées des bâtiments, il me faut agir pour que le centre demeure un lieu de croisement des regards, d’écoute et d’échanges et, de ce fait, un lieu d’expérimentation du pouvoir d’agir des habitants. Car Dieu nous veut frères, libres et debout !
Le 22 mai dernier, nous avons vécu une grande journée citoyenne et spirituelle. Des musulmans avaient sollicité notre directeur pour vivre un temps de rencontre dans la différence, suite aux attentats qui ont amené des réflexions acides contre eux. En CA, nous avons accepté, à condition que l’ensemble des croyants et non-croyants puissent avoir leur place. Belle réussite : des musulmans ont assisté à la prière des chrétiens dans la chapelle, et des chrétiens à celle des musulmans dans la mosquée. Les conférences ont fait salle comble pour s’écouter et se découvrir.
Lors de l’ouverture officielle, j’ai dit que cette journée permettait de se rencontrer, d’échanger, sans cacher la différence de Foi. Notre point commun est d’être citoyens français, mais cela n’efface pas nos identités personnelles de croyants. Reconnaître en l’autre cette identité religieuse, mais surtout spirituelle, signifie pour moi reconnaître sa dignité humaine. A l’heure où les médias voudraient nous persuader que la religion se limite à des tenues ou des pratiques extérieures, sans m’afficher comme chrétien mais sans le cacher, j’essaie de vivre mes convictions : respect de la dignité de chaque personne, choix préférentiel des plus petits, souhait du meilleur pour chacun.

Vincent Royon



 


La soif d’en sortir

 

16 septembre 2016 2016 par Rédaction ACO

VIENNE (86) René est malade alcoolique guéri. Son histoire est tragiquement banale. Il témoigne d’un parcours difficile, mais au long duquel la persévérance, le respect mutuel, l’amour… ont permis non seulement de guérir mais de devenir, en couple, acteurs pour aider d’autres à s’en sortir, à retrouver humanité, dignité et liberté.

Depuis toujours, je consommais un peu d’alcool. Petit à petit, ça a commencé à dérailler. J’ai pris l’habitude de boire tout seul et de plus en plus. C’était devenu mon carburant. Il m’en fallait le matin pour partir travailler, le midi pour tenir jusqu’au soir et, en arrivant à la maison, je poursuivais ma consommation. J’étais malade alcoolique, mais dans le déni. Mon épouse voyait bien que je buvais, mais ne savait pas comment s’y prendre pour en parler au médecin. C’était une souffrance de tous les jours pour elle. Elle avait la honte, la culpabilité, le désespoir, la peur de ma violence. Nos familles savaient, mais étaient aussi démunies. Le soir, alcoolisé, je disais à mon épouse, en la prenant par le cou, « Je te promets, demain, j’arrête », et le lendemain mon cerveau en redemandait.
Un accompagnement salutaire
Après plusieurs années, j’ai enfin pris la décision, avec mon épouse, de me soigner. J’étais réellement malade alcoolique. J’ai d’abord fait une cure ambulatoire (traitement médicamenteux sans hospitalisation), puis un sevrage en milieu hospitalier suivi d’une postcure d’un mois. J’étais abstinent mais très dépressif, d’où un traitement d’anxiolytiques qui me rendait dépendant des médicaments ; je n’étais plus moi-même, j’étais comme une épave. Pour me sortir de cet état, j’ai fait une cure d’un mois de psychothérapie. Je peux dire aujourd’hui que cette cure m’a libéré d’un mal-être très grand, enfoui au plus profond de moi, dont je n’étais pas conscient et qui empoisonnait ma vie. Il m’a fallu deux ans pour sortir de l’enfer. ’La soif d’en sortir’, comme dit le Mouvement Vie Libre (VL), l’a emporté sur la bouteille. Aujourd’hui, je suis heureux avec mon épouse, mes enfants. Je suis libéré de l’alcool grâce à l’amour de mon épouse et de VL.

Aimer l’être humain

Pendant toute ma maladie, j’allais aux permanences VL, aux réunions mensuelles. Il a fallu beaucoup de patience, de bonté, de confiance, de discrétion pour m’accompagner dans ce rude chemin. Mon épouse et les militants de VL, toujours fidèles, ont été déterminants pour arriver à ma guérison. L’accueil, la convivialité, le respect de chacun, le non jugement, la confiance sont des mots clés du Mouvement qui sont très réconfortants, stimulants pour les malades. VL a été pour notre couple un moyen de rencontrer des personnes en souffrance et d’anciens malades guéris. C’est pour cela qu’aujourd’hui, ce que nous avons reçu, nous voulons aider d’autres à en bénéficier.
Je tiens à ce que VL permette aux malades de se connaître et de communiquer entre eux. L’expérience vécue dans notre foyer nous a rendus proches des malades et de leur entourage. Elle nous a appris à aimer l’être humain.
Aujourd’hui, mon épouse s’investit dans un groupe de parole Femmes. En toute confiance, chacune peut exprimer sa souffrance, ce qu’elle a vécu. Progressivement, elles se sentent soutenues, écoutées, comprises ; alors, exprimer des choses douloureuses, profondes, intimes, leur permet de libérer un mal-être enfoui au plus profond d’elles.
Toutes les semaines, une permanence dans 5 cantons différents a lieu pour des personnes concernées par cette maladie. Une réunion mensuelle à Châtellerault regroupe 20 à 30 personnes avec des échanges, des expériences, qui permettent parfois de se reconnaître dans l’expression des autres. La convivialité, les rencontres, les partages, l’amitié au sein de l’équipe sont une force pour chacun.

René et Bernadette



 


Une foi qui fait avancer

 

29 juin 2016 2016 par Rédaction ACO

MEURTHE-ET-MOSELLE (54) Brigitte est technicienne de surface. Entre le travail, l’engagement syndical et l’ACO, elle nous invite à la suivre.

J’ai 50 ans, 4 enfants, 7 petits-enfants. Je suis en ACO depuis 7 ans maintenant, après avoir fait 15 ans de JOC. Entre l’ACE, la JOC et l’ACO, ainsi que mon engagement à ATD Quart Monde, j’ai laissé passer du temps pour réfléchir. Parce que j’ai aussi été conseillère municipale à Tomblaine, ma ville, et aux parents d’élèves.
Je suis revenue à l’ACO parce que je voulais retrouver des copains. On avait fait de la JOC alors, avec mon mari, on a remonté une équipe.

Des conditions de travail qui mènent à se syndiquer

Au travail, j’ai 6 résidences à faire une fois par semaine ou tous les 15 jours. J’ai aussi des bureaux à faire chaque jour. Avec une autre entreprise, j’ai un lycée où je vais faire les entrées, et un bureau le soir. Pour faire 39 h de travail par semaine, on a à peu près 20 h de transport, non prises en compte sur les salaires. De plus, nous n’avons pas toujours le matériel pour travailler, alors on improvise.
Je suis en lien avec la CGT. C’est moi qui ai lancé le syndicat dans notre entreprise, mais c’est mon mari qui a été élu délégué du personnel. J’ai lancé la section syndicale pour avoir des réponses à mes questions par rapport à ce qui relève du contrat, de la grille des salaires et puis aussi pour arranger les conditions de travail des autres collègues.
Pour les élections, c’est une déléguée syndicale à la CGT qui a monté le dossier. Pour le premier tour, il n’y avait personne à nous opposer mais on a fait un deuxième tour, car on n’avait pas atteint le pourcentage. Alors, notre cheffe de service, qui est dans les bureaux, s’est présentée sans étiquette. Elle a dû mal le prendre et a voulu nous contrer. Le nouveau directeur essaie, quant à lui, de faire en sorte, pour l’instant, que les gens soient bien. C’est sûrement lié au fait que l’on a un peu poussé au niveau du syndicat, et il y a aussi les clients derrière nous, certains nous soutiennent.

… à lancer un relais ACO

Avec Roselyne, nous avons mis en route le relai Techniciens de surface. On en avait assez du boulot, des conditions de travail et on voulait voir si dans d’autres entreprises c’était la même chose. On voulait aussi que les gens aient un lieu pour parler car nous travaillons souvent seuls. Nous avons été rejoints par des copains et copines qui sont dans les mêmes sociétés et chez des particuliers.
Là, on donne la parole aux gens, ils parlent de leurs conditions de vie ; on parle du boulot… c’est un endroit où l’on peut s’exprimer. L’ACO peut être un lieu pour les personnes qui ne veulent pas être en lien avec un syndicat, où pouvoir exposer leur vie de travail et où avoir un début de renseignement pour se mobiliser, se mettre en route mais aussi où se dire ce qui nous fait tenir debout. C’est pour cela que nous l’avons fait et que nous allons continuer. Nous allons aussi essayer de les rencontrer pour un temps festif, il ne faut pas que ce ne soit que pour le travail. J’ai toujours eu la foi. Sinon, je ne serais plus en équipe. Surtout, c’est ce qui te permet d’avancer et de faire avancer les autres aussi, en même temps. On fait partie de l’Église mais on apporte notre pierre à nous, avec notre vécu, notre foi et aussi notre foi en l’Homme (ça en fait partie, sinon ça ne pourrait pas avancer). Si je n’avais pas la foi, je ne pourrais pas continuer ce que je fais. Ça fait partie de moi. •

Brigitte Bajoni



 


Prêtre-ouvrier, aujourd’hui

 

24 mai 2016 2016 par Rédaction ACO

LANGUEDOC-ROUSSILLON Jean-Louis, prêtre et laveur de vitres, témoigne de son quotidien et de la spécificité de son ministère.

Beaucoup de gens ne sont pas indifférents quand on emploie l’expression un peu mythique de ’prêtre-ouvrier’. Ils demandent si « cela existe encore » ; les plus anciens se souviennent vaguement du ’coup d’arrêt’ de 1954 et ne connaissent pas la suite de l’histoire ; tandis que d’autres ont connu tel prêtre-ouvrier (PO), même si c’était parfois plus précisément un prêtre au service de la Mission ouvrière qui n’avait aucune activité professionnelle. Cela existe encore mais, à vrai dire, nous ne sommes plus qu’une petite vingtaine en France dans le collectif des PO à ne pas être encore à la retraite !

Paroisse et CDD

Depuis 1993, je suis ouvrier dans le nettoyage – agent de service ou d’entretien ; j’ai travaillé dans une bonne douzaine de sociétés de ce milieu, surtout comme laveur de carreaux. En octobre dernier, après douze années dans la même entreprise d’une petite ville du sud de la France, j’ai déménagé dans une ville beaucoup plus grande, où j’ai tout de suite retrouvé un emploi à temps partiel (entre 20 et 30 heures par semaine), tout en étant le prêtre référent d’une paroisse très populaire et très marquée par l’Islam.
Ma situation professionnelle a quelque peu changé : j’étais pépère et me voici précaire ! J’étais délégué (syndical et du personnel) et me voici relégué ! Depuis le 1er novembre, j’en suis à ma deuxième société et j’enchaîne les petits CDD de remplacements. Pour avoir un CDI et pouvoir enfin dire un peu quelque chose, et peut-être m’engager de nouveau avec la CFDT, il va falloir attendre très longtemps et signer naïvement beaucoup de contrats « pas très catholiques » ! Ayant connu les conditions de travail les plus diverses, je ne me plains pas de mon sort : je suis au chaud puisque nous travaillons dans un grand hôpital. Par rapport à mon envoi dans le ministère PO et eu égard à mon âge critique (52 ans), et à la situation particulièrement difficile de l’emploi dans cette ville sans tradition industrielle, je ne trouverai pas mieux. Et surtout, le Bon Dieu m’a donné de bons collègues de toutes les couleurs ! Nous prenons la pause ensemble et l’ambiance est plutôt bonne. Pour que naissent la confiance et l’amitié, voire un peu de solidarité, il faut du temps ! Je souhaite de tout cœur prendre ce temps-là et rester avec ces collègues, même si je dois avaler quelques couleuvres !

Au service de la périphérie

Être PO, c’est un merveilleux ministère ! C’est une existence qui en vaut la peine, même s’il y a, en effet, de la fatigue et de la peine, comme dans tellement de vies de nos concitoyens exploités et précarisés. Dans les milieux ecclésiastiques, le ministère PO ne fait plus débat depuis bien longtemps. Nos chers Évêques, très occupés à boucher les trous pour ’couvrir’ le territoire des paroisses, ne sont « ni pour, ni contre, bien au contraire ». Et dans les séminaires, on ne risque pas d’en parler, si ce n’est dans un cours d’histoire de L’Église ! « Prêtres-ouvriers - prêtres oubliés », écrivait un copain PO ? Sans doute. Mais plus que jamais, justement parce qu’il y a désormais peu de prêtres dans nos régions, il serait bon que l’Église envoie en mission des serviteurs de l’Évangile qui ne seraient pas en priorité au service de la ’boutique’, mais de la périphérie. Et l’Église, dans son institution et ses ministres, n’a pas, loin s’en faut, fini d’apprendre de la vie des pauvres gens en partageant tout simplement leurs conditions de travail, leurs espoirs et leur désir d’une société plus juste et fraternelle.

Jean-Louis Cathala



 


Pèlerine du quotidien

 

2 mars 2016 2016 par Rédaction ACO

St-Etienne (42) Hélène est cadre de santé dans le secteur du handicap, elle nous propose de suivre son chemin de vie entre travail, engagement et foi.

Témoigner dans une revue n’est pas chose aisée. A l’appel de l’ACO, j’ai tout d’abord pensé qu’il interpellait le groupe ACO dont je fais partie, pour la rédaction d’un article. Que nenni ! C’est bien mon témoignage qui l’intéressait en tant que personne engagée dans un chemin de vie, de foi…

Prendre du recul

Que dire ? D’abord me présenter : à bientôt cinquante-cinq ans, je me définis souvent comme une grande ’pèlerine’ devant l’Eternel. Depuis que j’ai fait le chemin de Saint-Jacques de Compostelle, en deux fois 28 jours avec la toile de tente, cette marche m’a offert une lente méditation au quotidien. Il me semble que, dans ma vie personnelle et professionnelle, j’adopte cet état d’esprit, cette prise de recul chaque fois que je le peux ; cette espèce de frein naturel à un rythme de vie toujours trop pressé. Si la vie m’a apporté mon lot d’épreuves comme chacun d’entre nous : décès de mon père, divorce, séparation… elle a aussi su m’offrir des joies précieuses : un fils, Jean-Baptiste, qui fêtera ses 30 ans pour Pâques, un réseau d’amis fidèles, des valeurs solides et une foi qui m’a toujours aidée à surmonter les obstacles.

Des valeurs et des actes

Mon engagement dans la société, pour aller plus loin dans le témoignage, provient déjà de mon éducation. Avoir comme exemple un père militant et chrétien qui, au quotidien à l’usine, se bat pour les autres, forge certaines valeurs comme le sens du collectif, la solidarité, l’altruisme, le service aux autres… Ce n’est donc pas un hasard si, à 19 ans, je débutais ma carrière d’infirmière en service de cancérologie, tout en prenant ma première carte syndicale, afin d’adhérer à un groupe de défense des droits des travailleurs. Ce n’est pas non plus un hasard si j’ai entrepris de poursuivre la réflexion chrétienne en allant à la JOC, puis dans un groupe de réflexion, puis enfin aujourd’hui à l’ACO. J’éprouve tout simplement le besoin de faire un parallèle entre les actes que je pose au quotidien et la parole de l’Evangile ; le groupe permettant à chacun de grandir encore grâce aux paroles échangées en vérité : paroles d’espoir, mais aussi de doutes, de colère parfois, de peine, de vie en somme…
Mon travail, depuis, a évolué, je suis devenue cadre de santé en 1991. Accompagner des équipes de professionnels me correspond car ça m’amène à transmettre et à faire vivre des valeurs, certes professionnelles mais tellement humaines aussi. Je travaille depuis six ans dans le secteur du handicap où, comme j’aime à le dire, " je prends soin de vies fragiles et pourtant si fortes d’enseignement ". Le changement de fonction pourtant, n’a pas été simple. Venant d’un milieu ouvrier, devenir cadre est presque, au début, une trahison à ce qui nous a structurés jusque-là. La réflexion sur sa pratique, l’échange avec d’autres, les expériences de huit secteurs professionnels différents dont la formation aides-soignantes et infirmières, m’ont permis de me construire une identité professionnelle autre, sans lâcher les valeurs fortes qui me sous-tendent.
Alors oui, je ’pèlerine’. A chaque écueil, je prends mon bâton et je cherche à aller plus loin dans ma foi, dans mon engagement, dans ma vie. Aujourd’hui, j’accompagne deux jeunes sur ce chemin de foi, de vie : l’une va vers le baptême et l’autre vers la confirmation… C’était sans doute écrit. •

Hélène Bonneval



 


Une piécette qui vaut de l’or

 

19 janvier 2016 2016 par Rédaction ACO

Lille (59) Daniel Maciel est diacre, membre depuis plus de 20 ans de l’association Magdala à Lille. Il témoigne de ce que cet engagement permet.

Pour dire mon engagement me vient l’épisode rapporté dans l’Évangile de Luc, où des gens riches déposaient beaucoup d’argent dans le tronc du trésor du temple, et où une veuve misérable met une piécette. Jésus remarque cette veuve et dit qu’elle a mis plus que tout le monde, parce que les autres ont pris de leur superflu alors qu’elle, a mis tout ce qu’elle avait pour vivre. Objectivement, ce qu’elle a mis ne va pas contribuer de manière significative à l’entretien du Temple contrairement à l’argent des riches. Mais en soulignant l’importance de ce geste, Jésus nous montre le renversement des valeurs à opérer pour construire le Royaume qu’il annonce.

Un engagement qui transforme

En m’engageant dans la communauté de Magdala, je voulais aider des personnes sans logement, sans travail ou cumulant toutes sortes de difficultés. Quand je vois avec le recul le nombre de ceux et celles qui nous ont quittés, avec 20 ou 30 ans de moins que l’espérance de vie moyenne des Français, je relativise les effets mesurables de cet engagement. Mais, au fil de ces rencontres, j’ai été profondément transformé. J’ai compris que ces hommes, ces femmes ont autant apporté à l’humanité que d’autres dont les noms sont célèbres. Cet apport est certainement du même ordre que cette pièce que met la veuve dans le tronc et dont le regard de Jésus révèle la valeur.

Servir la Parole de Dieu, la Parole des pauvres

Dans l’Évangile de Matthieu (ch.25), Jésus s’identifie aux pauvres. On pourrait ajouter aujourd’hui « Je n’avais plus la parole et vous me l’avez donnée ». Dans mon ministère de diacre, j’essaie de vivre le service de la Parole de Dieu, à travers le service de la parole des plus pauvres.
Les voix qui comptent dans notre société sont souvent celles de personnes instruites, qui ont du pouvoir ou de l’argent, qui ont fait de grandes choses aux yeux du monde ou qui, simplement, savent bien manier les mots. Or, faire face à la galère, à l’échec à répétition, demande beaucoup plus d’énergie que vivre la réussite. Ceux qui vivent ces épreuves ont des choses importantes à dire pour notre humanité, mais ils n’en ont pas conscience. Pour que leur parole émerge, il faut qu’ils puissent se retrouver avec d’autres et réaliser la valeur de ce qu’ils vivent. J’ai la chance d’être en lien avec des dizaines de ces groupes à travers la France, où chacun ose, petit à petit, se dire, parce que la confiance, la bienveillance et la fraternité vécues permettent de dépasser la honte et la culpabilité. Ce qui s’y partage est d’une très grande richesse, mais qui reste le plus souvent enfouie. Les pauvres sont généralement vus comme ceux à qui il faut donner, pas comme des contributeurs.
Heureusement des espaces se créent où leur parole est attendue. Je pense par exemple au Conseil national de lutte contre l’exclusion qui fait appel à des personnes qui ont l’expérience de l’exclusion pour participer à l’élaboration des politiques publiques, ou à des diocèses qui lancent des groupes ‘Place et parole des pauvres’, dans la suite de Diaconia 2013. Pour aider ceux qui le souhaitent à mettre en place les conditions pour que cette parole émerge, nous avons créé, à quelques-uns, ‘Participation et Fraternité’. Cette petite association développe des formations-action et accompagne des structures et des groupes de tailles très diverses pour associer ceux qui n’ont qu’une piécette à apporter à la construction de la maison commune.

Daniel Maciel



 


A la croisée des chemins

 

23 novembre 2015 2015 par Rédaction ACO

Mayenne (53) Catherine, membre ACO, est présidente de ’À la croisée’, un espace de découvertes et d’initiatives. Association qui oeuvre dans la lutte contre les exclusions en accueillant des hommes et des femmes de toutes générations, de toutes origines sociales ou culturelles, en activité, en recherche d’emploi ou retraités. Catherine nous livre une belle relecture de son action auprès de personnes en fragilités.

Depuis quelques années, l’association participe à une manifestation organisée par la municipalité : Balades au jardin. Je suis témoin du cheminement de chacun.
Pour choisir le décor, il faut donner des idées, s’écouter. Cette année, les participants ont fabriqué et vendu du mobilier de jardin. Avec cette initiative, c’est toute une reconnaissance qui s’engage : accepter les femmes à l’atelier bois, se sentir connus et reconnus par les ouvriers municipaux, leur demander des outils, puis être invités à boire le café avec eux….
D’autres activités voient le jour, comme ’l’art textile’ qui a même donné lieu à une expo qui s’exporte au Mans. Il fallait partir d’une porte et la reproduire. Créer avec du tissu et différents matériaux. Ce n’est pas facile mais je les sens solidaires, je vois des transformations à chaque atelier : un homme assez ’brut de pomme’ fait une porte capitonnée, et s’apaise.

Des échanges et transformations

La municipalité de Laval s’intéresse à eux. Les œuvres ont été exposées en ville, ils en sont fiers.
Le mari d’une des exposantes vient voir le travail accompli ; lui s’active aux jardins ouvriers, elle participe à la chorale ; ils entrent dans une autre relation de couple, faite d’un regard de fierté posé l’un sur l’autre. ça métamorphose le couple !
Il y a eu beaucoup d’échanges. On était tous au même niveau. Maintenant, tout cela les fait entrer dans une autre histoire, tout ce qu’ils ont fait devient leur vécu : un beau chef d’œuvre !
Ils se sentent à l’aise et ça leur donne envie de découvrir autre chose.

Des défis relevés

Chaque activité est un nouveau défi. La chorale : c’est tenir debout plus de cinq minutes, s’exposer devant les autres… Pour le sport, il faut évaluer le souffle… du coup ceux qui participent font un bilan de santé. Maintenant ils viennent même à pied, ils prennent soin d’eux.
Tout l’art est de convaincre d’essayer. Ces activités attirent de nouvelles personnes, elles se stimulent entre elles. Je suis épatée de voir comment les choses évoluent. Un des participants confie que c’est cet espace qui lui permet de se maintenir en vie.
C’est phénoménal le progrès, ça donne une leçon de vie, ça les sort de leurs problèmes, ça les met debout, leur vie est transformée. Mais cela me transforme aussi. Je donne du temps mais quand je vois le résultat, toutes ces choses positives, ce ne sont pas des miracles, mais… « si les aveugles voient, les boiteux marchent », c’est l’évangile ! ’Nos participants’, si je n’étais pas dans cette association, je ne suis pas sûre que je les aurais remarqués, ni même salués. Si je suis là, c’est grâce à eux. Je n’aime pas qu’on les appelle les ’bénéficiaires’. Je réagis tout le temps quand j’entends cela. Je tiens à ce mot : PARTICIPANTS ! Ils éclairent ma vie, on s’éclaire ensemble.
Catherine C.



 


Humanisme et militance

 

18 septembre 2015 2015 par Rédaction ACO

Pau (64) D’une famille d’agriculteurs, 6 frères et sœurs, Pierre est allé à l’école « où il n’a rien fait, mais a assumé ». Il a commencé à vivre à 19 ans avec le parachutisme qui lui a donné envie de sauter dans la vie et se prendre en charge. Père de 5 enfants, syndicaliste et engagé politique, il témoigne.

Engagement syndical

D’où m’est-il venu ? 4 fois licencié, 3 fois en conseil des prud’hommes, 18 mois de chômage. Mes parents étaient engagés dans l’action catholique rurale et dans le syndicalisme agricole : ils m’ont imprégné de leur combativité contre l’injustice et de la solidarité. J’ai vite pris goût à me défendre, à ne pas accepter la fatalité.
J’ai appris le droit du travail puis je me suis syndiqué à la CFDT pour défendre l’intérêt des salariés, en priorité au conseil des prud’hommes. Tout en donnant des conseils à certains petits employeurs pour trouver, si possible, une solution qui permette à chacun de sortir la tête haute.
Cet engagement fait suite à des rencontres tout à fait inattendues d’Hommes et de Femmes qui sont pour moi des référents, des témoins remplis d’un Humanisme débordant et troublant. Pour certains, c’est leur foi qui agit et qui parle ; pour d’autres, c’est un cœur généreux, rempli d’Amour. Ce que j’ai reçu m’a donné le goût, la faim de l’autre. Ils m’ont donné cette passion du combat collectif pour plus de justice, dans l’intérêt des salariés, du bien commun. J’ai donc fait consciemment le choix de la solidarité au service de l’Homme. Cet engagement m’a apporté l’épanouissement personnel, l’équilibre mais aussi l’ouverture d’esprit, cette curiosité positive et la compréhension des autres.

Au CMR

L’équipe, omniprésente depuis 35 ans, m’a permis d’être ce que je suis et je ne remercierai jamais assez mes coéquipiers ! C’est très important de savoir qu’on n’est pas seul, qu’on peut s’exprimer, partager librement, sans être jugé, surtout quand on est en difficulté ! C’est même vital, un privilège d’avoir un lieu de ressourcement où la confiance règne. J’ai toujours voulu que mon engagement serve à quelque chose, aux salariés, à mes proches, aux jeunes, à l’Homme tout simplement.

Engagement politique

Secrétaire de section PS… je me devais d’apporter aussi mon identité d’humaniste dans ce milieu très particulier, fermé, plutôt personnel, carriériste, moins généreux où le bien commun n’est pas toujours au rendez-vous. Mon engagement a été d’interpeller l’ensemble des élus pour partager leur travail, leurs mandats. Beaucoup de grands élus (député, sénateur, président de région ou de département), ont du mal à rendre compte et à parler de ce qu’ils font, de ce qu’ils vivent. L’exemplarité n’est pas forcément de mise. Le travail collectif est plus difficile, pas forcément la priorité, l’intérêt est ailleurs. Cela crée une ambiance moins humaine, moins chaleureuse, tout est à faire ou à refaire à chaque élection, contrairement au syndicalisme
où il y a une continuité. Le sens donné à cette vie militante ? Interpeller, améliorer, changer les choses pour un monde meilleur, au service de l’Homme.
J’ai grandi et suis devenu ce que je suis avec l’apport des autres. Seul on n’est rien. Même le Christ a choisi le travail collectif, le groupe des 12.
Selon Montesquieu, « lorsqu’on veut faire de grandes choses, on ne se place pas au-dessus des hommes, on se place au milieu d’eux ». La valeur d’un Homme ne réside pas dans ce qu’il a, mais dans ce qu’il est et vit, dans ce qu’il dégage en valeur ou énergie positive.
On ne dépend pas du destin, mais de notre esprit qui est la fenêtre par laquelle nous voyons le Monde, l’Homme et notre Mission sur cette terre. Notre esprit n’a pas de limite. Notre vie n’a pas de limite. Mon combat ? Aimer et être aimé. Vaste programme !

Pierre Camgrand
CMR : Chrétiens dans le Monde Rural.



 


S’engager en politique

 

24 juillet 2015 2015 par Rédaction ACO

Vaucluse (84) Françoise Petot, nouvellement engagée politique, nous partage son cheminement jusque là.

Après avoir travaillé aux ponts et chaussées de Dôle (Jura), puis comme secrétaire de direction dans une entreprise privée, Françoise rejoint son mari muté dans le secteur d’Apt en Vaucluse. Elle s’accorde une pause professionnelle avec la venue de son deuxième enfant. Réussissant son concours d’entrée à l’hôpital d’Apt, elle va pendant 30 ans assumer des fonctions la conduisant, en fin de carrière, au poste de responsable des ressources humaines pour la gestion des médecins et de secrétaires médicales. Très professionnelle, elle n’a cependant rien oublié de sa solidarité acquise dans sa jeunesse avec la JEC et la JOC, puis exprimée dans son engagement d’élue aux parents d’élèves FCPE. Comme "dame catéchiste", elle réalise que le "mélange des genres" forge son ressenti et son ouverture d’esprit. A l’hôpital, cette solidarité s’exprimera avec la CFDT des hospitaliers comme élue au comité paritaire, puis avec l’UNSA au conseil d’administration de l’hôpital.
A la retraite, Françoise s’engage en politique, la revue de l’ACO du Vaucluse l’interroge :

Françoise, une vie d’engagée peut-elle inévitablement développer une conscience politique ?
En tout cas la mienne s’est développée au travers de rencontres riches, mais aussi perturbantes et déstabilisantes, eu égard aux problèmes parfois aigus que les personnes vivent et sur lesquels tu dois chercher des solutions. Bien des fois tu piétines et tu butes : les chemins sont truffés de pierres ! Mais il faut toujours avancer en s’accrochant à ses valeurs personnelles, éthiques, de justice. Je ne renonce jamais quand il s’agit de défendre l’idée que nous serions plus heureux si nous travaillions ensemble pour l’ensemble. La foi, elle, transpire !

Aux dernières élections municipales, tu as accepté d’être sur la liste du maire sortant socialiste et tu as été élue. Quelles sont tes premières impressions dans ce début de mandat ?
Les obligations municipales, c’est un autre genre ! D’autres rencontres ! L’équipe comporte des sortants de la précédente mandature et le sens du partage a du mal à prendre ! N’étant pas prête à faire de la figuration, je m’investis beaucoup et participe à de nombreux groupes de travail, en dehors de mes missions d’élue. Cela me permet de croiser les informations, de comprendre le fonctionnement et de m’intéresser au travail des autres élus. J’apprends beaucoup et je reçois beaucoup.

Tu es membre de l’équipe ACO d’Apt. Comment vois-tu au sein de l’équipe ce vécu d’élue ?
Nous échangeons sur mon engagement et le vécu de chacun, avec ses différences, nous permettant de rester fidèle à l’esprit de l’évangile. La révision de vie, je la vis au quotidien, au rythme des participations aux réunions de travail, des dossiers à faire évoluer pour le bien collectif et aussi, peut être plus encore, des insatisfactions. Mais il faut rester "droit dans ses bottes" ! Je sais pouvoir compter sur l’aide de tous les membres de l’équipe. Dans cette équipe, les différences sont un atout précieux.

Enfin, dans ta paroisse, comment a été perçu ton engagement en politique ?
Assurant le secrétariat de la paroisse une fois par semaine, le père Aurad, curé d’Apt, connaît bien mon opiniâtreté, de même que les membres intervenants sur la paroisse à des titres divers. En fait je ne sais pas trop comment "on me voit", mais est-ce important ? Ma règle : rester moi-même.

Propos recueillis par Daniel Rauch



 


ACO et vie sacramentelle

 

20 mai 2015 2015 par Sandrine Souprayen

Témoignage d’Isabelle qui, en cheminant vers le baptême, a rencontré l’ACO.



 


Petite soeur de l’ouvrier

 

13 mai 2015 2015 par Rédaction ACO

Pas-de-Calais (62) Il y a 40 ans, Odile s’engageait à « suivre Jésus-Christ à la manière des Petites Soeurs de l’Ouvrier ». Bien sûr, son ‘OUI’ initial s’est transformé. C’est chaque jour qu’elle est appelée à le renouveler.

Durant 13 ans sur Paris, j’ai partagé les conditions de travail des caissières en ‘magasin populaire’. Travail rude, décapant en périodes de pointe, au moment des fêtes… Pourtant, avec mes collègues et tout spécialement l’équipe des caissières, nous avons vécu des moments inoubliables. Joie d’un vivre ensemble qui a soudé l’équipe, créé une section syndicale avec l’amélioration de certaines conditions de travail, même si, 30 ans après, il y a remise en cause… Une amitié demeure, bien présente au-delà du temps, des distances.
Je pense à Guilaine qui est retournée à la Martinique, à qui j’avais demandé d’être témoin à mon engagement définitif. Il lui arrive de téléphoner pour prendre des nouvelles et me demander : « Dis, tu es toujours fidèle ? N’oublie pas que j’ai été ton témoin, que j’ai signé le registre ! ».

Dans le chômage

En 1984, après un changement de communauté où je suis envoyée dans le Pas-de-Calais, je bascule dans le chômage… Même avec une communauté, une congrégation, qui vous soutient, la désespérance s’installe très vite… Finalement, la parole d’un psaume -« Mais la ténèbre n’est point ténèbres devant Toi, et la nuit comme le jour illumine… »- m’a donné de comprendre que le Seigneur m’attendait ‘vivante’ avec les demandeurs d’emploi, partageant comme eux, avec eux, cette galère…
Miracle de la Parole priée qui apporte Lumière, Vie. Véritable renaissance avec la création d’un comité chômeurs, puis, en 1988, celle de l’association Pour le Droit au Travail à Lens, née d’une poignée de demandeurs d’emploi que je rejoins à l’appel d’un copain.
L’association adhère au Mouvement National des Chômeurs et Précaires.

Rencontrer l’autre nourrit de manière mystérieuse

En 1990, grâce à tout un élan de solidarité, l’association peut bénéficier d’un local sur le quartier de la Grande Résidence et d’un poste de permanent.
Les copains voteront à l’unanimité mon embauche. Je ne pourrai jamais oublier que je suis sortie du chômage par leur proposition, leur confiance, leur humilité « Nous, on ne saura pas faire. C’est pour toi ». Alors qu’ils avaient charge de famille, parfois sans ASSEDIC, et le RMI se mettait juste en place.

Toujours engagée

Aujourd’hui, à la retraite, je reste engagée, tout particulièrement avec les demandeurs d’emploi, et dans les différentes structures que nous avons mises en place pour tenter de créer de l’emploi. Je continue à être témoin de gestes de solidarité, de combativité, de fraternité, de fidélité, d’espérance… ‘Terre sacrée’ à cultiver !
Dans la prière personnelle et communautaire, dans la relecture du vécu, je recueille cette vie comme un trésor, comme lieu de Sa présence et de communion à Sa vie donnée.
Chemin de vie passionnant… au sens de ‘passion-souffrance’, le réel est quand même, certains jours, lourd à porter, et ‘passion-amour’ par tout ce qui donne du ‘lien’, dans ce quotidien fait de relations, de rencontres (voisinage, courses, transports…), d’engagements. Ma joie n’existerait pas sans toutes ces relations !
Rencontrer l’autre, les autres, nourrit d’une manière ‘mystérieuse’, parfois même apporte plénitude et laisse sans voix… Cette vie contemplée me révèle ‘l’Innommable’ qu’il m’est donné d’adorer au cœur du monde !

Odile Maréchal
Contact : odilemarechal chez orange.fr



 


Assemblée régionale Aquitaine 2012

 

23 avril 2015 2015 par Rédaction ACO


Assemblée Régionale Aquitaine 2012 par acobearnpau64



 


Conception et développement : bonnenouvelle.fr

https://acofrance.fr/spip.php?page=imprimer_rubrique&id_rubrique=23

Contacts locaux


avril 2024 :

Rien pour ce mois

mars 2024 | mai 2024

  • J'accepte de recevoir 1 fois par mois vos informations par email. Désinscription en 1 clic*